Le gouvernement Marois a créé un précédent en nommant le nouveau délégué général à New York, André Boisclair, à un poste de sous-ministre également. Ce faisant, l'ex-chef du Parti québécois obtient la sécurité d'emploi à vie et un généreux régime de retraite. Croyez-vous que cette décision est acceptable ou qu'elle est plutôt de nature à alimenter le cynisme des citoyens à l'endroit de leurs gouvernants?

Michel Kelly-Gagnon

PDG de l'Institut économique de Montréal, il s'exprime à titre personnel.



UN COÛT POTENTIELLEMENT HALLUCINANT



Sans être aucunement un ami proche, j'ai par ailleurs une relation fort cordiale avec André Boisclair et j'ai beaucoup d'estime pour lui. Je pense qu'il s'agit d'une excellente nomination pour le poste de délégué général du Québec à New York et lui souhaite le meilleur des succès dans son nouveau rôle. De plus, il est tout à fait normal que M. Boisclair et des personnes d'un tel calibre puisse être bien payées, voire même très bien payées. Par contre, il me semble qu'il aurait été préférable d'offrir un salaire plus élevé que celui qui lui sera officiellement octroyé (mais dont le coût global aurait été clair et transparent), plutôt que de souscrire, au nom des contribuables, à des obligations financières à long terme dont le quantum est indéterminé. Je souhaite longue vie à André Boisclair, et ceci n'est absolument pas un commentaire sarcastique. Toutefois, s'il vit jusqu'à 92 ans, par exemple, le coût global lié à la rémunération de cette nomination d'à peine quelques années risque d'être assez hallucinant.

Michel Kelly-Gagnon

Francine Laplante

Femme d'affaires.



UNE FORME DE CORRUPTION



Je dois être très prudente dans mon choix de mots, car si j'exprimais exactement ma pensée, vous ne pourriez pas publier ma réponse. Je vais me contenter de dire que c'est vraiment une insulte à notre intelligence! Dites-moi ce qu'il a fait de plus que les autres pour mériter de telles conditions? Bien, voyons donc! Le gouvernement Marois a vanté allègrement la transparence des actions gouvernementales et s'est engagé à faire la lutte contre la corruption, alors je ne comprends pas pourquoi il a essayé de nous en passer une petite vite! Je considère cette double nomination comme une forme de corruption! Il ne faut pas être gêné pour offrir de telles conditions bonbon et il faut manquer de scrupules pour les accepter! Durant ce temps, le ministre des Finances nous répète que nous sommes dans la dèche, que le gouvernement doit sacrifier des projets et des engagements et que nous devons accepter de nous serrer la ceinture! Quelle incohérence! Dire que Moisson Montréal ne fournit pas à la demande tellement les cas de pauvreté extrême sont nombreux! Une chose est certaine : M.Boisclair, lui, n'aura jamais faim!

Jean Gouin

Directeur général de la Fédération des médecins résidents du Québec.



UN BON COUP



La très récente double nomination d'André Boisclair au poste de sous-ministre adjoint aux relations internationales et comme délégué général du Québec à New York font beaucoup jaser. Les avis sur ces deux nominations pour un seul homme sont partagés et l'on trouvera toujours quelque chose à dire et à redire. André Boisclair est encore jeune et constitue, selon moi, un excellent choix pour exercer les fonctions de délégué général du Québec à New York. Il possède une expérience des plus variées et son sens politique constitue un avantage qui n'est pas à négliger dans un tel poste. De plus, il fait partie de la famille péquiste, ce qui lui permettra de bien représenter les intérêts du gouvernement actuel dans la grosse pomme. Le fait qu'il ait été nommé à un poste de sous-ministre adjoint presque simultanément à sa nomination politique porte à confusion. Par ailleurs, ce n'est pas la première fois que des fonctionnaires de carrière sont nommés comme délégué général dans différents pays. Il est vrai qu'il bénéficiera de la sécurité d'emploi et d'une généreuse pension, mais pour avoir des gens qui sauront bien nous représenter sur la scène internationale, il faut parfois y mettre le prix. André Boisclair, peu importe sa couleur politique, est un atout que le gouvernement de Mme Marois saura utiliser à bon escient.

Jean Gouin

Jean-Pierre Aubry

Économiste et fellow associé au CIRANO.



PLUS ÇA CHANGE, PLUS C'EST PAREIL



Les partis d'opposition promettent souvent une meilleure gestion avec plus de transparence, moins de partisanerie et une meilleure reddition de comptes. Cependant, une fois qu'ils prennent le pouvoir, ils font comme leurs prédécesseurs et ils laissent tomber à plusieurs occasions ces trois principes/promesses. Il est clair que le gouvernement a manqué à son devoir de transparence sur les conditions d'emploi et de rémunération de M. Boisclair lors de l'annonce de son engagement à titre de délégué général à New York. Ce que le gouvernement vient de signer avec M. Boisclair est un contrat à long terme pour un poste de délégué général, avec la possibilité de postes futurs au niveau de sous-ministre, incluant le bénéfice d'une pension provenant du régime de retraite des hauts fonctionnaires. Des actuaires pourraient évaluer la valeur présente des revenus de travail et de retraite engendrés par ce contrat. Celle-ci est probablement très élevée et elle devrait être connue du public. Le gouvernement prend également un risque sur la performance futur de M. Boisclair dans ces postes. Normalement, un bon employeur veut évaluer pendant un certain temps la performance d'un nouvel employé dans le type de travail qu'il fera, avant de signer un contrat à long terme à un haut taux de rémunération.

Jean-Pierre Aubry

Jean Bottari

Préposé aux bénéficiaires.



COMME LES LIBÉRAUX



Comme la plupart des intervenants s'étant exprimés sur les nominations d'André Boisclair par Mme Marois ,je n'ai rien à redire concernant ses compétences. Je crois que son bagage politique et intellectuel sont garants d'un haut fonctionnaire des plus compétents. Là ou j'ai un problème, c'est avec le fait que Pauline Marois, lors de la récente campagne électorale nous disait vouloir faire de la politique autrement afin, entre autres, de mettre fin au cynisme que nous entretenons face à nos élus. Or en nommant M Boisclair à la fois aux postes de délégué général du Québec à NewYork et de sous-ministre adjoint, Pauline Marois alimente, comme l'ont fait les libéraux sous Jean Charest, notre méfiance et notre cynisme envers toute la classe politique. Elle qui, en tant que chef de l'opposition officielle, dénoncait sur toutes les tribunes les nominations partisanes du PLQ, agit de la même façon en accordant sur un plateau d'argent à un «ami» du PQ deux postes prestigieux qui lui garantissent une permanence, un bon salaire et un généreux fonds de pension payés par vous et moi, les contribuables.

Donald Riendeau

Avocat et éthicien.



PANTOUFLAGE DANS LA FONCTION PUBLIQUE



En 1984, John Turner et Pierre Trudeau procédaient à une série de 225 nominations partisanes. Le pantouflage et le favoritisme ont toujours existé. Certains pourraient par conséquent se réjouir devant le nombre peu élevé de récentes nominations partisanes. Il y a certes un peu plus de gêne, mais les vieux réflexes demeurent au rendez-vous. Dans cette période sombre du Québec, les citoyens n'ont jamais autant eu besoin de faire confiance. Cependant, jour après jour ils sont déçus devant le manque d'exemplarité de leurs plus hauts dirigeants. Encore une fois, il nous faudra attendre que la marmite citoyenne déborde pour changer cette pratique. Un autre enjeu important est celui de l'éthique des régimes de retraite. Près des trois quarts des citoyens payent des retraites en or aux employés municipaux et de la fonction publique. Nous savons tous que cette pratique sera impossible à maintenir et nous conduira vers un fossé et des conflits entre les citoyens. Mais comment demander à des élus qui bénéficient de conditions comparables d'oser une remise en question ? La retraite hors norme accordée à M. Boisclair est un signal dangereux et inquiétant en regard de cet enjeu si important.

Photo fournie par Donald Riendeau

Donald Riendeau.