Les infrastructures vieillissantes, les changements climatiques et la croissance démographique exercent une pression importante sur les ressources en eau de Montréal. Devant l’ampleur des enjeux et des investissements prévus, la Ville lance une consultation publique sur l’avenir de l’eau sur son territoire.

Montréal gaspille trop d’eau potable, elle rejette trop de polluants dans le fleuve Saint-Laurent, ses infrastructures vieillissantes sont incapables d’avaler la quantité d’eau de plus en plus grande déversée lors de pluies diluviennes et la Ville ne dispose pas d’assez d’argent pour mettre à jour et adapter ses infrastructures liées à la gestion de l’eau.

Voilà quelques constats soulevés dans un rapport préparé par la Commission sur l’eau, l’environnement, le développement durable et les grands parcs.

Gaspillage d’eau potable

Le Canada est parmi les pays qui gaspillent le plus son eau potable et la ville de Montréal est l’une des pires villes du pays à ce sujet, selon le rapport de la commission.

La consommation d’eau à des fins résidentielles de la population montréalaise se situe à 367 litres par personne par jour, selon les données de 2020, alors qu’elle est de 220 litres en moyenne au Canada.

« À Paris, c’est 120 litres par jour et à Londres, c’est 140 litres », a expliqué Maja Vodanovic, responsable de la concertation avec les arrondissements et de l’eau au comité exécutif de la Ville de Montréal.

Les fuites d’eau dans le réseau de distribution sont en partie responsables de ce piètre bilan. L’administration municipale estime que le quart de l’eau gaspillée provient des fuites.

PHOTO DOMINICK GRAVEL, ARCHIVES LA PRESSE

« Il y a des fuites dans le réseau public, mais il y a aussi énormément de fuites dans les maisons », a précisé Maja Vodanovic à La Presse Canadienne, en ajoutant « qu’il y a encore énormément de commerces qui se climatisent avec l’eau potable ».

L’élue invite la population à participer en grand nombre à la consultation publique, pour trouver des solutions à ces problèmes.

La protection de la ressource

Les rejets industriels dans le fleuve et les plans d’eau de l’île sont en constante évolution, selon la commission, et seulement 38 % des cours d’eau ont une « qualité satisfaisante ».

« On sait aujourd’hui que le fleuve Saint-Laurent compte parmi les fleuves les plus pollués en micro plastique. Il est dans les mêmes catégories que les fleuves très pollués d’Asie », a indiqué Maja Vodanovic, en faisant référence notamment aux substances per-et polyfluoroalkylées (PFAS), que l’on retrouve dans de nombreux produits de consommation et qui peuvent causer des problèmes de santé.

Selon l’élue, il faut agir à la source, pour réduire ce type de polluants qui se retrouvent dans l’eau, notamment lors du lavage des vêtements dans des laveuses qui ne contiennent pas le filtre approprié.

Les raccordements inversés de bâtiments, c’est-à-dire lorsqu’il y a un croisement entre l’égout sanitaire et pluvial, sont également une source importante de pollution. Quand des inondations surviennent dans les secteurs où des bâtiments ont des raccordements inversés, les eaux usées sanitaires s’écoulent dans la rivière des Prairies et le fleuve Saint-Laurent. Les eaux usées sont donc rejetées dans l’environnement sans traitement.

Adaptation au changement climatique

Selon la responsable de la concertation avec les arrondissements et de l’eau au comité exécutif, la Ville de Montréal a reçu 20 000 signalements de résidences inondées depuis 2013 et « ce nombre va augmenter ».

« Même si on refaisait tous les égouts, ça coûterait entre 7 et 8 milliards, il y aurait quand même des inondations. »

Elle a souligné que l’adaptation au changement climatique implique également de « modifier le cadre bâti de certaines maisons, en mettant des murets, des clapets, des drains ». Il faut « faire des bassins en béton » et « changer la géométrie de certaines rues pour que l’eau soit acheminée vers des terrains vagues ».

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Les grands chantiers de l’adaptation au changement climatique passent également par les infrastructures vertes. Il faut plus de végétation pour absorber l’eau de pluie, afin d’éviter qu’elle surcharge les infrastructures vieillissantes du réseau souterrain de la ville.

Cela comprend l’utilisation de toits verts, de jardins de pluie, de bassins de rétention d’eau et de surfaces perméables pour capturer et stocker l’eau.

« Selon les projections pour 2050, les intensités critiques des pluies augmenteront en moyenne de 15 % par rapport à aujourd’hui et la fréquence des inondations risque de doubler », souligne le rapport de la Commission sur l’eau, l’environnement, le développement durable et les grands parcs.

Maja Vodanovic estime à un milliard de dollars par année la somme nécessaire pour financer la gestion de l’eau.

« C’est une des raisons pourquoi l’ensemble des villes demande au gouvernement du Québec la mise en place d’un Pacte vert de 2 milliards par année pour les cinq prochaines années », a souligné celle qui est également mairesse de l’arrondissement de Lachine.

La consultation publique sur la gestion de l’eau va se dérouler jusqu’au 4 octobre prochain et les recommandations seront présentées et adoptées lors d’une assemblée publique le 5 décembre.