Selon l'Agence France-Presse, on ne trouve qu'un seul porc en Afghanistan, où on n'élève pas cette sorte de bêtes mal vues par l'islam (les produits du porc y sont carrément illégaux). Le brave cochon vit donc une existence solitaire au zoo de Kaboul. Et, pas de chance, il vient en plus d'être... mis en quarantaine pour cause d'alerte à la grippe porcine! Il ne pourra plus «flâner dans l'herbe et la douceur printanière avec son meilleur ami, une chèvre», déplore tristement l'agence de presse.

Fallait-il aller jusque-là? Et, au fait, était-il absolument nécessaire de mettre la planète en état de panique, en plus de décréter l'occupation des ondes des télés d'info continue, devant l'irruption d'un virus qui, au total, a fait une trentaine morts confirmés à ce jour dans le monde entier?

 

Par comparaison, 4000 Canadiens meurent chaque année de la grippe «ordinaire», celle dont on ne parle jamais dans les médias...

Néanmoins, la question n'est pas simple.

On crierait certainement au meurtre - c'est le cas de le dire - si un virus devait être gratifié, par négligence des pouvoirs publics et indifférence des médias, de suffisamment de latitude pour tuer des millions de personnes avant que les réflexes de sécurité biomédicale ne s'enclenchent.

Bref, où se trouve le juste milieu, exactement?

La conclusion qui s'impose, et elle a déjà été livrée dans cette colonne, est que, à tout prendre, il vaut mieux pécher par excès de prudence.

Malgré cela, on ne peut s'empêcher de constater, d'abord, que le syndrome de la «pépine» a à nouveau sévi à la télé all-news. Pas la proverbiale «pépine» de l'ex-ministre des Finances du Québec, Mme Jérôme-Forget. Non, celle un jour destinée à briser un embâcle, mais demeurée obstinément immobile pendant des heures derrière un reporter chargé de nous informer, en direct et aux 10 minutes, qu'il ne se passait rien sur les berges de la rivière gelée!

Ensuite, il est impossible de ne pas considérer avec suspicion les parallèles établis avec les pandémies du passé. En particulier avec la grippe espagnole de 1918, qui a fait plus ou moins 40 millions de morts. Faut-il rappeler que, cette fois-là, l'Occident exsangue sortait d'une guerre mondiale déversant son lot de blessés, de malades, d'affaiblis et d'affamés dans une ribambelle de nations ne disposant pas du début du commencement d'un cadre sanitaire ou d'une réplique médicale?

Enfin, l'utilisation politique de la peur du virus A H1N1 est plus que suspecte. L'Égypte a ainsi décrété l'abattage de 400 000 porcs - élevés et consommés par des chrétiens. La Russie a banni les importations de porc en provenance de l'Espagne et du Canada - alors que la maladie ne se transmet pas par la chaîne alimentaire. La Chine a mis en quarantaine des touristes canadiens. Les immigrants mexicains, légaux ou illégaux, sont à nouveau sur la sellette aux États-Unis...

Est-ce bien de la nécessaire prudence que tout cela?

mroy@lapresse.ca