Devant le Parlement israélien, le premier ministre Stephen Harper a prononcé un discours limpide et ferme. On reproche souvent aux politiciens de ne pas avoir de convictions; en ce qui a trait à la politique étrangère du Canada, en particulier au sujet du Proche-Orient, M. Harper a des idées claires et il les défend avec aplomb. Le seul problème, c'est que ce point de vue tranché n'est pas fidèle à l'opinion, beaucoup plus nuancée, d'un grand nombre de Canadiens.

Pour notre part, nous endossons certains des principes exposés hier par le premier ministre. C'est le cas du droit d'Israël d'exister et de se défendre. Du fait qu'on ne peut pas faire reposer sur les seules épaules de l'État juif les problèmes de la région, notamment ceux des Palestiniens. De l'hypocrisie des pays qui dénoncent systématiquement Israël - entre autres à la tribune des Nations unies - sans jamais faire référence à l'intransigeance de certains groupes palestiniens et aux abus commis par d'autres États.

Cela dit, comme bien des Canadiens, nous estimons que les dirigeants israéliens s'y prennent souvent mal pour faire valoir les droits de leur peuple devant l'opinion internationale. Nous déplorons que Tel-Aviv n'agisse pas toujours de façon à faciliter la conclusion d'un accord de paix avec les Palestiniens. La politique de colonisation de la Cisjordanie et de Jérusalem-Est nous semble particulièrement néfaste. Quand notre premier ministre n'exprime aucune de ces réserves, il ignore la diversité de points de vue existant au Canada sur ces sujets.

Aux députés israéliens, M. Harper s'est contenté de dire qu'«aucun État n'est à l'abri d'un questionnement ou d'une critique.» Le premier ministre israélien, Benyamin Netanyahou, a loué le «courage» de son invité. Le véritable courage aurait consisté à dire que malgré son soutien solide à Israël, la population canadienne s'interroge sur le bien-fondé de certaines de ses politiques. Il y a moyen de dire cela sans tomber dans l'excès des pays européens qui, pour protester contre la construction de nouvelles habitations en territoires occupés, ont convoqué les ambassadeurs israéliens, un signal diplomatique disproportionné.

Heureusement, le gouvernement conservateur est parvenu à maintenir des rapports cordiaux avec l'Autorité palestinienne. M. Harper a rencontré hier son chef, Mahmoud Abbas, et a annoncé une aide supplémentaire aux Palestiniens.

«Autant nous soutenons sans réserve le droit d'Israël de se défendre, autant nous préconisons depuis longtemps un avenir juste et sûr pour le peuple palestinien», a déclaré le premier ministre canadien à la Knesset. Bien. Malheureusement, son appui sans réserve au gouvernement Netanyahou ne contribue pas à rendre plus probable un tel avenir.