Pour sa deuxième réalisation, Denzel Washington s'est attardé à une histoire exemplaire des années 30, dans laquelle des étudiants noirs viennent à bout de l'adversité grâce à leurs talents oratoires. The Great Debaters est produit par la société que dirige Oprah Winfrey. 

The Great Debaters, qui vient d'obtenir une nomination dans la catégorie du meilleur film dramatique de l'année aux Golden Globes, est construit comme un drame sportif. Une équipe négligée, venue d'une petite bourgade modeste perdue au sud du pays, est en effet amenée à disputer une joute importante contre les grands favoris de leur discipline, issus d'une noble institution dont la réputation n'est plus à faire. On ne parle pourtant pas de football ici. Ni de basketball, pas plus que de baseball ou de hockey. 

La partie cruciale qui se joue dans le nouveau film de Denzel Washington relève plutôt de l'ordre de la connaissance, du savoir et de l'échange des idées. Et célèbre au passage les vertus de l'éducation. 

«Il y a toujours une dynamique fascinante dans ce genre de films, expliquait l'acteur-cinéaste au cours d'une conférence de presse tenue récemment à Los Angeles. Je n'y vois pas une démarche militante à proprement parler mais j'aime mettre en lumière des histoires édifiantes. Surtout quand elles ne sont pas encore très connues.» 

L'histoire de The Great Debaters, bien qu'enrichie de nombreux éléments de fiction, est inspirée de la vie du poète Melvin B. Tolson. Dans les années 30, ce dernier a dirigé une petite équipe d'élèves du Wiley College (une institution modeste située dans la petite ville de Marshall, au Texas) dans des «tournois» de joutes oratoires où étaient débattus différents enjeux. Vingt ans plus tard, plusieurs des étudiants de Tolson devaient jouer un rôle important dans le mouvement pour la reconnaissance des droits civiques. 

«Aujourd'hui, le discours est livré sous une autre forme car nous n'avons pas été habitués à travailler les mêmes "muscles", fait remarquer Washington. Cela dit, le spoken word est encore une forme d'expression très populaire. Le hip hop et le rap se réclament aussi parfois de la poésie. Certains artistes ont des choses importantes à dire et le font très intelligemment.» 

Proposer The Great Debaters aux spectateurs d'aujourd'hui, particulièrement les plus jeunes, est aussi une façon de les familiariser avec l'histoire. Les protagonistes évoluent en effet dans un contexte où l'égalité des droits entre Blancs et Noirs, tenue pour acquise maintenant, était encore loin d'être la norme. Sans parler de ces crimes haineux dont étaient parfois victimes ces citoyens de «seconde zone». 

Denzel Whitaker, un acteur adolescent qui incarne le plus jeune des membres de l'équipe du Wiley College, ne cache pas avoir été bouleversé pendant le tournage. 
«C'était vraiment très dur de jouer un personnage vivant à une époque où les Noirs étaient réellement ostracisés. Cela m'a dévasté. C'était comme si je comprenais de façon tangible ce qu'on ose à peine effleurer dans les livres d'histoires. J'ai honte de l'Amérique de cette époque. J'ai honte pour les humains en général!» 

Aussi le récit met-il l'accent sur l'importance de l'éducation, même si, en 1935, les possibilités pour les Noirs de se faire une place dans la société étaient très minces. «Le type que je joue aurait très bien pu devenir Barack Obama s'il avait vécu à notre époque, observe Nathan Parker, l'interprète du plus brillant orateur de la bande. Mais il devait d'abord s'assurer de survivre dans un monde hostile, un monde dans lequel il a notamment été témoin de lynchages. Il nous importait de faire honneur au courage de ces gens.» 

Un rôle plus important 

Produit par Harpo Films, une société que dirige Oprah Winfrey, The Great Debaters est la deuxième réalisation de Denzel Washington. L'acteur s'est réservé cette fois un rôle plus important que celui qu'il campait dans Antwone Fisher, son premier film. Il prête ainsi ses traits à Tolson, ce coach qui deviendra un mentor pour ses élèves, et qui s'impliquera aussi clandestinement dans les mouvements ouvriers. 

«J'ai travaillé en dilettante pendant quatre ans sur ce film, toujours entre deux autres projets pour lesquels j'étais embauché comme acteur, explique Washington. On m'a d'abord contacté pour assurer la réalisation, mais on m'a ensuite fait comprendre que pour obtenir un budget conséquent, il vaudrait mieux que j'y tienne aussi un rôle!» 

Le passage derrière la caméra lui aura en tout cas permis de mieux apprécier les talents particuliers des grands cinéastes sous la direction desquels il a tourné.
«C'est fascinant d'observer des gens comme Spike Lee au travail, dit-il. J'ai appris des tas de trucs en côtoyant des gens de cette trempe mais je n'ai pas encore eu l'occasion de tout mettre en pratique. Mais ça viendra!» 

Signalons qu'en plus de Denzel Washington et ses jeunes partenaires, The Great Debaters met aussi en vedette Forest Whitaker. Ce dernier incarne le père de l'un des étudiants.