Les quinquagénaires ont traversé une ronde ardue à La Voix dimanche soir. Un seul candidat « plus âgé » a été repêché – à la dernière seconde et quasiment par pitié – par Marjo, une des trois recrues chez les coachs du télé-crochet de TVA.

Ce rescapé de la ride s’appelle Dominique Godin, il a 50 ans, et il travaille comme camionneur à Saint-Jean-sur-Richelieu. Marjo a enfoncé son bouton rouge alors que les dernières notes de La chanson du camionneur de Fred Pellerin résonnaient sur le magnifique plateau de l’émission, au look moderne, chic et épuré.

PHOTO BERTRAND EXERTIER, TIRÉE DE LA PAGE FACEBOOK DE L’ÉMISSION

Dominique Godin

Avant Dominique Godin, deux autres « aînés » avaient mordu la poussière, soit France Lacombe, 58 ans, de Roxton Falls, qui a repris Quand on se donne de Ginette Reno, de même que Rémy Langlois, 50 ans, de Drummondville, qui a refait Que je t’aime de Johnny Hallyday.

L’industrie de la musique pop carbure à la jeunesse, ce n’est pas un reproche, c’est un constat. Des preuves ? À l’exception de Geneviève Jodoin, qui a remporté La Voix à 41 ans, les sept autres gagnants du concours de TVA avaient tous moins de 27 ans. Et ça, les coachs le savent et ils hésitent à se retourner quand ils entendent une tessiture plus mature, disons.

Après avoir cédé sa case horaire du dimanche soir à Star Académie pendant deux ans, la neuvième édition de La Voix a repris les ondes avec un joli look rafraîchi et trois nouveaux coachs pour accompagner le vétéran Marc Dupré.

Corneille a de la classe, toi-même tu sais qui c’est, mais surtout, de la verve et de la combativité. Il a été excellent et il a rapidement compris la mécanique de l’émission.

Au milieu, Mario Pelchat (et son t-shirt rose Comme des Garçons) se démarque par son éloquence, sa sincérité et sa simplicité. Il n’a pas besoin de faire des simagrées ou des steppettes pour attirer des artistes dans son équipe.

Marc Dupré demeure le plus agile, alliant le gag punché à la vulnérabilité bien dosée. Ce fut plus difficile pour la grande Marjo, qui a paru déstabilisée par les opérations de séduction qu’elle devait livrer après chacune des prestations. Agitée et exaltée, on sentait la rockeuse moins investie et plus détachée que ses collègues.

PHOTO BERTRAND EXERTIER, FOURNIE PAR LA PRODUCTION

Les juges Corneille, Marjo, Mario Pelchat et Marc Dupré

Cela dit, les quatre coachs ont évité le piège de l’hyperbole et du beurrage trop épais, qui devenaient ridicules dans les saisons précédentes. Bien non, toutes les voix ne descendent pas du saint ciel et ne vibrent pas comme une pulsation de lumière qui traverse un diamant brut, franchement.

Le meilleur numéro de la soirée a été gardé pour la fin. La Montréalaise Steffy Beyong, 23 ans, a ébloui la foule sur You Say de la chanteuse américaine Lauren Daigle. La jeune femme tremblait comme une feuille après ses deux minutes sur scène, tandis que Mario Pelchat, qui supervisera son parcours dans les prochaines semaines, essuyait des larmes.

Évidemment, La Voix ne serait pas La Voix sans les drames de ses participants. Tumeur au cerveau, tentative de suicide, mort d’un père, cancer du sein de la mère et violence conjugale, cette succession d’évènements douloureux finit par nous rendre insensibles et détachés, ce qui n’est sans doute pas le but initial de la manœuvre.

Sur les 11 numéros complets qui ont été présentés dimanche, cinq interprètes ont opté pour l’anglais, contre six ayant préféré le français. C’est un pas dans la bonne direction, vraiment. Nous avons notamment eu droit à du Lisa LeBlanc (Câlisse-moi là) ainsi qu’à de l’Yseult (Corps) et du Patricia Kaas (Mademoiselle chante le blues).

Bien aimé également l’effet sonore et visuel à la Révolution qui se déclenche au début de chacune des auditions. Ça donne du pep aux épisodes.

Le grand petit Jérémy

Intense, agressif et trop motivé, Jérémy Demay est devenu le Geneviève Borne de 2023 en quittant le premier Big Brother Célébrités, à la suite d’un vote peu serré.

Seuls Benoît Gagnon, Alexandre Despatie et Martin Larocque ont voulu sauver l’humoriste et auteur de livres de psychopop. Les dix autres ont souhaité l’évincer. L’alliance de « l’after party » a ainsi éteint l’alliance de braise et exposé le double jeu de l’humoriste Coco Belliveau, qui voguait, incognito, d’un groupe à l’autre.

Avant de claquer la porte de la maison-studio, Jérémy Demay a admis ses torts. Il a hélas ! porté le masque du gars confiant, sûr de lui et rapide, alors qu’il aurait dû montrer son visage nu, sans artifice, celui du vrai Jérémy gentil. Trop peu, trop tard. La téléréalité de Noovo a perdu son vilain de service et, comme le chanterait Marie-Mai, qui prendra sa place en suivant ses pas ?

Il faut le dire : la comédienne Jemmy Echaquan Dubé a été une piètre patronne. Ce fut pénible de la voir tergiverser, se renfermer et être incapable de voir un ou deux coups à l’avance, ce qui constitue la base de ce jeu de stratégie.

Le challenge du patron de dimanche soir, un quiz sur les habitudes des concurrents, n’a pas été le plus excitant non plus. La soprano Natalie Choquette l’a remporté et, bien honnêtement, la diva n’entre pas non plus dans la catégorie des joueuses flamboyantes, redoutables et rusées.

Heureusement qu’il y a les sourcils de prisonnier – et les cils décollés – de Mona de Grenoble pour nous amuser.