Révélé chez nous grâce à deux films québécois marquants, l'acteur français Dimitri Storoge explore aujourd'hui un tout autre registre en jouant l'un des rôles principaux de Belle et Sébastien, un film destiné à toute la famille.

Sa tête reviendra sans doute très vite à l'esprit des cinéphiles québécois. Dimitri Storoge fut d'abord révélé chez nous grâce à Dédé à travers les brumes, le beau film de Jean-Philippe Duval consacré au regretté André Fortin et à son groupe, Les Colocs. L'acteur français se glissait alors dans la peau de l'harmoniciste Patrick Esposito di Napoli, aussi mort trop tôt à l'âge de 30 ans.

Puis, face à Catherine de Léan, Dimitri Storoge a prêté ses traits (et tout le reste!) au personnage masculin de Nuit # 1, le remarquable premier long métrage d'Anne Émond. D'une certaine façon, le lien avec le Québec se prolonge actuellement, car l'acteur donne ces temps-ci la réplique sur scène à Niels Schneider. Dans l'adaptation libre de Roméo et Juliette que propose le Théâtre de la Porte Saint-Martin à Paris (une mise en scène de Nicolas Briançon), Dimitri Storoge incarne Mercutio, le grand ami du héros romantique de Shakespeare (interprété par l'acteur franco-québécois).

Son actualité cinématographique nous entraîne toutefois dans un tout autre monde.

Un virage

Dimitri Storoge incarne au grand écran le personnage du docteur Guillaume dans l'adaptation cinématographique de Belle et Sébastien. Cinquante ans après sa création à la télé française, où elle a vite atteint le statut de culte, la série est aujourd'hui devenue un film destiné à toute la famille, gratifié là-bas d'un vrai succès public. Depuis sa sortie à la mi-décembre, Belle et Sébastien a déjà attiré plus de trois millions de spectateurs dans les salles françaises.

«Quand on m'a proposé ce rôle, je n'ai pas hésité, explique l'acteur au cours d'un entretien accordé à La Presse en marge des Rendez-vous du cinéma français, tenus à Paris le mois dernier. L'histoire est très belle. En plus, je n'ai pas souvent eu l'occasion de jouer de bonnes personnes au cinéma français. On m'offre toujours des rôles de revendeur de drogue ou de criminel. Là, j'ai enfin pu tourner dans un film que mes enfants pourront voir!»

Campé dans les Alpes au moment où la Seconde Guerre mondiale fait rage (une différence notoire d'époque comparativement à la série), le récit décrit l'amitié indéfectible qui se noue entre un petit villageois solitaire, Sébastien (Félix Bossuet) et Belle, une chienne «sauvage» qui, progressivement, se laisse apprivoiser.

Contrairement à chez nous, où cette histoire est surtout connue grâce à une série animée japonaise inspirée de la série française, Belle et Sébastien est déjà inscrit à jamais dans l'imaginaire des Français. L'idée d'en faire un film ne relevait pas de l'évidence.

«Plusieurs hommes français sont prénommés Sébastien grâce à la série, observe Dimitri Storoge. C'est dire à quel point elle a marqué nos enfances. À l'époque, toutes les petites filles étaient amoureuses de Mehdi, qui jouait Sébastien. L'une des difficultés aura été de se mesurer à une série aussi célèbre, que les gens affectionnent encore beaucoup. Il fallait trouver le moyen de proposer autre chose, sans toutefois décevoir les admirateurs.»

Un tournage «en vrai»

De l'avis de l'acteur, la clé résidait du côté du choix du réalisateur. Ce dernier a emprunté une approche réaliste, tout en gardant évidemment à l'esprit la notion de conte.

«Honnêtement, je crois que Nicolas Vanier était le cinéaste tout indiqué pour mener à bien ce projet. Nicolas a déjà tourné de magnifiques films documentaires, parmi lesquels Le dernier trappeur. Il a aussi réalisé Loup il y a quelques années. Il sait filmer la nature et les grands espaces comme personne. D'ailleurs, le tournage du film s'est entièrement déroulé en Haute-Savoie. Nous n'avons strictement rien tourné en studio. Je crois que ça ajoute à l'authenticité de l'histoire. Quand j'ai vu le film une première fois, j'ai vraiment été content. Visuellement, c'est d'une beauté à couper le souffle.»

Dimitri Storoge se réjouit aussi à l'idée qu'un film destiné à toute la famille puisse être produit avec des moyens conséquents.

«À mes yeux, le phénomène semble être de plus en plus rare, dit-il. Belle et Sébastien est un film conçu spécifiquement pour plaire à toutes les générations. Pour une fois, les parents peuvent emmener leurs enfants au cinéma et avoir autant de plaisir qu'eux. Je dirais même qu'un film comme celui-là peut rapprocher les générations et susciter un dialogue. Il donne en tout cas l'occasion de parler de la grande Histoire, qu'il ne faut pas oublier, et aussi des valeurs de liberté, d'amitié, de confiance. Ce sont toutes des valeurs essentielles de la vie.»

Belle et Sébastien prend l'affiche le 21 février. Les frais de voyage ont été payés par Unifrance.