Les universités québécoises de besoin d'une injection de 620 millions de dollars pour effectuer un rattrapage face aux autres universités canadiennes. Qui doit payer, selon vous? Les étudiants, par le biais d'une hausse importante des droits de scolarité? Le gouvernement québécois doit-il lui-même investir davantage? Ou encore les entreprises privées, qui bénéficient des services des étudiants à la sortie de l'université?



MERCI DE NOUS AVOIR FAIT PARVENIR VOS COMMENTAIRES

Retour sur investissements

Le cycle du débat sur les droits de scolarité est reparti pour quelques mois. Il sera ponctué de manifestations étudiantes, d'études de l'Institut économique de Montréal, de déclarations des recteurs, suivi d'une hausse des droits de scolarité décidée par le gouvernement lors de son prochain budget. À moins que... L'un des arguments entendus ces derniers jours appui la revendication de la hausse des droits de scolarité parce que les études sont un investissement qui rapportera aux étudiants quelques années après leur diplomation, car ils auront un emploi mieux rémunéré. Or, lorsque nous investissons dans des fonds de placement, nous nous attendons à en tirer un bénéfice, comme les études universitaires. Dans ce cas, est-ce que le gouvernement impose des frais au moment où nous investissons ou au moment où ils engrangent les profits? La réponse est connue de tous. Le gouvernement nous impose des frais par le biais des impôts lorsque nous faisons des profits et non pas au moment des pertes. Si le discours sur l'investissement est valide, nous devons appliquer sa logique du début à la fin, sinon cela devient un argument fallacieux. Oui, il faut que chacun paie sa part, mais cela doit être en fonction de son revenu. Il est clair que les gens qui ont un revenu plus élevé tirent un bénéfice plus important de notre société. Augmenter les droits de scolarité est une politique régressive qui aura pour effet, si ce n'est de diminuer la fréquentation universitaire, de désavantager les personnes provenant de milieux moins privilégiés, car ces derniers s'endetteront et s'intégreront au marché du travail avec un net désavantage. Les impôts, qui constituent une politique progressive, permettent, à ceux qui bénéficient davantage de leur formation universitaire par un salaire plus élevé, de payer leur part dans le financement universitaire. C'est pourquoi il faudrait songer à augmenter les points d'impôt pour les citoyens à haut revenu, ce qui permet ainsi de redistribuer la richesse. Par ailleurs, lorsque nous regardons le financement de la recherche, le Canada est en milieu de peloton et en termes d'investissement public nous sommes au peloton de tête. Cependant, en termes d'investissement privé, le Canada est le parent pauvre de la recherche dans les pays développés. En conséquence, il serait temps que les entreprises paient leur part en terme de recherche afin de respecter le retour sur l'investissement que fait l'ensemble de la société pour ces dernières. Le gouvernement haussera les droits de scolarité à moins que nous laissions tomber ces arguments idéologiques et que nous proposions une politique fondée sur une plus grande justice sociale. Ainsi, les personnes à haut revenu devraient payer leur part permettant aux citoyens provenant de la classe moyenne et de milieux défavorisés de démarrer leur vie active dans les mêmes conditions.

Pierre-Paul St-Onge, agent de recherche, Université du Québec à Montréal

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La course aux subventions aura-t-elle raison des universités?

Qu'est-ce que l'université? À la naissance, au Moyen-Âge, l'université était un lieu de débats et de recherches spirituelles. Le lieu du savoir, de la sagesse et de la parole. Et la méthode d'enseignement en vigueur était la scolastique qui utilisait le procédé de la dispute pour former les esprits. Ce procédé était un mode et une manière d'enseignement. Dans la dispute, il y avait un répondant, un opposant et un déterminant (un arbitre, c'est-à-dire le professeur). L'opposant soutenait une thèse et le répondant interagissait avec l'opposant. L'arbitre aidait les débatteurs dans leur dispute, il n'y avait ni note, ni examen, ni évaluation. L'exercice de débattre était l'examen. Aujourd'hui, est-ce qu'on débat encore à l'université? Assurément, mais ce n'est pas la règle. On exécute. On étudie. On répond. On réussit ou on échoue. Et après? Quand on échoue, on retourne sur le marché du travail. Et quand on réussit? Eh bien! on nous apprend à apprendre à faire des demandes de bourses et de subventions. Le nouveau but des études universitaires, c'est obtenir du financement. En fait, on cherche à former des spécialistes qui seront capables de faire des demandes de subventions. Eh oui, l'université est rendue une usine où l'on produit des gens capables de demander des subventions. Le plus tragique dans ce constat, c'est qu'il y a des conséquences sur la manière dont on enseigne et sur les types de programmes qui voient le jour quand on construit les lieux du savoir ainsi. Car plus on laisse d'espace à la bureaucratie et à l'aspect technique de la recherche et de la connaissance dans le monde universitaire et plus les formations professionnelles se multiplient et plus les programmes techniques deviennent légions. En fait, les élèves sont devenus des légionnaires au service de la dictature de la subvention et de la technocratie. Et les professeurs sont devenus les prisonniers du diktat de la recherche du financement. Pour le dire en un mot, ce qui compte à l'université désormais, ce sont les résultats. L'exercice d'apprendre en lui-même n'est rien, il ne veut rien dire, il ne vaut rien, car ce qui importe, c'est la note finale et la capacité qu'aura l'élève à rapporter du financement à la chaire. Autrement dit, on a subsumé l'idée qu'apprendre c'est réussir, c'est avoir de bons résultats à l'idée que l'exercice d'apprendre n'est pas seulement un moyen d'arriver à connaître, c'est aussi et surtout une fin en soi. Est-ce que cette course aux subventions aura raison de l'université en tant qu'universitas magistrorum et scolarum? Espérons seulement qu'on pourra renverser la vapeur du train qui avance déjà à une vitesse fulgurante.

Alexandre Motulsky-Falardeau

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Une partie de ping-pong

Depuis quelque temps, le débat concernant les frais de scolarité universitaire s'est transformé en véritable partie de ping-pong. Les décideurs se lancent la balle sans vraiment savoir quoi en faire et où elle va se poser. La proposition est lancée, «pop» une hausse à la moyenne canadienne, «pop» on renvoie l'idée vers une augmentation moindre, « pop » que pensez-vous de l'IPU (impôt postuniversitaire?...), «pop» le financement privé lui? «pop»... Le débat se fait unilatéralement entre les recteurs et le gouvernement. Pourtant hier lors de la rencontre des « partenaires » en éducation, un tiers de la salle était composée de fédérations étudiantes et de grands syndicats québécois. Qu'en est-il de leurs propositions? Qu'en est-il de leurs questionnements? Avons-nous vraiment pris le temps de comprendre leur message? Certes, ils affirment être contre une hausse des frais de scolarité, mais pourquoi croyez-vous? Simplement parce qu'il s'agit d'une dépense et que pour eux ce n'est pas correct. Non, parce qu'eux voient l'impact que cela pourrait avoir sur l'accessibilité aux études, sur la qualité des futurs étudiants admis, sur la capacité des étudiants à payer tout en étudiant, sur le nombre d'étudiants qui décideront d'opter pour une formation collégiale versus une formation universitaire, sur l'augmentation de l'endettement moyen des étudiants, etc. Pour répondre à la question «Qui doit payer?», je réponds qu'il ne revient pas seulement aux étudiants d'écoper de cette facture. Le financement par le privé n'est pas une mauvaise idée, tant que celui-ci permet à nos universités de demeurer indépendantes face à leur gestion. Le gouvernement ne voit malheureusement pas l'éducation comme un investissement pour notre société québécoise. Si tel était sa pensée, celui-ci ne serait pas en train de discuter d'une hausse, mais de combien devrait être le montant alloué à l'«aide financière aux études» l'année prochaine. C'est un choix de société que nous devons faire ensemble, mais malheureusement ce choix est déjà en train de se concrétiser sans même avoir considéré le point de vue des principaux concernés. Avons-nous vraiment pris le temps de comprendre, comment une hausse allait affecter nos étudiants? Avons-nous vraiment pris le temps de comprendre, le message des étudiants à travers le Québec? Avons-nous vraiment pris le temps de comprendre.

Marie-Philip Leduc, étudiante au premier cycle en communication et politique de l'Université de Montréal

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Droits de scolarité

Ce sont les mêmes lucides qui nous abreuvent de l'urgence de majoré les frais de toutes sortes (électricité, ticket modérateur dans de multiples services que nous recevons des gouvernements) pour en diminuer l'accessibilité. Mais lorsqu'il est question des frais de scolarité ils nous disent et je cite Françoise Bertrand présidente des Chambres de commerce du Québec et certains recteurs qu'«il est faux de croire qu'en augmentant les droits de scolarité on réduit l'accessibilité des moins favorisés. C'est une mythologie que les gens qui sont dans la rue entretiennent». Ils modifient leurs propos selon leurs intérêts à eux en se foutant de la majorité des gens qui doivent trimer dur pour gagner leurs vies. Une petite marche dans la rue leur ferait le plus grand bien.

Daniel Boiteau, Montréal

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Et si l'université était élitiste?

Dans le cadre du débat sur les frais de scolarité, on parle beaucoup de l'accessibilité économique au système universitaire. S'il est clair que cette position ne peut être que défendue, on se doit quand même de soulever une question importante: est-ce que tous ont leur place à l'université? Il s'agit là d'une question taboue que personne n'accepte de soulever. Pourtant, en Europe, si souvent donnée en exemple dans le domaine de la gratuité scolaire, il s'agit là d'un élément essentiel du système d'éducation. Indirectement, la même chose se passe aux États-Unis, où l'accès aux universités prestigieuses passe plus par l'excellence universitaire que par le portefeuille. Parfois, je me demande si certaines personnes ont vraiment étudié à l'université. Quand j'entends qu'il n'y a pas de problème à travailler à temps plein et à étudier à temps plein, je me dis que le programme en question devrait être aboli sur l'heure, car c'est physiologiquement impossible dans un vrai programme universitaire. Ne demandez-vous pas pourquoi certains programmes rapportent moins que d'autres : les niveaux d'exigence ne sont absolument pas équivalents. J'ai aussi l'impression que l'on donne, le terme est juste, des diplômes qui semblent avoir été conçus dans un univers parallèle. Les analyses économico-sociopolitiques ridicules «d'intellectualeux» bien pensants qui polluent les pages d'opinion des journaux sont légion. Uranium, gaz de schiste, politique énergétique, vaccin et changements climatiques, la moindre information est traitée avec autant de circonspection qu'un coup de bâton de baseball sur la tête. Je vois tellement de demi-vérités, de discours fallacieux et tendancieux, d'analyses bâclées et carrément de pures faussetés dans l'espace public que je me demande si les standards intellectuels de certains cursus universitaires sont insuffisants ou carrément existants. Pour peu, je me croirais dans une pièce de Ionesco. On en rirait si les décisions de la classe politiques n'étaient basées sur de telles opinions. Cela fait vraiment peur! Pour certains diplômés universitaires, les exigences professionnelles demandent que l'on soit compétent face à des standards internationaux ou afin de ne pas risquer la vie d'autrui. Les exigences académiques répondent à ces standards. Dans ces conditions, obtenir son diplôme exige beaucoup d'efforts et d'abnégation. Il semble que pour certains ce ne soit ni l'un, ni l'autre. À mon avis, le jour où tous les diplômes seront plus que des bouts de papier,  la question des frais de scolarité sera tout à fait secondaire. Malheureusement, ce n'est pas pour demain.

Yvan Dutil, PhD, Québec

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Ce serait un frein

Je suis étudiant à la maîtrise à l'Université de Sherbrooke. Provenant de l'Abitibi, j'ai effectué mon parcours scolaire grâce aux prêts et bourses qui m'ont permis de sortir de ma région pour étudier dans un domaine non disponible là-bas. Le discours des recteurs, du Conseil du patronat et des autres chantres du néolibéralisme me donne des ulcères ces derniers temps. Sophismes, apories et mensonges, c'est ce que je retiens de leurs approches. En un premier temps, nous devons nous demander en tant que société si l'éducation est importante. Je crois que oui. Avons-nous les moyens de nous payer un système d'éducation accessible? Bien sûr, la preuve nous n'avons jamais été aussi riches. Notre PIB augmente sans cesse, nous avons augmenté nos actifs, nous possédons les technologies de pointe. L'éducation devient alors un choix, ou on le considère comme n'importe quelle marchandise et on le vend selon le marché ou on considère que c'est ce qui forme la base de notre société et on évite de le soumettre aux forces économiques. Je ne pense pas que la proposition du Parti libéral soit intelligente. Si le coût de l'université avait été à la moyenne canadienne au début de mes études, je ne suis pas certain que j'aurais foncé. C'est un frein, sauf pour les familles riches. Est-ce là le but recherché, garder l'éducation supérieure aux seules classes riches du Québec?

Maxime V-Landry

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Qui doit payer?

Je sympathise sincèrement avec certains étudiants qui en arrachent financièrement; je crois toutefois qu'on a tendance à généraliser les problèmes financiers des étudiants ou à tout le moins, à minimiser voire même passer sous silence leur incapacité à gérer un budget. Une enquête publiée ce matin faisait état du fait que 56% des étudiants qui ont recours aux prêts et bourses possèdent une voiture personnelle, qu'ils dépensent en moyenne 1200$ par année pour des voyages;  promenez-vous dans les universités le midi et tentez de compter combien d'étudiants apportent leur lunch par rapport au nombre qui dépensent 5-6-7$ pour un sandwich, sortez dans les bars la fin de semaine, vous verrez combien les étudiants dépensent en alcool. Sans compter les téléphones cellulaires et les téléphones intelligents qui leur coûtent des dizaines et des dizaines de dollars par mois et des cafés de Starbuck's à 4$ pièce! Quand on nous parle des étudiants endettés, on nous parle presque toujours de l'étudiant dans la situation extrême d'un père de famille de deux enfants qui veut terminer ses études à temps plein. Je ne dis pas, et loin de moi l'idée que tous les étudiants sont riches, mais je crois qu'on doit aider généreusement ceux qui ont des difficultés financières sérieuses. Mais ne demandez pas à la société de financer les études de l'ensemble des étudiants à même les impôts des gens qui ne peuvent même pas espérer avoir le revenu que ces jeunes auront une fois leur diplôme obtenu. J'ai toujours l'impression d'entendre parler des enfants gâtés! La solution est simple:  une hausse substantielle des frais de scolarité jumelée à une hausse substantielle de bourses (et non de prêts) pour les étudiants qui sont véritablement dans le besoin. Les étudiants n'ont pas à avoir le niveau de vie des jeunes travailleurs, ils étudient! Quand ils travailleront, ils se paieront le reste des voitures et des voyages.

D. Moreau

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L'éducation pour tous

Je suis étudiant à la maîtrise à l'Université de Sherbrooke. Provenant de l'Abitibi, j'ai effectué mon parcours scolaire grâce aux prêts et bourses qui m'ont permis de sortir de ma région pour étudier dans un domaine non disponible là-bas. Le discours des recteurs, du Conseil du patronat et des autres chantres du néolibéralisme me donne des ulcères ces derniers temps. Sophismes, apories et mensonges, c'est ce que je retiens de leurs approches. En un premier temps, nous devons nous demander en tant que société si l'éducation est importante. Je crois que oui. Avons-nous les moyens de nous payer un système d'éducation accessible? Bien sûr, la preuve nous n'avons jamais été aussi riches. Notre PIB augmente sans cesse, nous avons augmenté nos actifs, nous possédons les technologies de pointe. L'éducation devient alors un choix, ou on le considère comme n'importe quelle marchandise et on le vend selon le marché ou l'on considère que c'est ce qui forme la base de notre société et l'on évite de le soumettre aux forces économiques. Je ne pense pas que la proposition du Parti libéral soit intelligente. Si le coût de l'université avait été à la moyenne canadienne au début de mes études, je ne suis pas certain que j'aurais foncé. C'est un frein, sauf pour les familles riches. Est-ce là le but recherché, garder l'éducation supérieure aux seules classes riches du Québec?

Maxime V-Landry

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Aux étudiants de débourser davantage!

Le débat sur les frais universitaires a été entendu des dizaines de fois, depuis des lunes. Voici un autre exemple de procrastination québécoise, d'un Québec qui tourne en rond, incapable de bouger. Oui! Les étudiants devront débourser davantage pour les leurs études et aider au financement des universités, selon un régime de frais modulés et avec bourses, lui aussi abondamment étudié. Le discours actuel des leaders étudiants, mal articulé et mal prononcé, sent le corporatisme à plein nez, l'individualisme fumant. Que le gouvernement passe à l'action! Le débat est fait!

Michel Lebel, ancien professeur d'université

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Payons après le diplôme

Les frais de scolarité au Québec sont beaucoup moins élevés que dans la majorité des autres provinces au pays. C'est une réalité connue de tous et depuis fort longtemps. Il faut donc les augmenter, mais pas au point d'empêcher des talents non fortunés de se scolariser. Il ne faut donc pas faire payer la note uniquement aux étudiants actuels. Il faudrait penser mettre à contribution surtout les ex-étudiants diplômés qui ont pu profiter jadis d'une instruction à un prix modeste. Aujourd'hui, plusieurs de ceux-ci gagnent des salaires forts respectables, si on se fie à la Presse Affaires dans l'édition du 7 décembre. Le gouvernement pourrait donc penser imposer davantage les diplômés au prorata de leur revenu. Pourquoi pas! Étudiant, tu n'es pas fortuné, tu paies peu. Diplômé, plus fortuné, tu paies plus!

Michel Villeneuve