Dans Bungalow, deuxième long métrage – très décapant – de Lawrence Côté-Collins, Sonia Cordeau a l’occasion de proposer une autre facette de son talent d’actrice, en plus d’y tenir son premier grand rôle au cinéma. Elle ne pourrait en être plus ravie. Rencontre.

Quand elle a lu le scénario de Bungalow la première fois, c’était pour préparer son audition. À cette étape, Sonia Cordeau ne pouvait pas encore imaginer visuellement ce qu’allait devenir ce long métrage tellement l’univers foisonnant et coloré de Lawrence Côté-Collins ne peut se décrire en caractères noirs sur une page blanche entre des marges trop réductrices. L’évidence, pourtant, lui a tout de suite sauté au visage.

« Je n’ai jamais autant voulu quelque chose ! », s’exclame celle qui comptait déjà quelques rôles secondaires au cinéma, le plus récent étant celui qu’elle tenait dans L’arracheuse de temps (Francis Leclerc). « Tout cela s’est déroulé à l’époque où je participais au talk-show de Stéphane Rousseau [Le show de Rousseau à V], une période un peu difficile pour moi parce que je ne me sentais pas du tout à ma place. Or, en lisant ce scénario [coécrit par Lawrence Côté-Collins et Alexandre Auger], je me suis tout de suite vue là-dedans. »

Du rêve au cauchemar

Dans ce nouveau long métrage de Lawrence Côté-Collins, une réalisatrice ayant jusqu’ici fait sa marque dans le cinéma plus underground (Écartée, son premier long métrage, a obtenu le prix du public Bronze au festival Fantasia en 2016), Sonia Cordeau incarne Sarah, une obsédée de la rénovation qui, en compagnie de son conjoint (Guillaume Cyr), achète un bungalow complètement délabré pour en faire sa maison de rêve. Bien évidemment, le fantasme se transformera vite en cauchemar, encore pire que ce qu’on aurait pu imaginer...

« Je lisais ce scénario et j’avais l’impression de m’entendre parler ! indique l’actrice. J’aurais tellement aimé l’écrire, pour ce que ça dit sur la société de consommation, sur le désir – ou pas – de fonder une famille, sur les relations de couple. On aborde ici des thèmes que j’aimerais traiter moi aussi dans ma création. »

Même si les deux femmes ne se connaissaient pas avant que Sonia Cordeau se présente à l’audition, la connivence fut pratiquement instantanée tellement les points communs sont nombreux entre elles. Lawrence Côté-Collins voit d’ailleurs le personnage de Sarah comme un alter ego. Bien que le cadre soit complètement éclaté et que Bungalow emprunte la forme d’une comédie où l’humour est bardé de noir, Sonia Cordeau voit Sarah sous un angle essentiellement dramatique.

On m’a enfin donné l’occasion de jouer un rôle différent. Je ne suis pas la comique du film et, vraiment, ça me réjouit. J’ai toujours eu peur d’être trop cataloguée dans l’humour. Je me bats pour essayer de montrer autre chose, mais quand on nous place dans une case, il est parfois difficile d’en sortir et de casser l’image.

Sonia Cordeau

De vraies affinités

Ayant participé à l’aventure des Appendices parallèlement à ses études au Conservatoire d’art dramatique, Sonia Cordeau est maintenant ravie de pouvoir franchir une nouvelle étape en jouant un personnage avec lequel elle a de vraies affinités.

« Comme Sarah est un peu l’extension de Lawrence, il est vrai qu’un lien particulier s’est créé entre nous, ajoute l’actrice. Je l’observais beaucoup en tout cas ! En même temps, j’en ai fait mon affaire et j’ai senti que Lawrence avait confiance en ce que je faisais. Le tournage a eu lieu il y a deux ans, en pleine pandémie. Nous avons alors pu constater à quel point nous nous ressemblions, bien que ma nature soit plus réservée. On a beaucoup parlé pendant nos marches. On partageait les mêmes questions existentielles, les mêmes préoccupations. Les conditions de tournage étaient très particulières, mais je me considérais comme tellement chanceuse de pouvoir jouer. Dans ce film-là en plus ! »

PHOTO FOURNIE PAR LES FILMS OPALE

Sonia Cordeau et Geneviève Schmidt dans Bungalow

Issue d’une famille où la culture a toujours occupé une place de choix, Sonia Cordeau a choisi d’exercer ce métier le jour où elle a constaté comment son père réagissait aux histoires qu’on lui racontait au cinéma ou à la télévision. Et, plus largement, comment cette émotion pouvait se transmettre chez un public.

« Je me suis dit : oh wow ! On peut provoquer ça chez les gens, les atteindre de cette façon. Je crois que l’élément déclencheur de mon envie de devenir comédienne se trouve dans l’œil de mon père. J’ai d’abord étudié en arts visuels au cégep parce que, inconsciemment, je sentais le besoin d’explorer autre chose avant de travailler sur moi-même. Ensuite, je suis allée m’inscrire au Conservatoire et on m’a acceptée. Si ça n’avait pas été le cas, je ne sais vraiment pas ce que j’aurais pu faire d’autre. »

Une œuvre

N’ayant jamais cessé de travailler, écrivant parfois ses propres projets, cette grande admiratrice de films d’horreur, qui a de plus en plus de mal à satisfaire son besoin de frissons, car elle en connaît maintenant trop bien les rouages, souhaiterait écrire une grande comédie romantique à la When Harry Met Sally, un autre genre cinématographique dont elle est friande. En attendant, Sonia Cordeau espère une vraie rencontre entre l’univers de Lawrence Côté-Collins et le public.

« J’y crois vraiment, dit-elle. Je suis convaincue que Bungalow pourra plaire à tous les publics, car il aborde des thèmes qui concernent tout le monde. Grâce à ce film, j’ai vraiment l’impression de faire partie d’une œuvre, de la vision d’une artiste. Et j’espère que ça n’est que le début. J’ai maintenant la piqûre du cinéma ! »

Bungalow prendra l’affiche le 7 avril.