La semaine dernière, je vous parlais du service à la clientèle de Retraite Québec qui n’arrive pas toujours à bien expliquer aux aînés les chiffres contenus dans ses communications. Les prévisions de rente fournies dans Cap sur la retraite, surtout, suscitent de nombreuses questions.

« Il faut que ces documents soient transformés afin de faciliter leur compréhension tant pour les futurs retraités que pour les employés de Retraite Québec. Étant moi-même proche de la retraite et employée de l’État, je reçois ces documents annuellement. Bien que mon mari travaille en finances et que je sois directrice d’école, nous sommes incapables de nous entendre sur une compréhension commune », m’a écrit une lectrice.

Le chiffre le plus incompris, celui qui suscite le plus de suspicion même, me semble être ce fameux 42 %. Il s’agit de la bonification de rente à laquelle on a droit si l’on réclame sa rente à 70 ans plutôt que 65, selon Retraite Québec.

Certains n’y croient pas du tout et accusent même les médias et les planificateurs financiers de répéter sans nuances un chiffre inexact. Dans leur Cap sur la retraite, ils voient une bonification moindre, de 23 ou 28 %, par exemple.

Évidemment, le montant prévu de rente au fil du temps – à 65, 67 ou 70 ans – est une donnée cruciale pour prendre une décision éclairée. Il importe donc d’avoir sous la main la bonne information, d’être en mesure de la comprendre ou de se la faire expliquer par une source fiable.

Afin de mettre au clair une fois pour toutes cette question, j’ai transmis une liste de questions à Retraite Québec, tout en insistant sur l’importance de bien vulgariser les réponses. Voici donc le résultat.

Quelle proportion des Québécois attendent à 70 ans pour demander leur rente ?

Environ 1 %.

Parmi eux, combien obtiennent la bonification de 42 % promise ?

Les statistiques des cinq dernières années montrent qu’environ 70 % des Québécois qui attendent à 70 ans pour demander leur rente de retraite obtiennent une augmentation supérieure ou égale à 42 %.

Y a-t-il des Québécois dont les chiffres personnalisés de rente prévue à 70 ans fournis dans Cap sur la retraite correspondent à l’augmentation de 42 % ?

Oui. Il s’agit de personnes qui ont généralement cotisé au RRQ durant l’ensemble des années de leur carrière.

Quelles sont les conditions pour avoir droit à une rente bonifiée de 42 % à 70 ans ? Doit-on, par exemple, continuer à travailler pendant les cinq années et (ou) avoir un minimum d’années de cotisations ?

Il n’y a pas de conditions particulières pour avoir droit à une rente bonifiée de 42 % à 70 ans. Il n’est pas nécessaire de travailler de 65 à 70 ans. Le facteur d’ajustement de la rente de 42 % est accordé à tous ceux qui commencent à toucher leur rente à 70 ans. Il n’y a pas de nombre d’années de cotisation requis. Les années avec des revenus nuls entre 65 et 70 ans pourraient être considérées dans l’historique de carrière, ce qui fait en sorte que l’augmentation résultante finale sur le montant de la rente payable serait moindre que 42 %. Cependant, il est important de mentionner que dans tous les cas, la rente à 70 ans sera augmentée par rapport à celle de 65 ans.

S’il n’y a pas de condition pour obtenir une hausse de 42 %, pourquoi cela ne se reflète-t-il pas toujours dans les chiffres personnalisés fournis dans Cap sur la retraite ?

Cap sur la retraite adopte une approche prudente ce qui fait que le montant inscrit représente le minimum de ce que la personne recevrait si elle reporte sa rente à 70 ans. En effet, Cap sur la retraite suppose que la personne ne cotise pas pendant la période de report de la rente de retraite. Également, les chiffres présentés sont en dollars d’aujourd’hui et ne tiennent pas compte de l’inflation et de la croissance des salaires future.

* * *

J’ai l’impression que quelques lecteurs auront sursauté en lisant les deux dernières réponses.

Surtout les ferrés en mathématiques qui connaissent la façon dont les rentes de Québec sont calculées ou qui sont capables de déchiffrer la méthode présentée sur son site web.

Même s’il est techniquement exact qu’une bonification de 42 % est offerte, il faut savoir que ce pourcentage s’appliquera, dans bien des cas, sur une moyenne de revenus admissibles plus basse.

Tentons d’y voir clair. La personne qui cesse de travailler à 65 ans et qui attend 70 ans pour réclamer sa rente ajoute à son dossier cinq années de gains admissibles à 0 $. Ces cinq années ne sont généralement pas sans conséquences, à moins d’avoir commencé très jeune à toucher de bons salaires.

Car pour faire ses calculs de rente, Retraite Québec retire 15 % des pires mois de travail en termes de gains pendant la période de cotisation. Rappel important : que l’on travaille ou non, la période de cotisation au Régime de rentes du Québec débute le mois suivant notre 18anniversaire et se termine le jour où l’on commence à recevoir sa rente. À 65 ans, on a donc une période de cotisation de 47 ans. À 70 ans, elle sera de 52 ans.

« La condition est là. Il ne faut pas que les années pendant lesquelles tu diffères ta pension te fassent dépasser ton 15 %, résume Jean Lamontagne, qui est CFA, actuaire et planificateur financier de formation, mais aussi vice-président de la firme d’investissements Rivemont. La période de cotisation a un impact important ! Pour avoir droit à la pleine bonification de 42 % à 70 ans, un participant doit avoir cotisé pleinement à la RRQ pendant 44,2 années. »

Finalement, ça s’explique assez facilement. Mystère résolu !

Consultez le texte « RRQ-L’art de mal vulgariser » Consultez le texte « Attention, vous risquez de vivre plus vieux que prévu ! »