Chaque année depuis neuf ans, le Québec vit le psychodrame du palmarès des écoles secondaires.

Bon an mal an, les enseignants et les directions d'écoles publiques protestent tandis que les meilleures écoles privées, elles, se réjouissent discrètement. Quant aux parents qui ont les moyens financiers d'envoyer leur enfant au privé, ils s'échangent les publications qui diffusent ces fameux palmarès, animés qu'ils sont par ce désir incontrôlable d'offrir ce qu'il y a de mieux à leur enfant.

Cette année la controverse est amplifiée puisqu'il y a non pas un, mais deux palmarès: celui de l'Institut Fraser ET celui de l'Institut économique de Montréal (IEM), la nouveauté étant que ce dernier a ajouté un indicateur permettant d'évaluer l'impact que l'école peut avoir sur les résultats académiques de ses élèves.

 

Mais ce nouvel indicateur ne calmera pas la grogne. Mardi, les syndicats d'enseignants, les commissions scolaires, les établissements privés et même les comités de parents ont uni leurs voix pour condamner les deux palmarès. Selon eux, ils sont démotivants pour les écoles qui se classent mal en plus d'accentuer le clivage public-privé dans la société québécoise.

Ils n'ont pas tout à fait tort. Il est vrai que ce genre de classement fausse la réalité des écoles québécoises. Mais alors, pourquoi ne pas proposer d'alternative?

Il est bien évident qu'un classement des écoles ne réussira jamais à décrire l'atmosphère d'une classe, le dévouement d'un professeur ou les efforts admirables d'un groupe d'élèves en difficulté.

Les parents ne sont pas idiots, ils savent bien que ces classements ne sont que des indicateurs qui cachent des réalités plus complexes.

Le problème, c'est que les palmarès comblent un vide. Avouons-le, les parents n'ont pas beaucoup d'information à se mettre sous la dent lorsque vient le temps de choisir une école secondaire pour leur enfant. Les commissions scolaires envoient une brochure sans couleur et sans saveur, les établissements privés se paient une belle publication sur papier glacé qui ne dit pas grand-chose, et les écoles qui en ont les moyens organisent des soirées porte ouverte. C'est tout. Pour une catégorie de parents plus exigeants, il semble que ce ne soit pas suffisant. Ils ont besoin de plus de détails pour choisir l'établissement que fréquentera leur enfant durant cinq ans. À défaut d'en trouver, ils se rabattent sur les fameux palmarès.

On peut bien critiquer l'idéologie néolibérale qui a favorisé une telle compétition dans le milieu de l'éducation, blâmer les parents qui en font trop ou encore, dénoncer cette tendance de plus en plus répandue à vouloir «magasiner» l'école de son enfant. La vérité, c'est qu'il y aura toujours des parents qui utiliseront les palmarès pour se faire une opinion.

À moins qu'on ne leur offre un autre outil d'information...

Une fois le choc du premier palmarès passé, on aurait pu croire (et espérer) que le secteur public riposterait en proposant à son tour des outils d'information plus complets, pertinents et vantant les bons coups de ses écoles partout dans la province. Il n'a pas réagi. Aujourd'hui, les syndicats d'enseignants et les commissions scolaires se drapent dans leur indignation pour dénoncer les classements. Or, c'est en grande partie à cause de leur inaction que ces palmarès sont si populaires.