Il n’y a pas que les particuliers qui subissent les impacts des récentes hausses des taux d’intérêt, projetant les coûts d’emprunt à des sommets inégalés en plus de 15 ans. C’est un casse-tête pour les entreprises qui ont besoin de financement. Y a-t-il des secteurs où il est toujours intéressant de contracter un prêt actuellement ? Avis d’experts.

Secteurs différents, impacts différents

D’entrée de jeu, Sylvain Corbeil, premier vice-président, services bancaires aux entreprises, pour la Banque Scotia au Québec, confirme que les entreprises qui possèdent beaucoup d’actifs ou qui travaillent dans la vente au détail sont touchées plus directement en ce moment. « Les secteurs qui nécessitent beaucoup de financement vont être plus touchés, comme le secteur immobilier, par exemple, dans lequel il y a une grande quantité d’actifs à financer. Les taux d’intérêt élevés vont aussi affecter les consommateurs plus endettés qui vont par conséquent réduire leur consommation de certains biens et services. Les entreprises du commerce de détail en subiront alors les conséquences. »

Même son de cloche du côté de la TD. Déborah Cherenfant, directrice régionale, femmes en entreprise, Québec, Groupe Banque TD, explique que les entreprises qui ne nécessitent pas d’infrastructures physiques ou qui ont peu d’actifs matériels à acquérir seront avantagées. Elle cite les services-conseils, les arts, les loisirs et la santé. « Ces secteurs misent principalement sur une expertise professionnelle, le démarrage est donc plus facile et les montants d’emprunts sont moins élevés. »

Obtenir le feu vert des prêteurs

Dans le contexte inflationniste actuel, les dépenses réelles des entreprises se retrouvent souvent bien au-dessus des projections. Établir la capacité de remboursement d’un prêt devient donc plus complexe, mais demeure tout de même un facteur central pour les bailleurs de fonds.

Lorsqu’un prêteur regarde un dossier, il se pose deux questions principales. Est-ce que l’emprunteur sera capable de repayer ses dettes ? Si ce n’est pas le cas, quelles sont les garanties offertes ?

Sylvain Corbeil, premier vice-président, services bancaires aux entreprises, pour la Banque Scotia au Québec

« La question sera analysée en fonction d’une multitude de critères, dont la rentabilité de l’entreprise, la stabilité des flux de trésorerie et un bilan financier bien équilibré », résume Sylvain Corbeil.

Déborah Cherenfant ajoute que le fait de lancer une entreprise en équipe est un critère qui est de plus en plus recherché par les prêteurs à l’heure actuelle. « La répartition du risque entre plusieurs emprunteurs permet une plus grande solidité. Il s’agit d’un facteur qui est davantage considéré aujourd’hui. »

Innovateurs recherchés

Au-delà de l’impact direct sur les taux d’intérêt et sur les prix à la consommation, la situation actuelle frappe indirectement plusieurs autres sphères socioéconomiques, provoquant des enjeux de pauvreté, de sécurité publique, de santé mentale et de gestion des ressources. Déborah Cherenfant confie que, dans ce contexte, les banques sont plus enclines à soutenir les entreprises qui proposent des solutions durables en réponse à des besoins sociétaux ou environnementaux.

Les domaines de l’énergie renouvelable, du développement durable et de la santé en sont de bons exemples. « Les entreprises de ces secteurs répondent à un besoin grandissant, elles sont généralement stables et offrent des solutions à des enjeux criants, alors les banques sont prêtes à réfléchir à des solutions pour les aider. »

Des programmes d’aide

Tant à la Scotia qu’à la TD, on indique aux entrepreneurs que certaines mesures existent pour les soutenir dans le contexte actuel. Sylvain Corbeil souligne qu’il peut être avantageux de se prévaloir des programmes en place. « Si elle est admissible, l’entreprise peut se tourner vers des programmes gouvernementaux, entre autres, offerts par Investissement Québec ou encore la Banque de développement du Canada. »

De son côté, Déborah Cherenfant rappelle l’existence du Programme de crédit pour les secteurs très touchés (PCSTT), un soutien lancé par le gouvernement canadien durant la pandémie pour offrir à certaines entreprises des taux avantageux et des conditions d’emprunt plus souples.