Une boîte contenant un esprit maléfique, une fillette possédée, des parents désemparés, un exorcisme: l'air est connu. Ole Bornedal l'interprète toutefois à sa façon dans The Possession. Rencontre avec le réalisateur danois et les acteurs qui ont plongé avec lui dans cette descente aux enfers d'une famille jusque-là sans histoire.

L'article a paru en 2004 dans le Los Angeles Times. Il y était question d'une boîte antique contenant un Dibbuk - autrement dit, dans la tradition juive, un esprit maléfique - dont les différents propriétaires auraient été victimes d'étranges accidents, d'hallucinations, de maladies soudaines. De quoi attirer l'attention de Hollywood. Voici donc The Possession d'Ole Bornedal (Nightwatch), qui met en vedette Jeffrey Dean Morgan (Watchmen), Kyra Sedgwick (The Closer) et la jeune Natasha Calis, native de Vancouver.

«Nous avions un objet "menaçant" plutôt original. Il nous fallait trouver à qui le "confier" pour bâtir une histoire», se rappelait, en conférence de presse, le scénariste Stile White qui, lorsque le projet a été connu, a reçu un appel téléphonique du Missouri. C'était le propriétaire de la «vraie» boîte. «Il proposait de nous la prêter!», poursuit Juliet Snowden, qui cosigne le scénario. «Notre réponse a été immédiate: "Hell, no! "»

Ils n'avaient pas envie de tenter le diable et se sont concentrés sur la famille Brenek. Les parents viennent de divorcer. Un nouveau quotidien s'installe. Jusqu'à ce que la jeune Em se mette à changer après avoir acheté une vieille boîte en bois. «J'avais deux rôles à jouer, raconte Natasha Calis. Celui d'une fille de 11 ans comme les autres et celui d'une fille de 11 ans dévorée de l'intérieur par un démon.»

«Le genre "horreur" est très américain et très mainstream, observe Ole Bornedal. Les clichés y sont nombreux, il faut les retrouver, mais aussi se battre contre eux, réinventer les émotions.» Lui, visait le naturel, le viscéral. Lorsqu'il a rencontré Natasha Calis, il lui a donc demandé de fermer les yeux, de plonger en elle-même. «Au bout d'un moment, elle a rouvert les yeux, comme si elle sortait d'une transe. Je lui ai demandé ce qui lui arrivait. Elle m'a dit que quelqu'un était "assis" en elle.» «Qui est-il?», a poursuivi le réalisateur. «Ce n'est pas un "il", c'est une "elle". Une vieille femme polonaise», a répondu la jeune comédienne.

La scène, peaufinée par les scénaristes, se retrouve dans The Possession. Et la vidéo de cette audition est ce qui a convaincu Jeffrey Dean Morgan et Kyra Sedgwick d'embarquer dans l'aventure. «J'aimais le scénario, mais en voyant Natasha, j'ai su qu'on pouvait faire quelque chose de très bon», raconte Jeffrey Dean Morgan, dont l'expérience de tournage la plus marquante s'est déroulée dans l'hôpital psychiatrique désaffecté où ils ont tourné l'exorcisme: «Nous devions traverser une grande pièce, déposer Natasha sur une table et "Coupez! " Mais le "Coupez! " n'est jamais venu. Nous avons continué pendant sept ou huit minutes, nous criions, Natasha hurlait, c'était de l'émotion brute qui venait de partout. À la fin, nous étions tous en larmes.»

Tous, y compris Matisyahu. Le jeune rappeur juif incarne ici le fils d'un rabbin hassidique. C'est lui qui pratique l'exorcisme. «Aux répétitions, j'avais tendance à "chanter" les lignes en hébreu, comme cela se fait dans la réalité où les prières sont dites de façon non émotives», explique le jeune homme dont c'était la première expérience de jeu. «Mais Ole m'interrompait, me disait d'arrêter de chanter. Et comme je n'y arrivais pas, il m'a envoyé son assistante pour qu'elle me gifle, me fasse tomber, déchire ma chemise.» À partir de là, il a été «dans» la scène et n'a plus eu de problème à hurler.

«Mais ne voyez surtout pas en moi un réalisateur scandinave qui vient blesser d'innocents acteurs américains sur leur propre territoire!» conclut Ole Bornedal. Là-dessus, sourire énigmatique. Un peu diabolique?

The Possession (La possession) prend l'affiche aujourd'hui.

Les frais de voyage ont été payés par Alliance Vivafilm