Dimanche soir, les réseaux sociaux ont brûlé encore plus fort que les torches flambantes des six membres de Tiyaga au dernier conseil de tribu de Survivor Québec.

Mais qu’a donc fait le grand Pierre-Alexandre, de la tribu Kalooban, pour mériter une expulsion immédiate du jeu, qui n’a pas été justifiée ni expliquée clairement en ondes ? Les spéculations les plus folles ont inondé Twitter, Facebook et Reddit, comme un campement de fortune arrosé par les pluies diluviennes des Philippines.

La chaîne Noovo a interrompu l’aventure de Pierre-Alexandre, 43 ans, après avoir été informée que « celui-ci avait enfreint le code de vie qui établit les règles et les valeurs auxquelles doivent s’astreindre tous les joueurs ». Selon Noovo, les participants ont été informés de la transgression de leur camarade et ont accepté de poursuivre la compétition sans lui.

Le problème, c’est la façon sèche et laconique dont cette éviction (très peu commune, il faut le dire) a été communiquée aux fans qui suivent la téléréalité depuis un mois. Avant l’épreuve d’immunité du basketball sous-marin dimanche, Patrice Bélanger a indiqué aux joueurs que « P-A a enfreint une règle du code de vie, nous l’avons retiré du jeu ». C’est tout, on ferme les livres. L’animateur n’a rien dévoilé d’autre et l’épisode n’a montré aucune discussion entre les six membres de Kalooban, qui ont assurément encaissé tout un choc.

La production a fait comme si ce départ était banal et anodin et l’a vite, vite balayé sous le tapis tressé de feuilles de palmier.

Pourtant, cette situation est loin d’être anodine. En 44 saisons de Survivor aux États-Unis, un seul candidat, Dan Spilo, a été tassé de cette manière militaire en raison de comportements inappropriés envers une joueuse et une productrice.

Ces incidents ont été diffusés en décembre 2019 sur le réseau CBS et le concurrent fautif avait été averti plusieurs fois avant de passer à la guillotine. Le cas de Pierre-Alexandre Guillot, éducateur en garderie de Drummondville, ne se comparerait pas à celui de Dan Spilo. Les gestes qui lui sont reprochés se sont déroulés pendant le tournage ce printemps, me dit-on. Quoi exactement ? Difficile de l’affirmer avec certitude.

Chose certaine, Pierre-Alexandre Guillot n’a pas volé une barre tendre dans le sac d’un technicien de Survivor, on s’entend. Ce qu’il a fait est grave et justifie, semble-t-il, l’imposition d’une omertà à tous les membres de l’équipe de Survivor Québec.

PHOTO TIRÉE DE LA PAGE FACEBOOK DE L’ÉMISSION

Personne n’a voulu commenter l’exclusion de Pierre-Alexandre.

L’exclusion de Pierre-Alexandre a déclenché une (autre) crise interne chez Productions J et Bell Média, propriétaire de Noovo, qui se sortent à peine de la débâcle de l’intimidation à Occupation double : Martinique.

Ni la patronne Julie Snyder, ni le réalisateur Guillaume St-Arnaud, ni la productrice au contenu Valérie Dalpé n’ont d’ailleurs voulu répondre à des questions à propos de la disparition mystérieuse de Pierre-Alexandre. Ils invoquent tous une entente de confidentialité qui les exposerait à des poursuites s’ils la violaient.

Réglons ce dossier immédiatement : Pierre-Alexandre Guillot, dont la présence a été réduite dans les épisodes de Survivor, ne possède aucun antécédent judiciaire et il travaille toujours dans le même CPE de Drummondville, me confirme la directrice générale de l’établissement.

En s’emmurant dans le « pas de commentaire », la production de Survivor Québec espère étouffer le scandale, mais provoque le contraire. Ce silence – révélateur sur la gravité du problème – laisse courir un paquet de rumeurs pas très jolies sur l’évincé.

Car le fameux code de vie de Survivor qui a été outrepassé ratisse large. Il comprend des règles anodines sur le vol d’objets appartenant aux collègues, le respect de l’environnement, l’interdiction de chasser dans la jungle, la consultation d’un psy, tout comme des clauses contraignantes qui empêchent les candidats de fraterniser avec les techniciens ou d’adopter des comportements déplacés.

Si Pierre-Alexandre a triché, dites-le. Si Pierre-Alexandre a dépassé certaines limites, dites-le aussi. Me semble que c’est la base que d’être transparent dans ce type d’évènement délicat.

Le détenteur du format de Survivor, le groupe Banijay, protège jalousement cette marque de télé, ce qui explique l’absence d’informations officielles qui fuitent. Il y a de gros enjeux de réputation à gérer, ainsi que beaucoup d’argent sur la table. Et deux téléréalités phares qui traversent deux zones de turbulences successives, ça ne paraît pas bien du tout.

C’est dommage, car cette première saison de Survivor, qui n’a rien à envier aux éditions internationales, a débouché sur des revirements captivants. La reconfiguration récente des tribus avantageait nettement Tiyaga, mais Kalooban, la sous-estimée, a ressuscité comme un feu de plage oublié pendant la nuit.

J’ai bien aimé l’audace de Marika, qui a tenté de briser le boys club chez Tiyaga, avant d’être trahie par la ratoureuse Karine. Le dernier conseil de tribu, où Sango a jeté Martine sous les roues de l’autobus, a été un moment fort également. Dimanche, les tribus fusionneront et la stratégie deviendra individuelle.

Maintenant, qui osera s’attaquer à la domination des frères cosmiques, Jean Junior dit JJ et Christophe, dont l’influence devient de plus en plus lourde ? Il est temps de briser ce duo et de casser la maudite épée de bois de JJ qui, on l’espère, se transformera en épée de Damoclès pour lui.