Cette chronique est un suivi à celle du 1er avril, chronique qui n’était pas un poisson d’avril, celle où je vous expliquais que j’attends depuis fin janvier que la Ville de Montréal me livre un bac brun pour que je puisse recommencer une de mes activités domestiques préférées : composter.

Dans cette chronique1, j’ai écrit une ligne malheureuse. Oui, je l’ai échappée, comme on dit. Ça arrive parfois, dans une vie de chroniqueur, il faut avoir l’humilité de le reconnaître même si ça peut grignoter un peu de notre ego.

Et cette ligne malheureuse, sur les écureuils, m’a valu une plainte au Conseil de presse du Québec.

Je cite au texte : « Après avoir accusé un des nôtres, sans aucune preuve, d’avoir rongé son bac de compost, M. Lagacé ajoute que son bac était : “rongé par un de ces rats en habit de soirée qu’on appelle ‘écureuils’”. Nous portons peut-être des habits de soirée de jour comme de nuit, mais nous ne sommes pas des rats. Il est de commune renommée que le mot “rat” est un terme péjoratif, associé à la saleté, aux maladies et, dans la mémoire collective, aux grandes épidémies de peste… »

C’est l’Association des écureuils de Montréal qui a déposé cette plainte au Conseil de pre…

Comment ?

Mais non ! Je ne suis pas en train d’inventer, voyons !

Je vous jure : Caroline Locher, secrétaire générale du Conseil de presse, a relayé la plainte sur Twitter, le 7 avril dernier2.

Bon, où en étais-je…

Oui, l’Association des écureuils de Montréal considère que ses membres n’ont rien à voir avec les rats. Je cite, encore, la plainte : « Le poil des rats est ras, le nôtre est doux et fourni. Leur queue est laide, la nôtre est d’un éclat époustouflant. Aucun touriste français ne photographie les rats en se pâmant devant les puisards, tandis qu’ils se bousculent pour nous photographier, nous qui agrémentons les arbres, les pelouses et faisons rire les enfants avec nos farandoles. Paris a la tour Eiffel ; Montréal nous a, nous. »

Bref, l’Association des écureuils de Montréal me reproche d’avoir incité au mépris de ses membres et, donc, de discrimination.

Je pourrais bien sûr plaider l’hyperbole (et le lol), puis laisser aux talentueux avocats de La Presse le soin de me défendre, mais l’honneur journalistique commande que je me présente ici mes plus plates excuses aux écureuils. Coupable, Tribunal d’honneur !

Ces jours-ci, il faut le reconnaître, les écureuils sont la cible de beaucoup de préjugés. De tous les rongeurs urbains, on leur fait souvent un mauvais parti à cause de nuisances urbaines qui leur sont souvent attribuées à tort (les ratons laveurs, ratoureux, savent leur faire porter le chapeau pour divers forfaits, souvent liés aux poubelles). Il ne faut pas en rajouter.

Car si on commence à dire n’importe quoi sur les écureuils, parce que ce sont des cibles faciles et clivantes, qui sait comment ça pourrait finir, je vous le demande…

Des plans pour qu’Éric Duhaime lance une pétition pour que l’État interdise aux écureuils de cesser de se promener à poil devant les enfants !

Bon, je vous ai promis une chronique de suivi à celle du 1er avril, où j’expliquais mon désarroi devant la disparition de mon bac de compost. Plus de deux mois après avoir demandé un bac neuf à la Ville, toujours pas de nouvelles. Ça va nous prendre une « cellule facilitatrice » de distribution des bacs bruns, je le crains3.

Deux semaines plus tard, vous devez savoir trois choses :

  1. Le bac signalé comme disparu était sur le vaste balcon de mon voisin immédiat, Stéphane.
  2. Le bac dont je ne vous ai pas parlé, un bac orphelin qui m’a servi de plan B pendant quelque temps, lui aussi disparu dans la brume, est soudainement réapparu sur mon balcon.
  3. Un bac tout neuf est apparu le jour même de ma chronique sur mon balcon.

Décortiquons…

Un matin d’hiver, mon voisin a retrouvé mon bac sur son balcon… Avec quelques autres bacs. Qui les avait déposés là ? Il ne le sait pas. Il en a remis à la rue. Il a gardé celui-là, par inadvertance. Il a reconnu mon adresse quasiment effacée (par le passage du temps, cet implacable voleur) sur la bande blanche, après avoir lu ma chronique.

Quant au bac flambant neuf, doté d’un loquet d’un beau rouge vif, je me suis dit : quelqu’un à la Ville lit La Presse et a décidé d’aider un peu le processus bureaucratique…

Sauf que non : après vérification au 311, le bac demandé fin janvier est toujours en attente de livraison.

Donc, j’ignore qui m’a donné un bac brun flambant neuf.

Je remercie cette personne, profusément.

Quant à mon bac de secours lui aussi perdu, il s’est retrouvé sur le trottoir, devant chez moi, quelques jours après la chronique, allez savoir après quelles folles aventures dans le quartier…

Résultat des courses : j’ai désormais trois bacs bruns pour le compost. Trois ! Mais celui que j’ai commandé : toujours pas arrivé…

J’en aurai sans doute quatre, d’ici peu.

Je vous tiens au courant, soyez-en assurés, chers lecteurs.

Entre-temps, saluez les écureuils de votre quartier pour moi.

1. Lisez la chronique « Je ne composte plus » 2. Lisez la plainte au Conseil de presse du Québec 3. Lisez un article sur le site de la Ville de Montréal