L'un des 3000 enfants qui ont perdu un parent dans les attentats du 11 septembre 2001 cherche à comprendre l'incompréhensible. Le réalisateur britannique Stephen Daldry porte à l'écran le roman de Jonathan Safran Foer. Extremely Loud and Incredibly Close met en vedette un nouveau venu, Thomas Horn, et une «revenante», Sandra Bullock. Rencontres.

C'était le 11 septembre 2001. Sandra Bullock se trouvait à New York. De sa chambre d'hôtel, elle avait vue sur les tours jumelles. De sa chambre d'hôtel, elle a vu le second avion percuter la seconde tour. Plus de 10 ans plus tard, les émotions et les souvenirs du moment sont toujours là. Ce sentiment d'incompréhension aussi, parce que «notre esprit refuse de comprendre comment quelqu'un peut faire une telle chose», a indiqué la comédienne en conférence de presse à New York.

C'était à quelques semaines de la sortie d'Extremely Loud and Incredibly Close de Stephen Daldry, inspiré du roman de Jonathan Safran Foer et dans lequel on suit un gamin de 11 ans, Oskar (Thomas Horn), menant une enquête dans la Grosse Pomme afin d'élucider la dernière énigme que lui aurait involontairement posée son père (Tom Hanks), l'une des victimes des attentats. Sandra Bullock, elle, incarne la mère d'Oskar. Elle en semble la première surprise.

Retour en arrière

En 2010, elle a remporté l'Oscar de la meilleure actrice pour son rôle dans The Blind Side. Peu après, l'infidélité de son mari a fait la une des journaux à potins. Divorce. Puis, adoption d'un bébé. Et éclipse totale. Pendant plus d'un an, Sandra Bullock a disparu des écrans et des manchettes. «Je ne pensais absolument pas à travailler. J'étais une mère qui s'occupait de son fils, c'était ma seule priorité. Il fallait un projet extraordinaire pour me faire sortir de ma bulle.»

Là intervient Stephen Daldry. Le réalisateur de The Hours et de The Reader, un habitué des adaptations de romans aussi aimés et brillants qu'exigeants, s'est rendu chez elle. Ils ont parlé de Linda, mère d'Oskar, veuve de Thomas, et du riche contenu implicite de ce livre où il est question de la manière dont les gens, enfants et adultes, vivent leur chagrin. Et de ce qui se passe s'ils nient ce chagrin. «Cette histoire est une manière d'honorer la douleur des gens. J'aime aussi la façon dont elle montre plusieurs générations en deuil, et comment elles se guérissent l'une l'autre en s'écoutant et en se parlant.»

Entrer par la grande porte

Oskar, à la recherche d'une serrure dont il a trouvé la clé dans les possessions de son père, part à la rencontre de dizaines d'habitants des différents quartiers de la ville. Il trouvera aussi un certain réconfort auprès de sa grand-mère (Zoe Caldwell) et d'un vieil homme qui ne parle plus. «Mais il est possible de «parler» sans prononcer un mot», assure Max von Sydow, qui incarne avec maestria ce vieillard hermétique: «Ce n'est pas différent de n'importe quel autre rôle, assure le vétéran acteur. Le métier, c'est de comprendre ce qui se passe dans la tête du personnage et de le rendre. Tout est sur la page - avec ou sans mots.»

Les mots, ils sont, pour beaucoup, dans la bouche d'Oskar. Donc, de Thomas Horn, dont c'est le premier rôle. Et dont la mission est de porter le film sur ses épaules, rien de moins. «Je savais que le film serait impossible à faire si nous ne trouvions pas le bon garçon, indique Stephen Daldry. Ç'a été des auditions longues et difficiles.» Pour le principal intéressé aussi - qui a atterri par accident dans le processus de sélection: les responsables da la distribution l'avaient vu à l'émission Jeopardy! Kids en 2010... et lui ont proposé d'auditionner pour le film. Il leur a donc envoyé l'enregistrement de l'émission.

«Je n'ai entendu parler de rien pendant deux mois, mais ce n'était pas grave: je n'attendais pas de réponse. Et puis, on m'a fait venir à New York. J'étais là, en compagnie de six autres garçons, l'atmosphère était vraiment chargée», se souvient-il. Enfin, Stephen Daldry l'a rappelé, quelques semaines plus tard, pour lui dire qu'il avait le rôle.

Mais auparavant, le réalisateur avait dû convaincre le studio que Thomas pouvait être Oskar: «Il est extrêmement différent du personnage et n'avait pas d'expérience de jeu.» Très à l'aise avec le fait de s'exprimer devant une foule, le jeune acteur est en effet à des lustres du garçon asocial - mais verbomoteur - qu'il incarne. Ils partagent toutefois une maturité et une éloquence certaines. «Oskar a peur de tout, il n'a pas d'amis à l'école. Il ne fait confiance qu'à son père, qui représente 95% des relations qu'il a avec le monde. Ils se sont inventé des jeux, des énigmes. Quand il le perd, il n'a plus personne», résume Thomas Horn.

D'accord, il a sa mère. Mais il n'a pas avec elle le plus simple des rapports. «J'ai déjà joué des mères dans des contextes plus légers», pouffe l'actrice qui a un lien particulier avec New York: «Mon père était professeur de chant ici et ma mère y chantait l'opéra. Nous avions un minuscule studio où nous descendions régulièrement», se souvient-elle... avant d'ajouter que, de toute manière, tout le monde est à sa place dans cette ville. «Enfin, sauf si vous êtes un touriste portant des chaussettes noires et des sandales.» Message?

Extremely Loud and Incredibly Close (Extrêmement fort et incroyablement près) prend l'affiche le 20 janvier.
Les frais de voyage ont été payés par Warner Bros.