Les raisons du cœur ont toujours trouvé un chemin dans l’œuvre de Stéphanie Filion si l’on pense au recueil coécrit avec Valérie Forgues, Jeanne Forever (2018), et à Nous les vivants (2015), tous publiés au Lézard amoureux.

Sa poésie narrative raconte ici l’histoire de Diane Hébert, première Québécoise à recevoir une double transplantation cœur-poumons en 1985 après la découverte d’une embolie pulmonaire possiblement fatale.

La poète entremêle à ce récit des éléments de sa propre existence et de ses souvenirs marqués par l’anxiété dans un style qui n’est pas sans lien avec le recueil de Mathieu Simoneau, qui vient aussi d’être publié.

« j’aurais aimé être une fougère / un nuage un galet lavé par le fleuve / il est épuisant le travail / d’avoir un cœur qui bat »

Dans ce cardiogramme de deux vies où l’une admire le courage de l’autre puisque ce serait plus facile que « de plonger dans ce qui [la] hante », la poète se glisse imperceptiblement dans la peau de Diane Hébert. Ainsi, le « tu » et le « je » deviennent indissociables, formant un « nous » jamais nommé, mais loquace.

Le recueil retrace tout le parcours de la greffée, avec les forces et les faiblesses de celle-ci. C’est l’histoire du Québec des années 1980 qui danse sur Like a Virgin, mange du poulet cacciatore et espère avec Diane Hébert…

Stéphanie Filion, qui « laisse entrer le monde » dans son « cœur à nu », donne l’impression d’avoir trouvé en celle morte à 51 ans en 2008 une sœur et probablement plus. Diane Hébert, qui aura encouragé l’idée du don d’organes, portait le même prénom que la mère de la poète.

Cœur mémoire

Cœur mémoire

Le lézard amoureux

124 pages

7,5/10