UN DEUIL - J'ai toujours considéré le hockey comme le plus beau sport au monde, depuis ma tendre enfance. J'avais hâte d'être père un jour, à mon tour, pour initier mon fils à ce sport comme l'avait fait le mien. Soit pour collectionner avec lui des cartes de nos joueurs favoris, se faire des parties dans le sous-sol en s'imaginant être un Jaroslav Halak, un Sidney Crosby ou en jouant sur une console de jeu vidéo.

UN DEUIL - J'ai toujours considéré le hockey comme le plus beau sport au monde, depuis ma tendre enfance. J'avais hâte d'être père un jour, à mon tour, pour initier mon fils à ce sport comme l'avait fait le mien. Soit pour collectionner avec lui des cartes de nos joueurs favoris, se faire des parties dans le sous-sol en s'imaginant être un Jaroslav Halak, un Sidney Crosby ou en jouant sur une console de jeu vidéo.

Avec les années, mon intérêt pour ce sport a diminué de plus en plus. La base du hockey reste la même et c'est ce qui fait encore que c'est le plus beau sport. Mais la culture entourant ce sport a fini par me dégoûter. En commençant par mon expérience personnelle, comme joueur enfant, lorsque j'avais 8 ou 9 ans, ce qui remonte déjà à plus de 20 ans. Les parents et les entraîneurs hurlaient des obscénités que des enfants n'auraient jamais dû entendre. Dans une partie contre une équipe avec laquelle nous avions une grande rivalité, alors que nous perdions 8-0, un de nos meilleurs joueurs a utilisé son bâton comme une hache et a frappé un joueur adverse au visage de toutes ses forces. Je m'en souviens encore 22 ans plus tard.

J'ai choisi le hockey comme sport pour la beauté, la finesse, la rapidité et l'instinct de son jeu. Je n'ai rien contre le jeu robuste et physique, au contraire, c'est une partie importante du jeu, mais si j'avais voulu être partisan de lutte, de boxe ou de combat extrême, j'aurais choisi un autre sport.C'est une décision qui a pris des années à atteindre mon coeur, mais aujourd'hui, j'ai tellement mal à mon sport que je vis une sorte de deuil. Le deuil de ne pas pouvoir initier mon jeune garçon Ludovik au plus beau sport au monde.

* Étienne Cabana est le père d'un garçon. Il réside à Sainte-Angèle-de-Monnoir, en Montérégie.

* * *

J'AI TROP PEUR - J'ai vécu ma jeunesse dans un coin de pays qui a vu Stéphane Richer et Guy Lafleur donner leurs premiers coups de patin. Les enfants y grandissaient avec des patins aux pieds et un bâton dans les mains. Avec mon patinage de bottine, je ne pouvais qu'admirer mes amis qui survolaient la glace sans effort, la rondelle collée à la palette du bâton.

Mon amour pour le hockey est longtemps resté intact. Je souhaitais transmettre cette passion à mes enfants et je me voyais bien, dans quelques années, assis sur un banc d'aréna, en train d'encourager mon enfant, haut comme trois pommes, pourchassant tant bien que mal une rondelle.

Mais depuis quelques années, les gladiateurs sont revenus dans le temple. Du sang et des jeux. La bonne vieille formule éprouvée. Le coup de hache de Bobby Clarke à l'endroit de Valeri Kharlamov, érigé en système. La force brute contre la vitesse. L'intimidation contre l'intelligence.

Les têtes grises auront beau nous ressortir leurs phrases vides, tenter de justifier l'injustifiable, mettre le fardeau de la culpabilité sur les victimes - «il patinait la tête basse, Pierre» - ce n'est pas ça le hockey. Le hockey, c'est Guy Lafleur réalisant une montée à l'emporte-pièce. C'est le sourire de PK Subban après une victoire de son équipe. C'est Sidney Crosby réalisant une passe lumineuse derrière le filet adverse.

Alors, qu'est-ce je répondrai, le jour où mon enfant me demandera de l'inscrire à une ligue de hockey organisée? Que mon coeur de père ne supporterait pas de voir un matamore gonflé aux stéroïdes lui régler son cas? Que j'ai trop peur qu'il soit cloué à un fauteuil roulant à la suite d'une mise en échec sournoise? Est-ce qu'il comprendra que je refuse de le jeter en pâture dans un système ingrat qui ne pense qu'à s'en mettre plein les poches et qui refuse de protéger ses joueurs?

Au fond, je le sais ce que je lui répondrai lorsque la question fatidique viendra. Je lui dirai qu'il pourra jouer à la patinoire municipale avec ses amis ou son père, chaque fois qu'il le souhaite. Du hockey comme dans le bon vieux temps.

* Philippe Déry réside à Montréal.