La majorité des réactions exprimées jusqu'à présent à propos du contexte politique et culturel de l'Arizona et son lien avec la tuerie ont sûrement plus qu'un fond de vérité.

La majorité des réactions exprimées jusqu'à présent à propos du contexte politique et culturel de l'Arizona et son lien avec la tuerie ont sûrement plus qu'un fond de vérité.

Depuis que j'ai quitté le Québec pour habiter à Tucson, je suis souvent abasourdi par la profusion et l'abondance de propos populistes et «nativistes» dans cet État, notamment sur les ondes des stations de radio conservatrices. La rhétorique aussi absurde qu'omniprésente du Tea Party m'inquiète.

Ainsi, bien que Tucson se démarque comme une ville relativement progressiste, elle est tout de même située en Arizona, et subit de ce fait même le climat politique de la région.

Je n'ai donc pas été surpris outre mesure d'apprendre que la représentante démocrate du district 8, Gabrielle Giffords, et ses sympathisants avaient été attaqués. À première vue, cet événement apparaît comme une conséquence naturelle des discours de Glenn Beck, Sarah Palin et autres «visionnaires» débiles et de la propagande de Fox News et compagnie.

Mais les liens ne sont probablement pas aussi directs qu'on veuille bien le penser. Les désaxés n'agissent pas en isolation des courants idéologiques en cours, mais ces derniers n'expliquent pas nécessairement leurs actions spécifiques.

Tristement, on doit se rappeler que Montréal, l'une des villes les plus progressistes et cosmopolitaines en Amérique du Nord, et dans un Québec très différent politiquement de l'Arizona, a subi trois fusillades du même genre: 1989 (Polytechnique), 1992 (Université Concordia) et 2006 (collège Dawson). Les comparaisons sont hasardeuses: nombreux diront qu'un attentat sur une personnalité politique est différent d'un attentat sur des étudiants et enseignants dans un établissement collégial. Mais à quel point ces différences sont-elles en cause dans l'action des meurtriers respectifs? Ou encore, dans quelle mesure l'abondance des armes à feu et l'obsession du second Amendement états-unien constituent-elles des facteurs explicatifs supplémentaires, pour lesquels il n'existe pas vraiment de contre-partie québécoise?

Dans le même ordre d'idées, on se doit de se rappeler la réaction de colère au Québec lorsqu'en 2006, la journaliste du Globe and Mail Jan Wong a cherché à mettre en cause le contexte socioculturel de la province pour expliquer ces tueries.

Il est normal de vouloir trouver un sens à un tel événement, et de chercher à comprendre sa signification sociale, mais les généralisations sont risquées, et les relations entre les causes et leurs effets ne sont pas aussi claires.

Bien sûr, la teneur politique de cette tragédie demande réflexion politique, mais pas nécessairement du «pétage de bretelles» moraliste et opportuniste. La ligne entre les deux est mince, mais importante.