Les acheteurs de maisons neuves perdent un allié. L’organisme SOS Plan de garantie résidentielle, qui aide les consommateurs à comprendre leurs droits et à les faire valoir, fermera ses portes cette semaine. La Régie du bâtiment du Québec (RBQ) a décidé de mettre un terme à son financement pour des raisons nébuleuses.

On a parfois besoin d’aide pour se défendre. C’était justement la mission de SOS Plan de garantie résidentielle, créé il y a cinq ans.

Sa petite équipe épaule les acheteurs de maisons neuves, de plex et de certains condos qui découvrent des vices de conception et peinent à faire honorer la garantie. Depuis 2015, ces types de propriétés sont couverts par le Plan de garantie de la GCR (Garantie de construction résidentielle), un organisme parapublic qui relève de la RBQ.

Son contre-pouvoir, SOS Plan de garantie, est né – difficilement – quatre ans plus tard. Sa disparition est déjà confirmée. Le financement cessera définitivement le 31 mars.

PHOTO TIRÉE D’UNE CAPTURE D’ÉCRAN

Le site web de SOS Plan de garantie résidentielle annonce et explique la fermeture de l’organisme.

La RBQ lui versait entre 340 000 $ et 410 000 $ par année. À son dernier exercice, la RBQ a déclaré des revenus de 96,9 millions de dollars. C’est donc dire que SOS accaparait 0,37 % de son budget, qui n’est pas serré. L’excédent s’est élevé à 22 millions.

La présidente de SOS, Albanie Morin, s’étonne et se désole de la tournure des évènements. D’abord parce qu’elle a dû talonner la RBQ pendant des mois pour savoir quel était son plan de match. Pouvait-elle demander une prolongation du plan de financement de cinq ans dont la fin était prévue pour mars ? Devait-elle remplir de nouveaux formulaires ?

PHOTO FRANÇOIS ROY, ARCHIVES LA PRESSE

Albanie Morin, présidente de SOS Plan de garantie résidentielle

Ce n’est qu’à la mi-février qu’elle a compris que le sort de SOS était scellé. Le président de la RBQ, Michel Beaudoin, lui a annoncé lors d’une rencontre qu’il était « insatisfait ». De quoi ? « Ça, ce n’est pas vraiment clair. Je vais me permettre de dire que ce n’est pas clair, m’a confié Mme Morin. M. Beaudoin trouve qu’on n’a pas assez d’impact. Quand il va en région, personne ne connaît SOS. C’est sa perception. Et qu’on n’a pas assez de visibilité. »

L’argument de la visibilité est particulier, car il y a des limites à ce que peut faire un OSBL qui doit survivre avec un budget moyen de 360 000 $ par année et payer six ou sept personnes, notamment des avocats. Sa publicité, évidemment, était concentrée sur les réseaux sociaux. Impossible de diffuser des publicités à l’antenne de Radio-Canada en heures de grande écoute.

L’an dernier, SOS a traité 500 dossiers. Ce n’est pas évident de dire si c’est beaucoup ou peu, ni de faire des liens de cause à effet.

Si des milliers de dossiers étaient ouverts chaque année, ce pourrait être la preuve que la GCR n’indemnise pas assez facilement, que le plan de garantie est tarabiscoté ou que les maisons sont très mal construites. Bref, ce ne serait pas nécessairement une bonne nouvelle. Un nombre très réduit d’appels à SOS ne serait pas mieux, puisqu’il pourrait être la conséquence d’un manque de notoriété ou de confiance des acheteurs de maison dans les pouvoirs ou la compétence de l’OSBL.

Pour mettre les choses en perspective, il est important de savoir que la GCR a reçu 1081 demandes de réclamation en 2023 et 1344 l’année précédente.

De son côté, Albanie Morin était « contente » d’avoir aidé 500 nouveaux propriétaires, mais la RBQ a dégonflé son enthousiasme en se disant insatisfaite. « On n’a pas su quels résultats M. Beaudoin voulait avoir comme tel. Il n’a pas dit qu’il en aurait voulu 1000, non. »

PHOTO FOURNIE PAR LA RÉGIE DU BÂTIMENT DU QUÉBEC

Michel Beaudoin, PDG de la Régie du bâtiment du Québec

Autrement dit, les attentes n’ont jamais été claires, mais la conséquence est inévitable.

En gestion, on apprend qu’il est essentiel de définir des objectifs SMART (spécifiques, mesurables, atteignables, réalistes et temporellement définis) si l’on espère des résultats et si l’on veut imposer des sanctions en toute légitimité. D’instinct, les parents comprennent aussi ce principe avec leur marmaille.

Malheureusement, la RBQ ne m’a pas rappelée pour s’expliquer. Dans ses courriels, l’équipe des communications mentionne ceci en guise de justification : le programme d’aide financière destiné à la protection des bénéficiaires du Plan de garantie « permet des ententes d’un maximum de cinq ans ». Est-ce à dire que tous les cinq ans, tout sera toujours à recommencer ? Espérons que non.

Qui sait, peut-être que SOS ne faisait pas très bien son travail. En réalité, seuls ceux qui ont bénéficié de ses services pourraient se prononcer sur la question, mais la RBQ n’a pas évoqué de sondage sur le sujet. Quoi qu’il en soit, les acheteurs de maisons neuves perdent une ressource alors qu’aucune autre ne prend le relais. La RBQ promet que le vide ne sera pas de longue durée, qu’un nouveau « programme » sera annoncé ce printemps. Mais dans combien de temps cette nouvelle bibitte sera-t-elle connue et efficace ?

Dans l’intervalle, il est possible d’appeler gratuitement l’Association des consommateurs pour la qualité dans la construction (ACQC). L’accompagnement juridique est cependant coûteux et exigerait que l’organisme ait de nouvelles sources de revenus. « C’est surtout là-dessus que le consommateur va perdre », juge son président, Marc-André Harnois.

Il est quand même assez ironique que la RBQ, critiquée depuis des années pour son inaction et son laxisme envers les entrepreneurs, notamment par la vérificatrice générale⁠1, soit aujourd’hui si sévère avec un petit organisme de défense des consommateurs.

1. Consultez le texte « Une licence de la RBQ n’est pas gage de qualité » Consultez une chronique présentant SOS Plan de garantie Consultez une chronique sur le défi de faire honorer la Garantie résidentielle