Le cardinal Marc Ouellet nous démontre, dans ses derniers propos sur l'avortement, comment une pensée fondamentaliste est incapable d'une vision éthique nuancée.

Le cardinal Marc Ouellet nous démontre, dans ses derniers propos sur l'avortement, comment une pensée fondamentaliste est incapable d'une vision éthique nuancée.

En digne représentant de la hiérarchie catholique, il défend sans nuance l'interdiction absolue de l'avortement. Le contexte et la liberté de choix de la femme ne sont pas pris en compte. La position officielle de l'Église catholique est simple: l'avortement est un mal qui va à l'encontre de la volonté du «Dieu catholique sur la vie». Qu'une jeune fille soit enceinte après avoir été abusée par son père, qu'une femme ait subi un viol, qu'une autre voit sa vie menacée par une grossesse, n'a pas d'importance.

Elle doit porter l'enfant «don de Dieu». Même le recours à la pilule du lendemain est condamné par cette institution que se dit championne de la vie, championne de l'éthique. Évidemment, les «pro-vie catholiques » me diront que je cite des cas extrêmes. Ils me diront que l'avortement est devenu un moyen de contraception. Ils ont probablement raison, en partie, sur ce dernier point.

Toutefois, condamner l'avortement dans l'absolu, c'est aussi entretenir une «culture de la mort». La réalité objective de l'avortement est incontournable depuis des siècles. Criminaliser et condamner l'avortement, c'est nier que des milliers de femmes meurent chaque année parce qu'elles ont subi un avortement clandestin. Non par choix! Non parce qu'elles n'aiment pas la vie!

Certaines ne peuvent prendre en charge une nouvelle bouche à nourrir, d'autres ont été violées dans des conflits armés. Le viol est un crime de guerre encore aujourd'hui. Criminaliser et condamner l'avortement, c'est nier la liberté d'une femme de choisir ou non une grossesse. Criminaliser et condamner l'avortement n'est pas un choix éthique. Criminaliser et condamner l'avortement n'est pas un choix «pro-vie». Le paradoxe éthique de l'avortement, c'est justement la complexité des situations. Chaque situation a son lot de difficultés et d'enjeux. La liberté de choisir librement l'avortement, c'est justement une gestion éthique de la question.

Chaque femme, chaque couple peut, à partir de sa situation et de ses croyances choisir ou non cette option. Le libre choix permet aussi aux conservateurs laïques et religieux d'être contre l'avortement pour des questions de principe. Toutefois, ils n'ont pas à imposer leur choix à l'ensemble de la communauté civile. Ils n'ont pas à choisir pour les autres. Voilà une grande leçon de nos états démocratiques.

Les derniers propos de Mgr Ouellet sur l'avortement sont stupides et sans nuances. Ils sont de la propagande idéologique. Ils font fi des enjeux éthiques et religieux complexes. Mgr Ouellet entretient «la culture de la mort» en obligeant moralement une femme à porter un enfant non désiré après un viol. Il entretient «la culture de la mort» en soutenant la décision du gouvernement conservateur, de ne pas financer les programmes de santé des femmes dans le Tiers-monde s'ils proposent le choix de l'avortement à des femmes à bout de ressources. Cette décision ne prend aucun compte du contexte social de ces femmes qui voient l'avortement comme une possibilité libératrice. Elles mourront probablement après un avortement clandestin. Mgr Ouellet, vos propos sont une honte éthique, intellectuelle et spirituelle. «La culture de la mort», c'est la mort de la richesse humaine, spirituelle et éthique du catholicisme tué par une hiérarchie enfermée dans des idéologies éthiques sans nuances. Comme Patrick Lagacé, j'espère sincèrement que des prêtres, des religieuses, des croyantes et des croyants catholiques vont condamner vos propos indignes de l'Évangile. La hiérarchie catholique a besoin d'une sérieuse mise à jour démocratique sur les questions du droit des femmes, des homosexuelles et de l'éthique sexuelle. Il faut vous mettre à réfléchir la complexité éthique plutôt qu'à radoter votre idéologie médiévale.