Aux révélations sur le train de vie princier de l'ancien directeur général de la FTQ-Construction s'ajoutent maintenant celles, encore plus troublantes, sur l'amitié entre le président du conseil du Fonds de solidarité et l'un des plus importants entrepreneurs en construction de la province.

Dans la première affaire, la direction du syndicat affirme que tout est rentré dans l'ordre. Cela ne suffit pas. Les membres devraient exiger qu'une vérification indépendante soit menée de sorte qu'ils puissent être rassurés sur l'efficacité des garde-fous mis en place.

 

Dans le second cas, le gouvernement, l'Autorité des marchés financiers et la direction du Fonds doivent sans tarder prendre le problème à bras-le-corps. Le Fonds de solidarité, ce n'est pas le joujou financier de la FTQ. Plus de 575 000 Québécois ont investi une partie de leurs épargnes auprès du Fonds. Les gouvernements du Québec et du Canada appuient l'institution par un crédit d'impôt qui leur coûte chacun plus de 100 millions par an. En conséquence, le Fonds de solidarité et ses dirigeants ont des obligations non seulement à l'égard des investisseurs, mais aussi de tous les contribuables québécois.

C'est pourquoi le comportement de Michel Arsenault, aussi président de la FTQ, soulève des inquiétudes. Selon les révélations faites par l'émission Enquête, de Radio-Canada, et par La Presse, M. Arsenault est un ami de longue date de Tony Accurso, un entrepreneur qui a obtenu l'appui du Fonds de solidarité dans plusieurs de ses projets. L'automne dernier, M. Arsenault et sa conjointe ont passé des vacances à bord du luxueux yacht de M. Accurso.

Le président de la FTQ affirme qu'il n'a rien à se reprocher. «Je ne peux pas gérer la FTQ de mon sous-sol», dit-il. Bien sûr. Mais entre son sous-sol et le yacht de M. Accurso, il y a... les bureaux de la FTQ, boulevard Crémazie.

M. Arsenault et la direction du Fonds jurent que M. Accurso n'a joui d'aucun traitement de faveur. De fait, il n'existe aucune indication du contraire. Mais, dans le domaine financier comme au gouvernement, les apparences comptent. Trouverait-on acceptable que le ministre des Travaux publics passe ses vacances avec un entrepreneur qui sollicite des contrats du gouvernement? Les administrateurs et gestionnaires du Fonds de solidarité devraient s'imposer les normes éthiques les plus élevées.

L'Autorité des marchés financiers, qui inspecte régulièrement les activités du Fonds, devra porter une attention particulière à cette question au cours de sa prochaine visite. Exceptionnel-lement, son rapport d'inspection devrait être rendu public.

Pour sa part, le gouvernement du Québec doit se pencher sur la gouvernance du Fonds.

On exige aujourd'hui que les conseils d'administration des institutions financières soient formés de personnes compétentes et indépendantes. Or, suivant sa loi constitutive, le CA du Fonds de solidarité est formé d'une majorité de syndicalistes de la FTQ. Une telle situation est malsaine et risquée.

Le Fonds de solidarité est une des plus belles contributions du syndicalisme à la société québécoise. Il ne faudrait pas que par laxisme ou lâcheté, on permette que sa crédibilité et sa réputation soient entachées.