(Ottawa) Le gouvernement fédéral est exhorté à intervenir alors que l’on signale que le Pakistan s’apprête à arrêter et à expulser des réfugiés afghans, dont plusieurs attendent de venir au Canada.

En août 2021, le gouvernement libéral avait promis d’accueillir 40 000 Afghans fuyant leur pays pour échapper aux talibans. Cela comprend des milliers d’Afghans ayant des liens avec le Canada, y compris d’anciens interprètes qui ont servi aux côtés des Forces armées canadiennes.

À ce jour, seulement quelque 27 000 réfugiés afghans sont arrivés au Canada, et des milliers sont toujours au Pakistan en attendant de savoir quand ils pourront partir.

Le gouvernement pakistanais a fixé au 31 décembre la date limite de départ des étrangers sans visa ou dont le visa a expiré. Au-delà de cette date, les contrevenants risquent d’être arrêtés et expulsés. Certains craignent que s’ils sont renvoyés en territoire afghan, ils risquent la persécution ou la mort aux mains des talibans.

« Cette menace aggravera ce qui est déjà l’une des pires crises humanitaires au monde », a déclaré Wendy Cukier de Lifeline Afghanistan, une organisation qui aide à faire venir des réfugiés afghans au Canada.

« Le Canada doit utiliser tous les moyens à sa disposition ⁠— la diplomatie, l’aide humanitaire, voire les négociations commerciales et les partenariats économiques ⁠— pour persuader le Pakistan de travailler avec lui pour résoudre ce problème », a-t-elle ajouté.

Le gouvernement canadien a reçu la garantie du Pakistan que les Afghans ne seront ni arrêtés ni expulsés après la date limite du 31 décembre, a assuré vendredi la porte-parole d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada, Isabelle Dubois.

« Bien qu’il y ait eu des inquiétudes quant au fait que certains réfugiés afghans pourraient être renvoyés en Afghanistan ou emprisonnés après le 31 décembre, le gouvernement pakistanais a indiqué que la seule mesure prise contre les étrangers dépassant la durée de leur visa sera la réimposition d’amendes et la possibilité d’être placée sur liste noire empêchant leur retour au Pakistan », a-t-elle souligné.

Elle a ajouté que les autorités fédérales appréciaient les efforts continus du gouvernement du Pakistan « pour faciliter le passage en toute sécurité des réfugiés afghans à destination du Canada », et que ce dernier continuait à plaider pour des « procédures simplifiées et des protections renforcées pour les Afghans vulnérables ».

Des descentes policières rapportées

Tout cela reste une maigre consolation pour la porte-parole du Nouveau Parti démocratique (NPD) en matière d’immigration, Jenny Kwan, qui a affirmé avoir averti le gouvernement de l’échéance depuis que le Pakistan avait annoncé son plan pour la première fois en octobre.

Mme Kwan a souligné que des informations circulaient concernant le début d’une répression des autorités pakistanaises contre les Afghans. La police du pays aurait vérifié des visas d’étrangers et procédé à des arrestations, une preuve selon elle de la menace actuelle.

« La situation sur le terrain pour les personnes qui tentent d’échapper à la persécution des talibans n’est pas du tout rassurante, a-t-elle ajouté. La réalité est qu’ils vivent dans la peur tous les jours ».

La porte-parole a déclaré qu’elle avait personnellement reçu des textos indiquant que la police pakistanaise avait fait une descente dans un hôtel où séjournaient des réfugiés afghans.

« On me dit que la seule façon d’éviter ces arrestations, c’est de payer de gros pots-de-vin », a-t-elle déclaré, ajoutant que les réfugiés n’avaient pas les ressources pour fournir ce genre de montant.

Le gouvernement fédéral a été critiqué à maintes reprises pour le rythme auquel il faisait venir les réfugiés afghans au Canada, et plusieurs considèrent ces délais comme un manque d’urgence.

Mme Kwan a fait écho à l’appel de Mme Cukier, qui exhorte Ottawa à exercer toutes les pressions possibles sur le Pakistan afin qu’il n’agisse pas à la date limite du 31 décembre, en plus de redoubler ses efforts de réinstallation.

« Il y a des gens qui ont servi le Canada, ce sont les proches de personnes qui ont mis leur vie en danger en servant le pays, et maintenant les talibans les traquent de manière agressive, a-t-elle attesté. Le gouvernement doit tenir sa promesse de mettre ces Afghans en sécurité ».