Selon un sondage CROP-La Presse, six résidents de la région de Montréal sur 10 s'opposent à l'instauration d'un péage sur le futur pont Champlain. Parmi les banlieusards, l'opposition est encore plus forte: 69%. La même enquête révèle que 65% des répondants souhaitent la tenue d'un concours international d'architecture pour la conception de l'ouvrage. Autrement dit, les Montréalais rêvent d'un superbe pont... mais ne veulent pas en payer le prix. Du moins pas sous la forme d'un péage.

Autant pour financer les nouvelles infrastructures dont la région a besoin que pour mieux gérer la circulation, le péage est un outil incontournable. Il permet non seulement de recueillir des sommes substantielles, mais aussi de réguler les flots, par exemple en fonction de l'heure et pour inciter à l'usage des transports collectifs. 

Cependant, il tombe sous le sens qu'il faut réfléchir au péage dans le cadre d'une stratégie régionale. Instaurer un péage sur un seul ouvrage aggraverait une situation déjà difficile en détournant une partie de la circulation vers les voies gratuites.

Il y a longtemps que le gouvernement du Québec et les décideurs de la métropole auraient dû s'atteler à la tâche de concevoir un système de péage sur les axes autoroutiers de la région. Aujourd'hui, en raison de l'urgence de remplacer le pont Champlain, il y a péril en la demeure. Le gouvernement semble conscient du problème, mais il sait que convaincre la population sera très difficile. D'autant plus que le nouveau maire de Montréal, Denis Coderre, s'est prononcé contre les péages pendant la campagne électorale.

Le gouvernement du Canada, lui, fait cavalier seul. On a l'impression que le ministre de l'Infrastructure, Denis Lebel, fixera le niveau du péage sur le nouveau pont Champlain suivant le seul critère de la rentabilité du partenaire privé du PPP. Québec et la région seront placés devant un pont accompli.

M. Lebel aime rappeler que le pont Champlain est de responsabilité fédérale. Alors que le gouvernement canadien agisse de manière responsable! Cela implique qu'il travaille main dans la main avec le gouvernement de la province et les municipalités concernées. Ce n'est pas en répétant son mantra «Pas de péage pas de pont» que M. Lebel convaincra qui que ce soit.

Les oeillères d'Ottawa ne doivent pas servir de prétexte à l'inaction de Québec et de la région métropolitaine. À l'occasion de la publication prochaine de sa politique de mobilité durable, le ministre des Transports, Sylvain Gaudreault, devrait lancer franchement la discussion avec la région sur l'opportunité et les modalités d'un système de péage. Pas de péage, pas de fin à la congestion.