Devant l'impasse, le ministre Bachand devra se décider à trancher. Il faut quand admettre que la pensée du ministre du Développement économique a évolué depuis août dernier, alors que la question des heures d'ouverture des magasins d'alimentation refaisait surface.

Devant l'impasse, le ministre Bachand devra se décider à trancher. Il faut quand admettre que la pensée du ministre du Développement économique a évolué depuis août dernier, alors que la question des heures d'ouverture des magasins d'alimentation refaisait surface.

Après avoir déclaré que le débat avait eu lieu en 1992 et qu'il n'y avait pas lieu de le rouvrir, le ministre reconnaît maintenant que des ajustements à la loi sont souhaitables. Il attend cependant pour agir qu'un consensus sur la question se dégage.

Ce point de vue se défend tant que les négociations entre les parties progressent, mais arrive un moment où le gouvernement doit faire preuve d'autorité.

Les temps ont changé, les habitudes de consommation des Québécois aussi; la loi sur les heures d'ouverture des supermarchés doit être dépoussiérée.

Rappelons que ce sont les grandes surfaces de l'alimentation qui, sans crier gare, ont relancé le débat sur les heures d'ouverture.

La tactique employée était originale. Metro, Sobeys et Loblaw offraient une carte postale à tous les clients qui franchissaient les portes de leurs supermarchés après 17h, les soirs de week-end.

Cette carte se voulait une requête au gouvernement pour qu'il modifie la loi régissant les heures d'ouverture. En vertu de l'article 6 de la loi 59, seuls quatre employés peuvent travailler dans un supermarché après 17h, les fins de semaine.

La coalition des épiciers faisait valoir que cette mesure les empêchait de servir correctement leur clientèle. À cet égard, ils avaient et ont toujours raison. Il n'y a rien de plus frustrant que de faire la file un samedi soir à 17h30, parce qu'il n'y a plus qu'une seule caisse en fonction.

Metro, Sobeys et Loblaw savaient très bien qu'ils touchaient là un point sensible. Forte de la réception favorable suscitée par la campagne des cartes postales, la coalition a contacté les Travailleurs unis de l'alimentation et du commerce, les TUAC, un syndicat affilié à la FTQ qui représente 40000 employés de ce secteur.

Les TUAC ont reconnu que la situation actuelle n'avait plus de bon sens. Non seulement la règle des quatre employés ne répondait plus au besoin des consommateurs, mais en plus, c'était leurs membres qui avaient à subir la grogne et les sarcasmes des clients.

Des négociations se sont donc amorcées et un bon bout de chemin a été parcouru, jusqu'à l'impasse actuelle.

Quand on y regarde de près cependant, les positions des deux parties ne sont vraiment pas si éloignées que ça. Se rendant à la demande des grandes surfaces de l'alimentation, les TUAC se sont dits prêts à accepter l'abandon de la règle des quatre employés, mais à deux conditions: les magasins fermeront tous les soirs à 21h et les employés auront droit à sept congés fériés.

Pour l'instant, ils n'en ont aucun. Les commerçants réclament de leur côté une fermeture complète à 22h et sont prêts à accorder quatre jours fériés. Une heure les sépare et trois jours de congé. On a déjà vu impasse plus infranchissable.

Soyons clairs, les grandes surfaces ont obtenu ce qu'elles voulaient. C'est le week-end qui causait problème à leurs clients et c'est là-dessus qu'elles ont axé leur campagne de sensibilisation.

La proposition des TUAC répond à leur demande. Que le syndicat ait des exigences en retour n'a rien d'étonnant. C'est le propre d'une négociation. Ce serait évidemment mieux si les parties s'entendaient d'elles-mêmes, mais si chacun reste camper sur sa position, Québec doit jouer son rôle d'arbitre. C'est le temps de mettre ses culottes.

De toute façon, il y a consensus sur le fond. Tous les acteurs conviennent que la loi actuelle n'est plus adéquate. Risque-t-on une crise nationale si les supermarchés ferment à 21h plutôt que 22h? Non. D'autant plus que les dépanneurs sont là pour ceux qui s'aperçoivent qu'il n'y a pas de lait pour le petit déjeuner du lendemain.

Certains pourraient souhaiter qu'on laisse le marché déterminer les règles du jeu. Pourquoi, en effet, légiférer les heures d'ouverture des grandes surfaces d'alimentation? La réponse est bien simple, parce que c'est le rôle d'un gouvernement d'encadrer et de civiliser la concurrence.

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