Pour moi, c’est clair. Mon choix est fait. On compile nos notes ?

Alors, partez la musique de Jurassic Park ici : le cuistot qui se dirige – en courant ! – vers la première marche du podium est Amine, 29 ans, sous-chef du café Gentile, à Westmount. Lundi soir, l’hyperactif et talentueux Amine a accroché une quatrième victoire consécutive à son éclatant palmarès culinaire. Sur papier, le Lavallois d’origine marocaine écrase, telle une purée d’aubergine bien lisse, tous ses collègues.

Et à l’écran, Amine est le plus attachant, le plus sympathique et le plus expressif de la brigade 2022, que dirige avec humour et fermeté Colombe St-Pierre, la révélation de cette 11e saison. Comme on écrirait sur Twitter : #TeamAmine.

Derrière Amine, c’est le rouquin Anthony, 25 ans, qui lui souffle dans le cou. Jamais envoyé au duel, Anthony, sous-chef à La Tanière, à Québec, a remporté les grands honneurs deux fois. Son parcours contient toutefois quelques grumeaux, qui passeront mal au tamis du stress extrême. Anecdote croustillante : Anthony a déjà bourdonné dans les cuisines du Saint-Amour, le resto de Jean-Luc Boulay, dans le Vieux-Québec.

Photo Marc-André Lapierre, fournie par Radio-Canada

Anthony, 25 ans, sous-chef à La Tanière

Dans cette quête de la toque d’or, ne sous-estimons pas le Beauceron Elliot, 27 ans, chef du restaurant Légende, à Québec. Elliot a participé à la deuxième saison de Chefs de bois de la plateforme Vrai de Vidéotron, une compétition de bouffe jugée par Martin Picard, du Pied de cochon. Après un début étincelant, Elliot a connu un passage à (et sous) vide. S’en sortira-t-il à temps, comme un œuf 64 plongé dans le thermocirculateur ?

Adrian, 30 ans, a soufflé le chaud et le froid ce printemps, capable de finir premier ou dernier le temps de dire « chef, oui, chef, let’s gooo » ! Potin savoureux : Adrian, maintenant sous-chef à l’Arlequin, à Rimouski, a déjà œuvré derrière les fourneaux de Chez St-Pierre, le réputé établissement de Colombe St-Pierre, au Bic.

Puis, il y a Jean-Christophe, 30 ans, le plus réservé de la bande. Sous-chef au Foxy, à Montréal, il s’est faufilé discrètement dans le peloton de tête grâce à son calme aiguisé et à ses techniques perfectionnées au Mousso et à la Maison Boulud. Ses chances de triompher demeurent cependant minces comme une tuile de parmesan.

Peu importe qui perd, qui gagne, la solidarité qui enveloppe la cuisine studio des Chefs ! est belle à voir. Ça paraît que les candidats ont fraternisé – en Zoom – pendant la quarantaine qui a précédé les tournages.

Tout en se battant pour devenir le cordon bleu ultime, ils se partagent des ingrédients, s’offrent leur aide s’ils ont terminé leur plat et s’épaulent même pendant les duels. Du jamais-vu. Et cette camaraderie n’altère aucunement le goût piquant du concours.

À la table des juges, Jean-Luc Boulay demeure mon favori, suivi de Pasquale Vari et d’Isabelle Deschamps Plante, à égalité. Normand Laprise me semble plus effacé qu’à l’habitude. Lui reste-t-il du gaz dans la bonbonne ?

Conversations ou mimes ?

Cette télésérie d’Amazon Prime Video s’appelle faussement Conversations with Friends. Premièrement, les 12 épisodes de 30 minutes ne renferment pratiquement pas de conversations, mais beaucoup de silences malaisants. Deuxièmement, les amis en question se connaissent depuis deux secondes et n’ont rien de super palpitant à se raconter.

Bref, j’ai été très déçu de Conversations with Friends, qui dérive du premier roman de l’écrivaine irlandaise Sally Rooney, qui nous avait pourtant offert la magnifique série Normal People à l’été 2020.

Conversations with Friends met en vedette deux jeunes femmes de 21 ans, Frances (Alison Oliver) et Bobbi (Sasha Lane), qui fréquentent la même université à Dublin et qui donnent des spectacles de poésie parlée dans des cafés.

Par un hasard difficile à avaler, une écrivaine très connue, la blonde Melissa (Jemima Kirke, alias Jessa dans Girls), assiste à l’une des performances de Frances et de Bobbi et décide de devenir leur meilleure amie. Facile de même.

Photo tirée d’IMDB

Joe Alwyn et Alison Oliver dans Conversations with Friends

Mais, attention. Melissa a épousé un acteur ténébreux, le grand Nick (Joe Alwyn, le copain de Taylor Swift), probablement le comédien le plus monosyllabique de l’histoire du théâtre moderne. Nick noue une relation extraconjugale avec la timide Frances, tout aussi neurasthénique et taciturne que lui. Ça va bien.

Il est là, le problème de Conversations with Friends : les protagonistes ont toujours l’air gazés et éteints. Quand ils décident de se parler autrement que par texto, il ne se passe strictement rien. Des « yeah » ou des « right » murmurés entre deux plans où ils fixent le vide, c’est pas génial, mettons. On ne sent pas du tout le courant électrique et la chimie magique qui unissaient Marianne et Connell dans Normal People.

En visionnant les épisodes de Conversations with Friends, on a le goût de sacrer : « Coudonc, crisse, y as-tu quelqu’un qui pourrait les ressusciter ou leur donner un électrochoc, ça presse ! »

Et pourquoi un couple de bobos dans la trentaine s’intéresse-t-il aussi vivement à deux amies et poétesses inconnues ? Ce n’est jamais vraiment expliqué.

Si l’envie irrépressible vous prend de visionner Conversations with Friends, oubliez le projet et allez prendre un verre avec vos vrais amis. La discussion risque d’être pas mal moins froide et détachée. Yeah. Right. Hum-hum. Silence.