Selon toute apparence, on aura assisté dans la nuit de mardi à hier, en France, à la stricte application d'une loi tacite interdisant le blasphème. C'est sous cet angle qu'il faut voir l'attentat dirigé contre Charlie Hebdo. Rebaptisé pour l'occasion Charia Hebdo et affichant un Mahomet hilare, le périodique se proposait de dénoncer le danger d'un détournement islamiste du printemps arabe.

On l'aura puni.

L'affaire survient cinq ans après celle des caricatures danoises de Mahomet, alors que l'hebdo satirique français avait pris la défense de la liberté d'expression en publiant ces dessins. À ce moment-là aussi, il en avait payé le prix, non par l'incendiat, mais par la persécution judiciaire.

Cette fois-ci, il devient par trop évident que l'importance du droit à la parole est, en certains lieux, fort mal évaluée.

Ne parlons même pas des fondamentalistes enclins à la violence. Voyons seulement une institution par définition modérée, le Conseil français du culte musulman, qui a pesamment rappelé, hier, que «le fait de caricaturer le prophète est considéré comme une offense pour les musulmans».

Un instant!

Il n'existe pas en Occident de droit à ne pas être offensé. La religion - aucune religion - ne commande de respect particulier; ni n'est à l'abri de la critique, de l'humour, de la satire, de la dérision. À ce point de vue, l'islam n'est pas différent des autres cultes, Mahomet pas différent des autres prophètes.

Et rien de cela ne peut changer.

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On n'a peut-être pas toujours pensé ainsi. Mais peu de gens doutent, aujourd'hui, que Charlie Hebdo n'a fait que son travail et qu'il sera de son devoir de récidiver lorsque l'actualité le commandera.

Les événements se sont en effet précipités en Europe.

On y a vécu attentats, assassinats, appels au meurtre, menaces et désordres. Les dangers du prosélytisme islamiste, porté par la démographie, sont maintenant avérés. On a compris que la machine à intégrer fonctionne mal dans certaines communautés, autant en Grande-Bretagne qu'en Suède. Et on observe que, dans les anciennes colonies nord-africaines, une seconde vague de libération est menacée par le fondamentalisme.

Bref, il y a eu choc.

Si l'ordre de grandeur n'est pas le même, le Québec subit un choc de nature similaire avec le procès Shafia qui s'instruit actuellement à Kingston. S'ajoutant à d'autres faits troublants (dont l'arrestation, pour exportation d'armes vers Beyrouth, d'une des femmes voilées jadis envoyées en... mission de paix à Hérouxville !), la mort des quatre Afghanes fait réfléchir et force à évoluer: peut-être l'«islamophobie» n'explique-t-elle pas tout, n'est-ce pas?

Chose sûre, chacun se rend maintenant compte que des enjeux fondamentaux, liberté et égalité, sont en cause dans tout l'Occident et ne peuvent souffrir aucun compromis.