Cette série similiscandaleuse réunit Lily-Rose Depp (fille de Vanessa Paradis et de Johnny Depp), le chanteur The Weeknd, la vedette pop Troye Sivan, le gars rigolo de Schitt’s Creek (Dan Levy) et le vétéran Hank Azaria, quand même. Cette série porno sulfureuse porte la signature vidéoclip hyper léchée du réalisateur Sam Levinson, qui a manufacturé Euphoria pour la même chaîne HBO, une émission peuplée d’ados drogués, délurés et emboucanés.

Cette série tape-à-l’œil, aux effluves de controverse no 5, arbore aussi le prestigieux sceau du Festival de Cannes, où elle a été projetée en primeur mondiale à la fin du mois de mai.

Bref, avec autant d’ingrédients étincelants encapsulés en cinq épisodes d’une heure, on présume que The Idol se hissera au top du top du petit écran, non ? Vraiment pas. Il s’agit du plus gros flop télé de l’année, de la pire série en ondes actuellement et de la plus grosse déception de la saison.

C’est mauvais rare. Mais pas mauvais bon ou mauvais drôle à la Marseille ou Anatomy of a Scandal sur Netflix. Juste raté et gênant.

Le premier épisode de The Idol, relayé dimanche à 21 h par Crave et Super Écran, a été « trop cringe », comme le dirait une célibataire aux portes fermées de L’île de l’amour.

Dans presque toutes les scènes, on sent que le réalisateur se gâte en filmant, pour son plaisir pervers, l’actrice principale Lily-Rose Depp (qui est formidable, il faut le souligner) en tenue sexy et dans des positions affriolantes. Du sous-50 Shades of Grey, ce qui n’est pas peu dire, mélangé avec une touche d’Entourage, un soupçon de Dracula et l’aura maniaque de Moïse Thériault.

Une scène à mi-parcours de la première heure atteint le summum du ridicule quand la chanteuse pop Jocelyn (Lily-Rose Depp), héritière de Britney Spears et de Miley Cyrus, se masturbe tout en s’autoétranglant. C’est amené de façon tellement gratuite, sans aucun contexte, du genre, on va tellement vous choquer !, que l’on décroche complètement.

The Idol traite pourtant d’un sujet chaud, soit l’exploitation des jeunes femmes par le milieu du divertissement. Britney, Whitney Houston ou Pamela Anderson, la machine hollywoodienne aspire, broie et recrache des stars féminines depuis des décennies. Il y a assez de matière brute pour construire une minisérie percutante et intelligente à propos de la glorification rapide et de la disposition brutale des vedettes.

PHOTO LOIC VENANCE, AGENCE FRANCE-PRESSE

Lily-Rose Depp

Malheureusement, The Idol n’y arrive pas. La série manque de profondeur et de substance. C’est beau, mais vide. C’est du gaspillage d’argent et de talent.

En fait, on ne croit pas du tout à l’attraction fulgurante entre les deux personnages principaux, soit la magnifique Jocelyn et l’ennuyant gérant de boîte de nuit, aussi gourou d’une secte (ce n’est pas une blague), Tedros (Abel Tesfaye, alias The Weeknd).

Ça n’aide pas non plus que a) Abel Tesfaye s’avère un piètre comédien, il a le charisme d’une planche à repasser, et que b) son personnage de Tedros arbore une queue de rat de cheveux tressés, comme à la belle époque de René Angélil.

Il faut maintenant savoir que The Idol débute avec le retour dans la sphère publique de Jocelyn, qui a perdu sa mère il y a un an et qui a souffert d’une dépression majeure. En secret, Jocelyn tourne le clip d’une nouvelle chanson quand une bombe sale explose sur les réseaux sociaux. Un ancien amant a publié sur Reddit une photo intime de Jocelyn, qui fixe la caméra le visage recouvert de sperme.

L’équipe de gérance entre en « gestion de crise », alors qu’une journaliste du magazine Vanity Fair débarque pour interviewer Jocelyn à propos de sa réapparition dans le showbiz.

Humiliation sexuelle, pornodivulgation, maladie mentale, contrôle de l’image sur les réseaux sociaux, solitude au sommet, toutes les portes s’ouvrent devant The Idol pour écrire une fable fascinante sur la cruauté de l’industrie musicale.

Mais non. Jocelyn se sauve dans un bar, où elle croise Tedros et sa queue de rat, nous y revoilà. Rapidement, une relation malsaine se noue entre les deux. Tedros initie Jocelyn à du sadomasochisme léger en prétextant que ça l’aidera à mieux chanter. Bon truc, bro. Il tente aussi de sortir Jocelyn de sa pop bonbon formatée, un angle plus intéressant que ses propos ésotériques.

Plus cette série lustrée et dispendieuse progresse, moins Jocelyn, qui fume comme une cheminée, porte de vêtements. Il n’y a pas de deuxième degré ou de subtilité ici. The Idol raconte l’emprise d’un homme sur une femme à la manière d’un thriller érotique cheapo des années 1990.

Je pensais que la séquence du glaçon que Tedros passe sur la petite culotte de Jocelyn allait être la plus cliché du lot. Non, non. Attendez. Tedros se sert ensuite de la robe rouge de Jocelyn pour l’étouffer, oui, oui. Alors que Jocelyn peine à respirer, Tedros la libère – quel héros ! – en perçant le vêtement avec son couteau de poche. « Maintenant, tu peux chanter », lui susurre-t-il. Au secours.

The Idol est l’équivalent d’un piège à clics. Dès que l’on appuie sur play, on regrette immédiatement cette racoleuse idole instantanée.