Que s'est-il passé au Québec sur le plan politique en 2011? Comment expliquer à mes clients provenant de l'extérieur de la province, le résultat l'élection fédérale du 2 mai, la quasi-disparition du Bloc québécois, la montée du NPD, l'éclatement du Parti québécois et les divisions au sein du mouvement souverainiste, ainsi que la dissolution de l'ADQ et la création de la CAQ?

Pas facile à comprendre entre nous, essayez d'imaginer le casse-tête pour nos voisins du Nouveau-Brunswick ou de l'Ontario. Ma perception de la situation se résume à ceci: les citoyens québécois sont fatigués des modèles préétablis, des idéologies figés dans le temps, de la politique préfabriquée, de la politique de façade ou l'on répète constamment les mêmes « mantras » ou étiquettes, appelons cela le « façadisme politique ». En somme, ils sont fatigués de s'haïr entre eux!

En effet, qu'ont en commun François Legault et Jack Layton, les nouvelles saveurs politiques à la mode? Et d'autre part, qu'ont en commun les Gilles Duceppe, Pauline Marois et Gérard Deltell?

Les premiers représentent un espoir de sortir de la dynamique d'une politique d'affrontement stérile, ou peuvent se côtoyer dans un même parti des citoyens de différentes allégeances et qui veulent se dissocier de la dynamique d'opposition figée dans notre mémoire collective depuis 40 ans.

Les seconds, eux, tiennent à s'afficher en fonction d'une croyance en une option, il y a une obligation d'être souverainiste ou fédéraliste, ou de se définir à gauche ou à droite. Pour que cette approche fonctionne, il faut absolument un ennemi en face à détester, sinon c'est foutu. D'où l'importance d'haïr ceux qui ne partagent pas la même opinion.

Pour justifier leur existence, les souverainistes ont besoin d'haïr les fédéralistes et vice versa.

Au niveau économique et social, c'est le même phénomène. La droite a besoin de détester son ennemi juré, la gauche, pour entretenir la flamme de ses militants et vice versa. Les étiquettes politiques servent malheureusement trop souvent de chapelle sectaire, où il doit y avoir absolument un gagnant et un perdant, jusqu'au jour ou la population décroche de guerre lasse, parce qu'elle ne voit pas la lumière au bout du tunnel et où elle constate qu'il n'y a que des perdants.

C'est ce que symbolisent les idéologies véhiculées au Québec depuis 40 ans, qu'elles soient souverainistes ou fédéralistes, de gauche ou de droite. En dehors de la religion politique établie, point de salut! Avant la Révolution tranquille, on entretenait la haine entre les catholiques contre les juifs ou les protestants, et la haine des Québécois d'origine française contre les Québécois d'origine anglaise.

Je dis souvent à mes clients que les citoyens québécois sont allergiques à deux choses en politique : les attitudes du «crois ou meurs» qui ressemblent étrangement aux guerres de religion de jadis; et la tromperie, parce que les Québécois ne font confiance qu'une seule fois, jusqu'à la preuve du contraire.

L'enquête Charbonneau sur la collusion et la corruption saura-t-elle dissiper tous les soupçons concernant la classe politique au Québec? En attendant, les citoyens québécois se sont mis en mode de « stationnement politique ». À Ottawa, ils ont changé de « syndicat politique », pour défendre leurs intérêts, du Bloc au NPD. À Québec,  ils s'apprêtent à choisir un parti qui ne les obligera pas à s'haïr entre eux, ni souverainiste, ni fédéraliste, ni de gauche, ni de droite. Cette situation reflète un vrai « stationnement politique » qui reflète non seulement une grosse fatigue politique face aux idéologies traditionnelles, mais aussi et surtout un désir de faire une pause politique, avant de faire de vrais choix politiques à long terme.