Après avoir perdu la moitié de ses médecins de famille en raison de départs à la retraite ou vers le secteur privé, le centre médical Saint-Henri fermera ses portes à la fin de mars, laissant jusqu’à des milliers de patients orphelins.

Ce qu’il faut savoir

  • Le centre médical Saint-Henri, qui prend en charge 3200 patients, fermera ses portes à la fin de mars.
  • Dans les dernières années, la clinique a perdu la moitié de ses médecins de famille en raison de départs à la retraite ou vers le secteur privé.
  • Cette fermeture est catastrophique pour l’accès aux soins de santé dans la circonscription, estime le député solidaire Guillaume Cliche-Rivard.

« Quand le centre médical va fermer, c’est 3200 patients qui se trouvent possiblement orphelins », dit la Dre Élisabeth Marois-Pagé, l’une des trois médecins de famille de la clinique.

Je me sens triste. Je me sens déçue. C’est une équipe qui est formidable avec une clinique où les patients se sentaient bien.

La Dre Élisabeth Marois-Pagé

Dans les dernières années, quatre médecins omnipraticiens, six spécialistes et une infirmière praticienne spécialisée ont quitté la clinique, soit pour la retraite, soit pour le secteur privé. L’équipe médicale n’a depuis jamais été en mesure de combler ces départs.

« Je suis la dernière médecin arrivée à la clinique il y a quatre ans et demi et on n’a pas été capable de recruter depuis », dit la Dre Marois-Pagé. L’équipe médicale n’est maintenant plus en mesure de payer ses dépenses courantes, comme le loyer, et se voit donc obligée de fermer la clinique.

Des patients laissés à eux-mêmes

« Depuis une semaine, j’annonce à mes patients que la clinique va fermer, puis j’ai géré des pleurs, de l’anxiété et plein de questions. C’est très insécurisant pour les patients. J’aimerais ça leur dire que tout va être correct, mais malheureusement, je ne peux pas. Je ne peux pas les rassurer », laisse tomber la Dre Marois-Pagé.

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

La Dre Elisabeth Marois-Pagé

La médecin doit elle-même se trouver une nouvelle clinique, qui risque d’être dans un autre quartier. « Les patients qui ont de la difficulté à se déplacer vont devoir se trouver probablement un autre médecin de famille. Ça va laisser un trou énorme dans la communauté de Saint-Henri », déplore-t-elle.

Avec la fermeture du centre médical, le GMF chemin de station Saint-Henri, qui inclut le CLSC de Saint-Henri, va passer d’un niveau d’accréditation 3 à 1, dit la Dre Marois-Pagé. « Ça veut dire que les patients qui vont rester dans le CLSC auront moins de temps infirmiers, n’auront plus de nutritionniste et n’auront probablement plus de temps de travail social non plus. Par ricochet, cette fermeture a un impact sur la population et le territoire à beaucoup plus grande échelle. »

Tenter de sauver la clinique, en vain

Dans une tentative de sauver la clinique, les trois médecins de famille encore en poste ont décidé d’augmenter leurs frais de bureau. « C’est de notre portefeuille à nous. On voulait essayer d’arrêter l’hémorragie », dit la Dre Marois-Pagé.

Les médecins ont également sollicité l’Association des médecins omnipraticiens de Québec (AMOQ) et le Département régional de médecine générale de Montréal, mais n’ont pas trouvé de solution prometteuse. À la fin de septembre, elles ont écrit une lettre au ministre de la Santé, Christian Dubé, afin de trouver des solutions pour assurer la pérennité de la clinique pour les années à venir, mais n’ont jamais eu de retour, dit la Dre Marois-Pagé.

« Ce serait une énorme perte pour les gens de Saint-Henri. Ce sont des milliers de patients qui perdraient leur clinique de proximité. Le CLSC d’en face pourrait aussi perdre son statut, donc c’est une nouvelle catastrophique pour l’accès aux soins de santé dans la circonscription », se désole le député solidaire de la circonscription de Saint-Henri–Sainte-Anne à l’Assemblée nationale du Québec, Guillaume Cliche-Rivard.

Le MSSS se dit conscient des impacts

Appelé à réagir, le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) a indiqué que la fermeture d’une clinique n’est « jamais une bonne nouvelle » et dit être « très conscient des impacts de cette fermeture sur les patients ».

« Cependant, il est probable que les médecins du Centre Médical St-Henri se joignent à une nouvelle clinique à la suite de la fermeture et conservent ainsi leur patientèle », a déclaré le porte-parole du MSSS, Francis Martel. Les patients laissés sans médecin de famille à la suite de la fermeturesont invités à s’enregistrer sur la liste d’attente du Guichet d’accès à un médecin de famille.

En réponse à la demande de La Presse de savoir quelles mesures seront prises pour éviter cette fermeture, M. Martel a déclaré que « des mesures de réorganisations des services seront mises en place pour diriger les patients vers d’autres services ».