Chaque lundi, nous vous présentons une entreprise qui innove.

Quoi ?

Dans un Québec où les distilleries souffrent grandement de la compétition – il y a trop de distillateurs, de l’avis même de cette jeune industrie –, les entreprises qui veulent survivre doivent se démarquer.

La distillerie Comont, de Bedford, vient de lancer une vodka « carboneutre » qui est élaborée à partir d’ingrédients étonnants : des légumes déclassés Artcic Gardens, des retailles de pâte à tarte de St-Hubert et des résidus de biscuits ou muffins de Nutrifrance, qui fabrique des produits de boulangerie à Saint-Jean-sur-Richelieu.

L’innovation

On peut se demander comment une pâte à tarte peut devenir vodka. La question est légitime...

Tout cela a commencé alors que le couple fondateur de Comont, Vanessa Cliche et Samuel Gaudette, faisait ses courses, à l’épicerie.

« On regardait les gâteaux de Spider-Man et Barbie, raconte Samuel Gaudette. Je me suis dit que c’était impossible que tout ça soit vendu. Je me suis dit aussi qu’il y avait beaucoup de sucre là-dedans et de l’amidon. Ça a commencé de cette façon... »

Était née cette idée de travailler avec des restants de gâteaux qui auraient probablement fini à la poubelle autrement.

Avec St-Hubert, « ç’a été un coup de foudre immédiat », confie Samuel Gaudette. « Ils nous envoient des conteneurs de pâte à tarte, du tapioca, des tartes au sucre... On prend tout ce qui est pour la vente en grande surface, ça n’est pas des résidus de restaurants. Ça vient du centre de transformation. »

À peu près au même moment, le transformateur derrière Artic Garden qui se trouve dans la même région, les contacte pour leur proposer de travailler avec des légumes en surplus.

Le processus

La distillerie a obtenu une certification après avoir évalué son processus de fabrication avec le Centre de développement bioagroalimentaire du Québec.

Les émissions de gaz à effet de serre (GES) ont été calculées pour ce produit, du début à la fin de sa fabrication. Ensuite, la distillerie a fait des choix pour travailler avec les matériaux et matières premières les plus écologiques.

Pour la fabrication de cette boisson, quatre tonnes de matières premières ont été récupérées pour faire 1000 bouteilles de vodka.

Il reste qu’il y a quelques défis techniques en cours de transformation, dont la conservation de ces matières premières inhabituelles à qui on donne une deuxième vie.

« Il fallait aussi trouver un mélange pour que la fermentation ait du sens, précise Samuel Gaudette. Il y a là tout un défi technique. »

Dernière chose – et non la moindre : le goût devait être constant et neutre, bien que la distillerie travaille avec des produits très diversifiés.

Il faut balancer les biscuits double chocolat avec les patates. Une vodka, par définition, n’a pas de goût, pas d’odeur, pas de couleur. Il ne faut pas qu’un lot goûte la canneberge et le chocolat et l’autre la tarte au sucre de St-Hubert.

Samuel Gaudette, copropriétaire de Comont

Qui ?

Comont est une jeune entreprise, fondée en 2020 et installée dans un bel édifice industriel de briques rouges au cœur de Bedford – on y faisait jadis des aiguilles. Déjà au tout début, le couple derrière la distillerie avait le désir de produire des alcools d’une manière responsable.

« On s’entend qu’aujourd’hui, tout le monde parle d’économie circulaire, dit Samuel Gaudette. On s’est demandé comment on pouvait amener ça à un autre niveau. Comment aller plus loin que de simplement prendre les déchets du voisin. Alors on s’est dit qu’on allait faire un produit zéro carbone. »

Qu’est-ce que ce produit, au juste ?

La V. Zéro est maintenant en vente à la SAQ – mais ne porte pas le nom vodka, car elle n’est pas faite à partir de pommes de terre.

« C’est un peu plate », se désole Samuel Gaudette, qui craint que cela crée de la confusion autant pour les consommateurs que pour les employés de la SAQ.

« Est-ce que ça va être placé avec les vodkas ou les spiritueux, de façon aléatoire ? demande-t-il. Ça va nous donner un gros défi de commercialisation... »

Selon lui, la réglementation devrait être ajustée aux nouveaux processus, particulièrement lorsque ceux-ci favorisent l’économie circulaire. Comme cette boisson qu’on ne peut désigner officiellement comme de la vodka à la SAQ !

Comont offre aussi des gins, une liqueur de griotte et s’est lancé dans le prêt-à-boire.