C’est peut-être le froid et le verglas qui nous assaillent en ce mois de janvier, mais entre les murs du Théâtre Denise-Pelletier, le printemps déploie férocement ses bourgeons. Et le public – adolescent et adulte – ne peut qu’en être ravi.

Le dramaturge David Paquet, qui s’est librement inspiré d’une œuvre allemande du XIXsiècle, raconte avec brio la découverte de la sexualité de cinq adolescents liés par une amitié qu’ils croient – à tort – à toute épreuve. Moritz, Melchior, Martha, Otto et Wendla tentent de naviguer entre les pulsions nouvelles qui les assaillent, leur désir de liberté et les diktats d’une société étouffante par ses trop nombreux tabous.

Des hauts et des bas

Avec un humour des plus vifs, Paquet dépeint les hauts et les bas de cette période bouillonnante de l’existence. Dans ce quintette plein de sève, chacun et chacune avance à son rythme. L’une voudrait faire partager à la planète entière la puissance de l’orgasme vécu la veille, l’autre se voit imposer par sa mère une robe anti-viol d’une laideur consommée. Un autre encore se masturbe allègrement devant une photo pour le moins étonnante, tandis qu’une quatrième partage tout sur les réseaux sociaux, sauf ce qui compte vraiment...

Bref, l’amour, le rejet et beaucoup de questionnements vont émailler la vie de ces cinq-là.

À la mise en scène, Olivier Arteau a choisi une approche très ludique, privilégiant un jeu hyper physique, voire acrobatique. Les interprètes sautent à la corde, dévalent la pente abrupte qui occupe le centre de la scène, dansent à l’unisson et poussent même la chanson. Cette approche rafraîchissante (et ô combien rythmée) saura sans conteste captiver l’auditoire adolescent qui fréquente le Théâtre Denise-Pelletier.

PHOTO STÉPHANE BOURGEOIS, FOURNIE PAR LE THÉÂTRE DENISE-PELLETIER

Le metteur en scène Olivier Arteau a choisi une approche très physique pour cette pièce.

Mais le public adulte n’est pas en reste avec ce spectacle minutieusement réglé, où le comique côtoie le tragique dans un équilibre parfaitement maîtrisé. Car si le public rit ici beaucoup, il est constamment rappelé à l’ordre. Vivre sa puberté à l’époque qui est la nôtre n’est pas facile. Au contraire. Et ce texte percutant nous le rappelle avec beaucoup d’acuité.

Jeu d’acteur sans faille

La distribution, composée de plusieurs jeunes visages inconnus du public montréalais, offre une prestation sans faille. C’est notamment le cas de Gabriel Favreau, lumineux dans le rôle de Moritz, le cœur tendre du groupe. Claude Breton-Potvin est aussi très convaincante dans la peau de Melchior, jeune femme à la sexualité bien assumée.

Incarnant les mères (notez le pluriel) des personnages principaux, Marie-Josée Bastien n’est rien de moins qu’explosive.

Certes, ses personnages dessinés à gros traits sont par moments clownesques, mais des rires francs naissent à chaque apparition de l’actrice sur scène. Elle est irrésistible, tout comme Ariel Charest, qui interprète de petits rôles variés avec tout l’humour et le bagout dont elle est capable.

Ce spectacle électrisant au possible a reçu de nombreux prix après une première série de représentations au Trident, à Québec. Ces honneurs sont amplement mérités. Avec sa mise en scène inventive, son texte très punché et ses interprètes d’une solidité qui force l’admiration, L’éveil du printemps a toutes les qualités pour marquer durablement le public adolescent et pour réjouir tous les adultes. Aucun doute : un voyage dans l’est de la ville s’impose...

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L’éveil du printemps

L’éveil du printemps

Texte de David Paquet, mise en scène d’Olivier Arteau, avec notamment Claude Breton-Potvin, Gabriel Favreau, Gabriel Lemire, Carla Mezquita Honhon et Sarah Villeneuve-Desjardins.

Théâtre Denise-Pelletier, Jusqu’au 17 février.

8,5/10