Devant déménager leur mère de sa résidence pour personnes âgées vers un CHSLD, le cinéaste Denys Desjardins et sa sœur Maryse entrent dans les dédales d’un système sous-financé. Sous la forme d’un journal filmé, M. Desjardins pose un regard aimant sur cette femme enjouée et documente leurs démarches pour lui assurer de partir dans la dignité.

De son histoire d’amour avec sa mère, Denys Desjardins avait tiré un premier chapitre dans Le château, sorti en 2020. Le réalisateur, dont l’approche relève du cinéma direct, y présentait Madeleine Ducharme-Desjardins, une femme drôle et attachante atteinte de la maladie d’Alzheimer, qui perd progressivement son autonomie. Celui qui aime les aînés et qui les a filmés à travers son œuvre avait trouvé en sa mère un personnage.

Dans J’ai placé ma mère, on renoue avec la joie de vivre de Madeleine et avec le dévouement de ses enfants, qui se heurtent à un système où la bureaucratie semble avoir avalé l’humanité. Ce déficit d’empathie s’exacerbe lorsque la pandémie de COVID-19 frappe, en mars 2020. Proches aidants, Denys et Maryse Desjardins n’ont plus accès à leur mère, alors hébergée au CHSLD Notre-Dame-de-la-Merci, l’un des plus touchés par la COVID-19. Le cinéaste retiendra une image puissante de sa mort, le 31 mars de cette année-là : celle de sa main gantée caressant les doigts rigides de sa mère.

Les sons grinçants et hachurés, qui avaient été utilisés dans Le château pour marquer le point de bascule dans l’état de santé de Madeleine, occupent une place prépondérante dans cet autre film. La famille a cette fois basculé dans les dédales administratifs, une réalité mise en son par les bruits de tonalité téléphonique, les sonneries, les bips de boîtes vocales et les nombreux messages vocaux que se laissent membres de la famille et personnel du CLSC. Il y a l’urgence aussi, exprimée par les tic-tac de l’horloge, un rythme qu’épousent les voix de la musique et qui contraste avec celui du montage, plus lent, lequel, couplé à des plans souvent fixes, a pour effet d’accentuer le sentiment d’enfermement.

Bien que cette histoire soit la sienne, Denys Desjardins se met en scène avec humilité et retenue. Son histoire a peut-être été ou sera la vôtre. C’est aussi une déclaration d’amour touchante d’un fils à sa mère, une œuvre de mémoire nécessaire pour toutes les familles qui ont perdu un proche pendant la pandémie et un cri du cœur pour une amélioration des soins offerts aux aînés.

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J’ai placé ma mère

Documentaire

J’ai placé ma mère

Denys Desjardins

Avec Madeleine Ducharme-Desjardins, Maryse Desjardin et Denys Desjardins

1 h 15

7,5/10