Depuis quelques mois, les chroniqueurs et les journalistes commentent régulièrement le leadership de Pauline Marois, certains allant jusqu'à lui prédire des problèmes lors du vote de confiance d'avril prochain. Il est de bon ton de taper sur les « politiques » et on s'en donne à coeur joie avec Mme Marois. Un journaliste m'affirmait même en début de semaine qu'il n'avait jamais vu un chef de l'opposition constituer un tel poids pour son parti.

Depuis quelques mois, les chroniqueurs et les journalistes commentent régulièrement le leadership de Pauline Marois, certains allant jusqu'à lui prédire des problèmes lors du vote de confiance d'avril prochain. Il est de bon ton de taper sur les « politiques » et on s'en donne à coeur joie avec Mme Marois. Un journaliste m'affirmait même en début de semaine qu'il n'avait jamais vu un chef de l'opposition constituer un tel poids pour son parti.

Étonné, j'ai cru bon vérifier la véracité de ses propos, de voir comment s'inscrit la situation actuelle dans l'histoire récente du Québec. Cet exercice va d'ailleurs dans le sens de ma conviction profonde que les références historiques constituent la meilleure base d'analyse d'une problématique.

Pour comprendre le traitement accordé aux chefs de l'opposition, commençons avec le plus célèbre d'entre eux, René Lévesque. Même s'il n'a jamais formellement occupé le poste, il était clairement celui qui désirait prendre le pouvoir en 1976. La réalité est loin de l'idée qu'on se fait généralement de l'époque. En effet, dans un sondage CROP d'octobre 1976, M. Lévesque n'obtenait que 27 % d'appui. Si on ajoute la demande inconvenante de Claude Charron réclamant le départ du fondateur du PQ, facile d'imaginer le contexte. Est-ce que M. Lévesque était un poids pour son parti ? La réponse est évidente.

Neuf ans plus tard, ce fut le tour de Robert Bourassa. Nul besoin de regarder les sondages de l'époque pour comprendre la situation : le 2 décembre 1985, le PLQ a fait élire 99 députés, mais sans M. Bourassa qui a perdu dans Bertrand et qui a dû se réfugier dans Saint-Laurent pour siéger à l'Assemblée nationale. Était-il un poids pour son parti ? L'érection méritée de sa statue devant l'Assemblée nationale répond à cette question.

La démonstration continue neuf ans plus tard avec un autre chef de l'opposition, Jacques Parizeau. Était-il populaire ? Était-il un poids pour son parti ? Ce ne fut pas facile pour lui. Sa popularité a joué au yoyo, descendant même à 12 % dans un SOM de mars 1994. Un CROP de juillet 1994 indiquait que 29 % des Québécois le considéraient le plus apte à occuper le poste de premier ministre. Était-il un poids pour son parti ? Le chemin qu'il a parcouru démontre que non.

La performance de Jean Charest en 2003 nous enseigne aussi que le poste de chef de l'opposition n'est pas la meilleure position pour cultiver sa popularité. Un sondage du 12 mars 2003 indiquait que seulement 22 % des Québécois le considéraient le meilleur pour être premier ministre. Était-il un poids pour son parti ? Est-ce que cela l'a empêché de mener ses troupes à la victoire ? Poser la question, c'est y répondre.

Toutes ces données nous amènent à relativiser les choses. Deux sondages récents, le premier effectué par CROP en septembre et le second par Léger Marketing en octobre, nous indiquent que 26 % des Québécois considèrent Mme Marois comme la meilleure personne pour occuper le poste de premier ministre et que 38 % des gens ont une bonne opinion d'elle. Au fond, Mme Marois n'a pas plus de problèmes que René Lévesque en 1976, Robert Bourassa en 1985, Jacques Parizeau en 1994 et Jean Charest en 2003.

Être chef de l'opposition, c'est un travail ingrat qui génère peu de sympathie dans la population, mais c'est un poste essentiel à la démocratie. Relativement aux scores de ses prédécesseurs, on doit donc la féliciter pour le travail accompli. Mme Marois est la cible d'un tir groupé, elle reçoit les coups, mais elle continue d'avancer. Elle contrôle son parti comme aucun chef auparavant, la décision d'écarter le SPQ libre étant la démonstration de cette réalité.