Une femme habitant une ferme des Cantons-de-l’Est, tout près de la frontière américaine, se sent constamment menacée depuis qu’un accident tragique est survenu dans sa vie. Son clan familial – ses deux sœurs et sa mère – se resserre autour d’elle afin de la réconforter.

Ce qui frappe d’abord dans ce nouveau film de Guy Édoin, c’est à quel point le cinéaste, qui en est à son quatrième long métrage de fiction, parvient à traduire à l’écran de façon réaliste le milieu qu’il décrit, tout en y ajoutant subrepticement une touche surréaliste, qui s’intègre parfaitement à son récit.

Dans une contrée frontalière, la vie est foncièrement différente, tout comme les enjeux. Le réalisateur de Marécages, qui a tourné Frontières dans sa propre ferme, l’illustre d’entrée de jeu en montrant Diane (Pascale Bussières) qui prend sans aucune hésitation sa carabine de chasse pour aller affronter directement des chasseurs du dimanche ayant eu le culot d’abattre un chevreuil sur un territoire appartenant à sa famille.

Fidèle à sa démarche, Guy Édoin propose des portraits de femmes fortes, des terriennes dans ce cas-ci, qui, malgré les dissensions et les désaccords, savent se regrouper instinctivement dans les moments de crise. C’est ce que font Carmen (Christine Beaulieu) et Julie (Marilyn Castonguay) quand leur sœur Diane, qui vit avec sa fille (Mégane Proulx), commence à sombrer dans la paranoïa après avoir perdu un être cher dans un accident.

C’est un peu comme si la maison qu’habite la famille depuis près de 200 ans était habitée par les esprits de ceux qui y ont vécu. La situation devient sérieuse au point que même leur mère (Micheline Lanctôt), avec qui les relations sont tendues, rapplique de Floride pour rejoindre ses filles. Une séquence avec la grand-mère (Béatrice Picard) vient compléter le tableau de cette sororité.

Même si la révélation de ce qui se passe en réalité se laisse deviner assez facilement, il reste que Frontières, qui emprunte la forme d’un thriller nourri d’anecdotes véridiques survenues dans la famille du cinéaste, se distingue grâce à cette façon d’explorer la notion de territoire sous toutes ses formes, physique et mentale. Marqué par une performance remarquable de Pascale Bussières, qui tient ici l’un de ses plus beaux rôles, Frontières ajoute une belle pierre à l’œuvre singulière que Guy Édoin est en train de construire.

Frontières

Drame

Frontières

Guy Édoin

Avec Pascale Bussières, Christine Beaulieu, Micheline Lanctôt

1 h 34
En salle

7,5/10