L'économie mondiale commençait à peine à se redresser grâce au coup de pouce fiscal et monétaire, un scénario digne d'Hollywood pour les marchés boursiers. Mais voilà que l'or noir sème l'horreur. Prévoir l'impact économique de ce mouvement pro-démocratique semble plus difficile que de prédire qui gagnera un Oscar dimanche soir.

L'économie mondiale commençait à peine à se redresser grâce au coup de pouce fiscal et monétaire, un scénario digne d'Hollywood pour les marchés boursiers. Mais voilà que l'or noir sème l'horreur. Prévoir l'impact économique de ce mouvement pro-démocratique semble plus difficile que de prédire qui gagnera un Oscar dimanche soir.

Le déséquilibre pétrolier entre l'offre et la demande arrive à un bien mauvais moment pour la planète économique: la montée des prix de l'alimentation grugeait déjà le budget des consommateurs; les entreprises américaines étaient sur le point d'embaucher plus de travailleurs.

Soyons réalistes: le prix restera près des 100$US le baril pour quelques mois, que les régimes dictatoriaux tombent ou pas. L'intensité de la consommation énergétique a chuté de sorte que l'économie mondiale ne déraillera pas comme lors des chocs pétroliers de 1973 ou 1990.

La vague de révoltes dans le monde arabe n'est pas une bonne nouvelle pour le Québec qui a importé pour 11 milliards de dollars de pétrole l'an dernier. Si le prix se maintient, sa croissance économique ralentira sous la barre des 2% en 2011, bien inférieure à son habitude. Recherche Économique VMBL juge néanmoins que l'effet est légèrement positif sur l'ensemble de l'économie canadienne. Plus précisément, l'Ouest canadien devient la star de la soirée, et ce, même si l'exploitation des sables bitumineux est néfaste pour l'environnement.

Débutons par les points positifs. Un pétrole dispendieux engendre un transfert de revenus venant des États-Unis qui importe la majorité des trois millions de barils que le Canada produit chaque jour. En plus d'accentuer l'exploration et l'exploitation de puits moins rentables, l'Alberta, la Saskatchewan et Terre-Neuve-et-Labrador percevront des millions de dollars supplémentaires en redevances. Également, Ottawa retirera davantage en impôts, permettant de soutenir les transferts aux provinces dont le Québec. Les détenteurs de titres pétroliers ont aussi le sourire aux lèvres[ThinSpace]: plus de la moitié des actions des sociétés pétrolières du S&P/TSX appartiennent à des Canadiens.

Qu'en est-il des effets néfastes? Les ménages seront victimes d'une hausse rapide du coût de la vie, provenant surtout du prix à la pompe. Mais même si l'inflation continue de dépasser la cible de 2% préconisée par le gouverneur Carney, celui-ci ne devrait pas hausser le taux directeur à moins que cette flambée de l'énergie engendre une vague inflationniste sur les salaires et les autres prix. Deuxièmement, nos partenaires commerciaux auront moins les moyens d'acheter nos biens manufacturiers. Finalement, l'incertitude peut miner la confiance des ménages et des entreprises.

Terminons par un scénario plus triste qui ne risque pas de remporter le prix du meilleur film comme Lawrence d'Arabie en 1963. Si les craintes d'approvisionnement se propageaient en Algérie, en Iran ou en Arabie Saoudite, le prix du pétrole pourrait dépasser le sommet historique de 145$ le baril atteint en 2008. Les conséquences seraient dramatiques même au Canada. Le fléchissement prononcé de la demande extérieure pour nos produits engendrerait d'importantes pertes d'emplois. Il serait difficile de relancer l'économie puisque l'endettement public et privé a atteint sa limite.

Bref, nous pourrions assister à la théorie du cygne noir de Nassim Talet, célèbre pour avoir prédit la crise financière de 2008: un événement peu prévisible peut avoir des conséquences dramatiques. Le tumulte actuel a le potentiel de créer un choc pétrolier et de raviver le spectre de la récession. Mais ne sortez pas vos mouchoirs prématurément. Si le prix du pétrole ne s'enflamme pas davantage, le Canada devrait pouvoir tirer son épingle du jeu.