Nouveau phénomène de société ou simple dynamique de marché passagère ? Les volumes de vente d’alcools – vins et spiritueux confondus – ont été en baisse l’an dernier dans les succursales de la SAQ. Un phénomène qui a été aussi observé partout ailleurs dans le monde et qui a forcé la société d’État à resserrer ses façons de faire pour se dégager un peu de marge de manœuvre.

Les derniers résultats financiers de la Société des alcools du Québec (SAQ) ont été déposés jeudi à l’Assemblée nationale et malgré une baisse de 3,3 % du volume de vente des vins et une baisse de 1,3 % du volume de vente des spiritueux, la SAQ a été en mesure de livrer un dividende à son actionnaire, le gouvernement du Québec, de 1,43 milliard, en très légère hausse de 0,1 % par rapport à l’an dernier.

Pour arriver à produire un tel résultat net, la SAQ a dû porter une attention particulière à ses frais et à ses coûts d’investissement, alors que les ventes de vins et de spiritueux aux consommateurs ont été en baisse, tout comme les ventes aux épiceries. Seules les ventes aux titulaires de permis (bars et restaurants) ont enregistré une légère hausse.

« On a enregistré un achalandage plus fort dans nos succursales, mais nos clients ont acheté moins, même s’ils ont payé un prix moyen plus élevé que par le passé », observe Jacques Farcy, PDG de la SAQ, en poste depuis bientôt un an.

Après avoir été vice-président à la commercialisation et aux ventes de la SAQ, Jacques Farcy a fait un stage de deux ans comme PDG de la Société québécoise du cannabis (SQDC) avant d’être nommé PDG de la SAQ en juin 2023.

Grâce à une année financière qui comptait exceptionnellement 53 semaines, la SAQ a donc été en mesure d’afficher des ventes en hausses de 1,3 % alors qu’elles auraient été négatives sans cette semaine supplémentaire.

Cela dit, la SAQ a réussi à réduire ses charges nettes de 10 millions durant l’exercice 2024 grâce notamment à une réduction de ses coûts de transport international qu’elle a âprement renégociés avec ses fournisseurs.

« On a enregistré des hausses des coûts de transport considérables durant la pandémie. Avec le rétablissement de la chaîne d’approvisionnement, on a été en mesure de renégocier ces coûts à la baisse.

« On ne fait pas de profits sur les frais qu’on épargne, on les retourne aux consommateurs. C’est pourquoi on vient d’annoncer que la majoration des prix de 1,7 % qui avait été annoncée en février dernier a été ramenée à 0,7 % la semaine dernière », explique le PDG de la SAQ.

Un nouveau contexte d’affaires

Jacques Farcy a une formule simple pour expliquer le positionnement qu’a dû adopter l’entreprise pour faire face au nouveau contexte de marché : « il faut livrer la valeur attendue », plutôt que d’attendre qu’elle soit livrée…

À cet égard, il compte sur les 7042 employés de la SAQ qui ont, selon lui, à cœur la mission de la société d’État de bien servir le public pour arriver à livrer cette valeur attendue. À cet égard, il faut dire que l’engagement de bien des employés de la SAQ lui permet d’afficher un taux de 93,4 % de clients satisfaits de leur expérience d’achat en succursale.

« On pointe souvent les conditions de travail avantageuses des employés de la SAQ, mais on veut être un employeur de choix et on veut avoir des employés engagés », soumet Jacques Farcy, qui souhaite un dénouement harmonieux des négociations en vue du renouvellement de la convention collective des employés de succursale.

Jacques Farcy est d’avis que les volumes de vente de vins et de spiritueux devraient encore subir un léger déclin durant l’exercice en cours alors que la hausse des coûts et le resserrement des dépenses discrétionnaires des consommateurs vont ralentir les achats.

« On va encore essayer de réduire nos charges. En 2024, on a limité les frais sur vente à 14,7 %, ce qu’on n’avait jamais réussi à faire. Cette année, on prévoit revenir à des charges sur vente de l’ordre de 15,2 % parce qu’il faut investir notamment dans la construction de notre nouveau centre automatisé qui doit débuter ses opérations en 2027 », anticipe le PDG.

Ce nouveau centre automatisé permettra de mieux traiter les commandes à la bouteille qui sont faites par le site web de la SAQ et les titulaires de permis qui veulent acheter des bouteilles à l’unité. Les employés n’auront plus à circuler dans l’entrepôt pour remplir les commandes, c’est la machine qui va aller chercher les bouteilles désirées parmi plus de 20 000 vins et spiritueux différents.

Est-ce que Jacques Farcy vit bien avec la pression d’avoir à diriger une société d’État comme la SAQ qui fait l’objet d’une grosse attention médiatique ?

« Ça ne me gêne pas. Il faut être attentif à ce que nous disent nos clients. C’est à nous de devoir expliquer nos décisions et de pouvoir les modifier au besoin », soumet humblement le PDG.