Le Québec devrait enfin afficher une augmentation des nouvelles mises en chantier en 2024 après avoir aligné 17 mois de baisses quasi ininterrompues entre avril 2022 et novembre 2023. Pour la troisième fois en quatre mois, le nombre de mises en chantier a enregistré une hausse, mais leur nombre reste toutefois à des années-lumière de pouvoir répondre à la demande intérieure.

La crise du logement a été au cœur du dernier budget fédéral. On a multiplié les mesures et les programmes pour stimuler la construction de nouvelles unités d’habitation au pays.

C’est plus de 5 millions de nouveaux logements qu’il faudrait construire pour répondre aux besoins des Canadiens et des nouveaux arrivants d’ici 2030, selon la Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL).

Dans son dernier budget, la ministre Chrystia Freeland a dit espérer que les nouveaux programmes mis en place permettent la construction d’au moins 3,8 millions de nouvelles unités d’habitation d’ici 2030, ce qui nous laisse encore loin du seuil d’abordabilité calculé par la SCHL.

Au Québec, la situation n’est pas plus rose. La SCHL a déjà estimé en 2022 qu’il faudrait tripler le nombre de mises en chantier à 150 000 nouvelles constructions par année pour que le marché québécois de l’habitation redevienne abordable et qu’il retrouve enfin un point d’équilibre.

En mars, le Québec a enregistré 2252 nouvelles mises en chantier, ce qui représente un gain de 25 % par rapport à mars 2023. On a coulé les fondations de 293 maisons individuelles dans les centres urbains du Québec, ce qui représente une hausse de 31 % par rapport à 2023.

« Le marché des maisons individuelles a été encore plus fortement marqué par le contexte des deux dernières années. On vient d’enregistrer trois mois de hausses successives en 2024, alors qu’on avait subi 28 mois de baisses consécutives de septembre 2021 à décembre 2023 », observe Paul Cardinal, directeur du Service économique de l’Association des professionnels de la construction et de l’habitation du Québec (APCHQ).

Sur une base désaisonnalisée et annualisée, le nombre de nouvelles mises en chantier s’est élevé à 35 780 en mars, ce qui nous place encore très loin derrière les 150 000 mises en chantier souhaitées par la SCHL.

M. Cardinal prévoit qu’après avoir subi une baisse de 32 % en 2023, le marché québécois de la construction résidentielle devrait enregistrer une hausse de 13 % à 44 000 nouvelles unités en 2024 et de 14 % en 2025 qui porterait le nombre de nouvelles constructions à 50 000.

On attend et on souhaite évidemment une première baisse des taux d’intérêt pour le début de l’été qui aurait pour effet de stimuler l’appétit des acheteurs potentiels de maisons neuves et de remettre les promoteurs immobiliers au travail.

Un marché qui se cherche

Après l’année record de 2021 au cours de laquelle il s’est construit plus de 67 000 nouveaux logements au Québec, tous les types d’habitations affichent des reculs dans tous les marchés.

Les ventes de condos neufs et de maisons individuelles à Montréal sont en chute libre parce que les prix ont trop augmenté et que la hausse des taux d’intérêt a totalement freiné l’ardeur des ménages à faire l’acquisition de ce type d’habitations.

Beaucoup de promoteurs immobiliers ont décidé de convertir des phases de leur projet de condos en logements locatifs parce qu’ils ne trouvent plus preneur pour des unités trop dispendieuses à acheter.

Les projets de nouveaux logements locatifs sont par ailleurs ralentis par les taux d’intérêt élevés et le capital qui se fait plus rare en raison des prix élevés de construction.

Dans le budget Freeland, on a prévu un montant additionnel de 15 milliards de dollars financé par la SCHL pour permettre aux promoteurs immobiliers qui veulent construire des logements locatifs d’avoir accès à des prêts à faible taux d’intérêt.

On estime que ce programme pourra soutenir la construction de 100 000 logements d’ici 2031, ce qui est un pas dans la bonne direction, mais qui nous laisse encore bien loin des 5 millions de logements additionnels que le Canada doit construire pour répondre minimalement aux besoins de sa population d’ici 2030.

Au Québec, les enjeux sont les mêmes. Il faut considérablement augmenter la cadence des nouveaux projets d’habitation et hausser le rythme de construction des nouvelles unités.

Dans les conditions actuelles du marché de l’emploi et de la pénurie permanente de plusieurs catégories de métiers, il est tout à fait illusoire de penser que l’industrie de la construction résidentielle pourra un jour être en mesure de mettre en chantier plus de 150 000 nouvelles unités d’habitation dans une année au Québec.

L’objectif plus réaliste que pourrait atteindre l’industrie serait d’augmenter de 10 000 unités par année le nombre de nouvelles constructions et d’atteindre dès 2026 les 60 000 mises en chantier. Restons positifs et réalistes.