Tous les regards sont tournés vers les traitements et vaccins expérimentaux pour lutter contre le virus Ebola, depuis que l'Organisation mondiale de la santé (OMS) a statué qu'il est éthiquement acceptable de les administrer aux malades. Il ne faudrait pas perdre de vue pour autant la priorité, qui est de stopper l'épidémie qui tue, en ce moment, en Afrique de l'Ouest.

Voilà déjà un mois que l'organisation Médecins sans frontières (MSF) a sonné l'alarme, qualifiant l'épidémie de «hors contrôle». La semaine dernière, l'OMS a décrété «une urgence sanitaire de portée mondiale».

Mais sur le terrain, les fonds, l'équipement et le personnel ne sont pas suffisants. «Qui a envie de venir ici? On est à risque en permanence», a parfaitement résumé la présidente de MSF, Johanne Liu, dans une entrevue accordée à La Presse depuis la Guinée.

La clé pour limiter la propagation du virus repose dans l'éducation et la sensibilisation. Les interventions doivent aussi être faites dans des conditions sanitaires appropriées.

Pourtant, au cours des derniers jours, c'est surtout la crainte de voir le virus se répandre à d'autres pays - hors du continent africain - et les traitements non homologués qui ont retenu l'attention.

Avec un taux de mortalité dépassant les 50%, il est compréhensible que le virus inspire la crainte. Cependant, tout en étant réel, le risque est limité pour des pays comme le Canada.

D'un, le virus ne se transmet pas aussi aisément que celui de la grippe. Il faut avoir été en contact avec le fluide corporel d'un malade (sang, salive, urine). De deux, le protocole de surveillance permettrait, le cas échéant, d'identifier rapidement un malade. Et de trois, nos hôpitaux disposent de l'équipement nécessaire pour isoler le patient.

La situation est bien différente dans les pays africains touchés.

Les traitements expérimentaux suscitent quant à eux beaucoup d'espoir depuis que deux travailleurs humanitaires américains ont pris du mieux après en avoir reçu une dose. On oublie cependant qu'un prêtre espagnol ayant lui aussi reçu un traitement est décédé.

Depuis, l'ampleur de la crise - qui a fait plus d'un millier de morts à ce jour - a incité l'OMS à déclarer «éthiquement acceptable» l'administration d'un traitement qui n'a pas été testé sur des humains, pourvu que le consentement soit éclairé.

Mais l'organisation a omis de répondre à une question cruciale: qui doit en bénéficier en priorité?

Les doses accessibles sont malheureusement en quantité limitée. Il faudra des mois pour en produire davantage. Même chose pour le vaccin expérimental rendu disponible par le Canada.

L'ennui est que le virus Ebola, bien que mortel, n'a fait «que» 2000 victimes depuis 40 ans. C'est beaucoup moins que des maladies comme le sida ou la malaria.

Résultat, en dehors des épisodes de crises, la recherche suscite moins d'intérêt et peine à obtenir du financement pour permettre le développement de traitements et de vaccins. C'est pourtant la seule façon d'espérer, un jour, éradiquer le virus Ebola.

S'il y a une leçon à tirer de la crise actuelle, c'est bien celle-là.