Adaptée du livre éponyme et mise en scène par Catherine De Léan, la pièce créée au Quat’Sous fait entendre quatre des nombreux témoignages recueillis par l’écrivaine nobélisée et journaliste littéraire Svetlana Alexievitch. Il s’agit de la première mise en scène de Catherine De Léan.

La comédienne a été attirée par la vérité de ces témoignages de gens ordinaires, recueillis dans leur cuisine, car ils semblent abolir les frontières entre les faits et la fiction. « Plus j’écoute ces récits, plus je me dis qu’il n’y a pas d’autre Histoire que celle-là. Ce que les gens vivent, c’est tout de ce qui existe. L’autre Histoire, celle avec une grande hache, c’est un récit inventé, une fiction », a-t-elle écrit à propos de l’œuvre rédigée par Alexievitch.

Le texte est le point fort de cette production qui expose clairement une chose : la chute de l’URSS, puis la dissolution du Parti communisme après la perestroïka et son flirt avec le capitalisme, représente plus que le démantèlement d’un régime politique. La fin du rêve soviétique, c’est la fin d’un idéal, celui de l’homme bon au cœur d’un paradis terrestre. « Dans les écoles soviétiques, on nous enseignait que l’homme est foncièrement bon. Qu’il est magnifique ! Aujourd’hui encore, ma mère croit que ce sont des circonstances horribles qui nous rendent horribles. Mais que l’homme est bon. Or, ce n’est pas vrai ! Toute sa vie, l’homme est ballotté entre le bien et le mal. La hache du maître attend son heure… », dit justement l’un des protagonistes.

PHOTO FRÉDÉRIQUE MÉNARD-AUBIN, FOURNIE PAR LE QUAT’SOUS

Vitali Makarov dans La fin de l’homme rouge

Cachez ces acteurs…

Regroupée en quatre monologues prononcés l’un après l’autre par chacun des quatre interprètes, la production de La fin de l’homme rouge nous a laissé sur notre faim. Elle souffre de choix de mise en scène douteux. Et d’une direction d’acteurs inégale.

PHOTO FRÉDÉRIQUE MÉNARD-AUBIN, FOURNIE PAR LE QUAT’SOUS

Micha Raouentfeld rend le dernier monologue.

Pourquoi isoler les interprètes dans un espace scénique restreint, puis les abandonner sur scène après leur partition ? (Dominique Quesnel, qui ouvre le bal, reste couchée au milieu du décor durant les trois quarts de la représentation…) Pourquoi les faire jouer assis, de dos, dans la pénombre, cachés derrière des échafaudages ou des écrans ? Pourquoi le recours au micro qui filtre la vérité du témoignage, comme le fait Vitali Makarov pour dire des mots si puissants et percutants ?

Il y a une mode au théâtre depuis quelque temps. Celle de cacher les acteurs ! On les fait jouer dans le noir, dans les recoins d’un plateau ou carrément de dos au public. Or, on va au théâtre pour voir des acteurs, sentir leur proximité, leur souffle, leur charisme. Heureusement, c’est ce qui arrive à… la fin de La fin de l’homme rouge, lorsque la forte présence de Micha Raouentfeld se fait sentir dans la salle. L’interprète prononce le dernier monologue en regardant enfin le public… Mais c’est trop peu, trop tard.

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La fin de l’homme rouge

La fin de l’homme rouge

Avec Laurence Dauphinais, Vitali Makarov, Dominique Quesnel et Micha Raouentfeld,

Au Quat’Sous, Jusqu’au 23 mars

6/10