Lors d'une allocution prononcée mercredi à Ottawa, le chef du Bloc québécois, Gilles Duceppe, a abordé un thème cher aux leaders indépendantistes. Dans les domaines de l'énergie et de l'environnement, a soutenu M. Duceppe, les intérêts du Québec et du reste du Canada sont «de plus en plus divergents». Le Québec est le meilleur élève du pays en ce qui a trait aux émissions de gaz à effet de serre (GES), tandis que les autres provinces sont des cancres. Le Québec veut se libérer de sa dépendance au pétrole tandis que le reste de la fédération adopte une politique «tout au pétrole».

Il ne fait pas de doute que le Québec, grâce à ses imposantes richesses hydrauliques, fait très bonne figure dans la lutte aux changements climatiques. Cependant, outre cet avantage naturel, les différences entre le Québec et plusieurs autres provinces sont loin d'être aussi considérables que le laisse entendre le chef bloquiste. Par exemple, les émissions de GES de l'Ontario sont de 15,4 tonnes par habitant, un taux beaucoup plus proche de celui du Québec (11,1) que de celui de l'Alberta (70,7). De plus, les émissions de GES par personne ont baissé en Ontario par rapport à ce qu'elles étaient en 1990.

Les émissions par personne de la Colombie-Britannique sont aussi à un niveau similaire à celles du Québec (14,4 tonnes). Les émissions per capita de la Nouvelle-Écosse et du Nouveau-Brunswick sont deux fois plus élevées que celles du Québec tout simplement parce que ces provinces n'ont pas la chance d'avoir un potentiel hydroélectrique important.

La grande majorité des provinces du pays sont en train de développer leur secteur éolien, comme le fait le Québec. En Ontario, la puissance installée approche le double de celle des parcs éoliens construits dans notre province.

En matière de transport, comme l'a noté M. Duceppe, le Québec ne fait pas bande à part puisque «un consensus de plus en plus large émerge en Amérique du Nord, avec la Colombie-Britannique, le Manitoba, l'Ontario et 15 États américains». Les trois provinces nommées par le leader du Bloc représentent plus de 70% de la population du reste du Canada... Tout au pétrole, vraiment?

Comme dans tout grand pays, il y a au Canada des différences géographiques et économiques entre les diverses régions de sorte qu'il n'est pas aisé de réconcilier les intérêts des unes et des autres. Il en est de même au Québec. Beaucoup de Montréalais sont sans doute hostiles à l'exploitation de l'amiante, mais ce n'est évidemment pas le cas des gens de Thetford Mines. Bien des Gaspésiens rêvent du jour où on trouvera du pétrole sous le golfe du Saint-Laurent; que dira-t-on alors dans les salons du Plateau et d'Outremont?

Exagérer les différences entre les autres provinces et le Québec dans le domaine de l'environnement permet de dépoussiérer la thèse indépendantiste. Il s'agit toutefois d'une tromperie.