Transmission et identité, vérité et mensonges, le mystère des origines. La pièce Mille pose de grandes questions sur la famille et le legs qu’on veut laisser. En racontant les fruits de son enquête personnelle, Monique Spaziani tente donc de recoller les morceaux égarés de son casse-tête familial. Dans un spectacle à la fois beau, intéressant et… inachevé.

En apprenant sur le tard, de la bouche de sa mère, que son père n’est pas son père biologique, la comédienne a su qu’elle n’était pas d’origine italienne, mais plutôt polonaise. Elle se lance alors à la recherche de l’histoire de son vrai père, mort depuis des années, un homme mystérieux aux multiples identités. Elle ira de surprise en surprise, en faisant notamment la rencontre, en 2018, d’un demi-frère plus jeune, Robert Polka, qui vit à Montréal, dans le quartier NDG, à quelques stations de métro de chez elle !

PHOTO FABRICE GAËTAN, FOURNIE PAR LE QUAT’SOUS

Robert Polka et Monique Spaziani dans Mille

Digne d’un polar

De la fuite du régime nazi en Autriche à une nouvelle vie de bijoutier à Montréal, au sein de la diaspora juive, en passant par la résistance dans le Midi, les révélations sur le paternel sont dignes d’un polar. On ne racontera pas ici tous les éléments de cette histoire véridique, puisque leur découverte forme l’un des plaisirs de ce spectacle de 80 minutes.

Sur scène, la comédienne est entourée de sa propre fille (Philomène Bilodeau), de son demi-frère et d’un trio d’interprètes de musique klezmer (d’origine juive d’Europe centrale). La mise en scène est à la fois simple et inventive, avec des projections de photos, de documents et des extraits de fausses archives sonores (vu qu’elle ne l’a jamais connu), réalisées avec la voix de Denis Bernard et reproduisant le « spectre » du père de Spaziani. De son père adoptif Spaziani et de son « héritage italien », il ne sera en revanche jamais question.

Il faut accepter qu’on ne sache pas tout sur notre passé, conclut l’enquête de Spaziani. Et, surtout, qu’on ne peut jamais comprendre tout le sens de notre histoire, de notre rapport au monde. D’où l’importance de se créer une part de fiction dans le récit de sa vie, d’essayer de le rendre ouvert aux multiples interprétations. En un mot : universel.

Hélas, la production ne parvient pas à nous émouvoir à la fin de ce spectacle doux et réconfortant. Chaleureux, sans plus. Probablement parce que Mille semble justifier sans cesse la raison de faire cette enquête devant nous. Comme si Monique Spaziani doutait de sa démarche… autant que de ses origines.

Mille

Mille

Texte : Olivier Kemeid. Mise en scène : Mani Soleymanlou. Avec Monique Spaziani, Philomène Bilodeau, Robert Polka, etc. Une création du Théâtre de Quat’Sous, d’Orange Noyée et de Trois Tristes Tigres.

Au Quat’Sous, Jusqu’au 25 mars

6,5/10

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