L'acteur américain Tobin Bell, à qui la série de films d'épouvante à succès Saw a offert une célébrité tardive et inattendue dans le rôle du psychopathe Jigsaw, assure que l'on peut «accomplir les mêmes choses dans un film d'horreur que dans une pièce de Shakespeare».

Aujourd'hui âgé de 67 ans, ce natif de New York formé au célèbre Actors studio par l'un de ses fondateurs, Lee Strasberg, n'était pas parti pour devenir un célèbre meurtrier sur grand écran.

Avant d'embarquer dans le projet Saw en 2004, il était surtout connu pour ses seconds rôles dans Mississippi Burning (Alan Parker, 1988), Goodfellas (Martin Scorsese, 1990) ou The Firm (Sydney Pollack, 1993), après avoir commencé sur les planches, à New York, avec Shakespeare.

Mais son physique un rien inquiétant - front haut, yeux bleus perçants et traits pointus -, qui lui a valu plusieurs rôles de meurtriers et de traîtres, a fini par lui ouvrir, sur le tard, les portes de la célébrité.

«Jamais je n'aurais pensé devenir le personnage principal d'une série de films à succès», assure-t-il à l'AFP d'une voix aussi douce qu'inquiétante, quelques jours avant la sortie vendredi de Saw 6 aux États-Unis.

«C'est quelque chose qui n'arrive qu'une seule fois dans une carrière, c'est incroyable», ajoute-t-il.

Tobin Bell marche aujourd'hui dans les pas de Robert Englund, alias Freddy, seul autre acteur, avec ses traits mutilés et ses dents jaunes, à s'être imposé sur la durée dans une série d'épouvante - huit Freddy, de Nightmare on Elm Street (1984) à Freddy VS Jason (2003).

Son personnage de Jigsaw, un homme atteint d'un cancer en phase terminale qui élimine ses victimes au prétexte qu'elles n'ont pas suffisamment valorisé la chance d'être en vie, «ne se voit pas comme un psychopathe, et je ne le vois pas comme ça non plus», observe-t-il.

«Bien entendu, les spectateurs se feront leur propre jugement quant à savoir s'il a dépassé les limites, s'il a une quelconque moralité ou pas, mais c'est à eux de décider», estime-t-il. «Moi, je suis un acteur. Et si Jigsaw ne se voit pas comme un monstre, je ne vais pas le jouer comme ça», dit-il.

Si la série, produite par Lionsgate, a suscité de nombreuses polémiques pour ses scènes de violence parfois insoutenables, Tobin Bell considère que les Saw sont avant tout des films «de notre temps», avec un «concept fort».

Pour lui, tout se résume à cette question, que chacun peut se poser: «Seriez-vous le même si vous connaissiez l'heure exacte de votre mort?». «Je pense que c'est cette idée qui fait le succès de la série», estime Tobin Bell.

Saw est aujourd'hui la série de films d'horreur la plus rentable de l'histoire du cinéma, avec des recettes mondiales cumulées de 665 millions de dollars et 28 millions de DVD écoulés pour les cinq premiers opus de la série.

Si Tobin Bell n'est pas un grand amateur d'épouvante, il assure néanmoins que le genre a sa noblesse et que «c'est juste une question de «scénario».

«Très souvent, les films d'horreur ont été une sorte de parent pauvre, juste parce que (les auteurs) se sont dit : «Oh, on n'a pas besoin de scénario, on juste besoin du couteau et de la caméra!»».

Dans son panthéon personnel figurent néanmoins deux films d'épouvante, The Descent (Neil Marshall, 2005) et Jacob's Ladder (Adrian Lyne, 1990), «un film qui a vingt ans mais qui vaut le peine d'être vu, très effrayant».