La défaite des libéraux dans leur château fort d'Argenteuil est-elle de mauvais augure pour le gouvernement Charest aux prochaines élections générales ? LES COMMENTAIRES DOIVENT ÊTRE SIGNÉS.

Léo Bureau-Blouin

Ex-président de la Fédération étudiante collégiale du Québec



UN PARTI EN DÉROUTE



Les résultats électoraux dans Argenteuil confirme que l'heure est grave pour les libéraux. Bien sûr, on ne peut appliquer intégralement les résultats d'Argenteuil à d'éventuelles élections générales, mais on peut néanmoins dessiner une tendance lourde. Un nombre important d'électeurs libéraux semble bouder les urnes ou même se tourner vers d'autres partis. C'est là le résultat d'un parti usé par le pouvoir et les scandales. On dit parfois des électeurs qu'ils ont la mémoire courte, mais après neuf ans de règne, ils finissent par se rappeler de deux ou trois petites choses. Orford, Suroît, écoles juives, gaz de schiste, octroi de places en garderie, collusion avec les firmes de génie-conseil, crise étudiante, la liste est longue et le bilan, peu reluisant. Les dés ne sont pas joués, mais disons que les libéraux devront travailler très fort pour faire oublier leurs dernières frasques aux électeurs en quête de changement.

PHOTO: MARCO CAMPANOZZI, LA PRESSE

Léo Bureau-Blouin

Richard Vigneault

Consultant en communication

MATCH NUL

Les électeurs d'Argenteuil ont opté pour le candidat péquiste en lui accordant quelques centaines de votes de plus qu'à son adversaire libérale. Compte tenu de la position difficile dans laquelle se trouve le gouvernement, plusieurs s'étonneront de la faiblesse de l'appui au PQ. La CAQ doit se demander si le résultat d'Argenteuil, qui place son candidat bon troisième, ne deviendra pas le « pattern » aux élections générales. LaFontaine est un cas atypique tant par l'anémie du taux de participation que pour les raisons qui ont rendu le siège de Tony Tomassi vacant. La victoire du président du PLQ est à la fois un baume pour le gouvernement et une source d'inquiétude sur sa capacité à mobiliser ses partisans sur une plus grande échelle. À la lumière de l'agitation sociale des derniers mois, il est difficile de prétendre que les électeurs d'Argenteuil s'en sont tenus à des enjeux locaux ! Il est pourtant encore plus difficile d'interpréter ces deux résultats comme un verdict clair sur la situation actuelle. C'est donc un match nul. Aucun des partis n'a encore formulé une proposition crédible pour sortir le Québec de la crise de confiance. Des élections générales auront le mérite de clarifier ces enjeux.

Richard Vigneault

Denis Boucher

Associé au sein d'un cabinet de relations publiques

CASSE-TÊTE STRATÉGIQUE

La CAQ a vraiment fait office de trouble-fête pour le PLQ. Ne serait-ce de la présence du parti de François Legault, le PLQ aurait conservé la circonscription d'Argenteuil. Les résultats sont néanmoins une catastrophe pour la CAQ. Malgré un candidat vedette, le parti arrive troisième dans Argenteuil. Parlons aussi de « l'éclatante performance » de Québec solidaire. Il semble vraiment que ce parti ne va nulle part et que les frasques de M. Khadir n'ont pas l'heur d'accroître les appuis au parti. Le PQ a perdu dans LaFontaine et on ne peut parler d'une victoire écrasante dans Argenteuil, mais c'est quand même la première fois depuis les années 60 que cette circonscription aura une autre couleur que le rouge. Le PLQ se retrouve donc devant un casse-tête stratégique. Contrairement au PQ qui ne perd pas beaucoup de votes à Québec solidaire, le PLQ semble perdre un assez grand nombre de votes à la CAQ qui, cependant, n'en recueille pas assez pour aller chercher des sièges, mais suffisamment pour en faire perdre un grand nombre aux libéraux. Ça promet pour les prochaines élections. Espérons que les citoyens se donneront la peine d'aller voter.

Denis Boucher

Jean Gouin

Directeur général de la Fédération des médecins résidents du Québec

PAS DE QUOI PAVOISER

Le résultat de l'élection partielle dans Argenteuil doit servir d'avertissement au Parti libéral du Québec. Mais c'est possiblement la seule conclusion à laquelle on peut arriver lorsqu'on compare les statistiques des élections générales de 2008 à l'élection partielle de lundi dernier, dans cette forteresse libérale supposément imprenable. La satisfaction de Pauline Marois est compréhensible. Le PQ a installé un des siens dans cette circonscription qui arborait fièrement le rouge depuis les 46 dernières années. Bien que le résultat obtenu par les libéraux dans Argenteuil ne doit pas être pris à la légère, le PQ doit réaliser à son tour que le taux de participation a diminué de 12 % dans Argenteuil, malgré la progression du nombre d'électeurs qui a augmenté de près de 6 %. Le pourcentage de votes qui est allé au PQ ne représente que 3 % de plus qu'aux dernières élections générales. C'est une bien mince consolation pour les péquistes. Les électeurs d'Argenteuil ont possiblement traduit le ras-le-bol des Québécois face au gouvernement Charest. Quand on analyse les résultats dans LaFontaine, le PQ est arrivé bon deuxième avec deux points de moins qu'à l'élection de 2008. Vraiment pas de quoi pavoiser. Le vrai test sera possiblement à l'automne.

Jean Gouin

Caroline Moreno



Écrivain et comédienne



DÉMISSION PRÉVENTIVE

Jean Charest ne peut déclencher la tenue d'élections générales : il doit démissionner. Les électeurs d'Argenteuil le lui ont dit ; les citoyens le lui répètent chaque jour depuis le début du printemps érable. Le conflit, amorcé en février 2012, a pris les proportions d'une à guerre à finir à l'endroit d'un premier ministre qui a renié son serment de loyauté à l'égard du peuple auquel il a promis d'exercer ses fonctions avec honnêteté et justice dans le respect de la constitution du Québec. La trahison de Jean Charest envers les Québécois exige qu'il parte. Pour la suite des choses, qui vivra votera...

Caroline Moreno

Mélanie Dugré



Avocate

UN AVERTISSEMENT



Cette défaite laisse sûrement un goût amer dans la bouche des libéraux et confirme que ce qui a débuté en débat sur la hausse des droits de scolarité, sujet sur lequel le gouvernement Charest bénéficie pourtant de l'appui de la population, a désormais dégénéré en une grogne rageuse et une insatisfaction généralisée à l'égard des élus. Ce gouvernement aura au fond été l'artisan de son propre malheur en laissant le Québec s'enliser dans une crise dont il semble incapable d'émerger. Le printemps érable sera devenu l'occasion d'une grande thérapie collective pour la population qui, soir après soir, exprime à coups de cuillère sur ses casseroles son profond ras-le-bol face à un gouvernement usé et fatigué. La défaite dans un château fort libéral constitue un avertissement pour Jean Charest et une invitation à prendre ses adversaires au sérieux. Les libéraux pourront-ils maintenant renverser la vapeur? À défaut d'abandonner leur ton condescendant et leur froide indifférence, j'en doute. Les membres de ce gouvernement ont pris racine sur leurs confortables sièges de l'Assemblée nationale et ils ont perdu l'art du recul et la capacité d'introspection. Vivement un changement de direction!

Mélanie Dugré

Raymond Gravel



Prêtre dans le diocèse de Joliette et ex-député bloquiste de Repentigny



UNE DÉFAITE BIEN MÉRITÉE

Que le Parti libéral ait été défait dans Argenteuil lundi, c'est le gros bon sens qui l'a emporté. Par ailleurs, que Jean Charest ait conservé LaFontaine, c'est à se demander si les citoyens de cette circonscription vivent sur la même planète que nous. Comment peut-on aujourd'hui faire confiance à ce Parti libéral aux prises avec la crise étudiante qui s'éternise à cause de son entêtement et avec le scandale de corruption et de collusion à tous les échelons du gouvernement? Je veux bien croire qu'il y a beaucoup d'allophones dans cette circonscription, mais que leur faut-il de plus pour changer de parti ? Aussi, je trouve injuste les commentaires entendus à Radio-Canada, laissant entendre que la CAQ, le parti de François Legault, a fait perdre Jean Charest, en grugeant des votes au Parti libéral. À ce que je sache, l'opportuniste Mario Laframboise, cet ex-député du Bloc québécois, n'est sûrement pas associé de près ou de loin au fédéralisme canadien. C'est plutôt le Parti québécois qui a perdu des votes et si le PQ a gagné quand même, c'est sans doute à cause de l'écoeurantite aiguë dont souffre la majorité des Québécois et qui s'est exprimée dans les urnes. Personnellement, je suis convaincu que la circonscription d'Argenteuil est un aperçu de ce qui se passera aux prochaines élections générales. Par ailleurs, la division du vote souverainiste me fait craindre le pire scénario : les libéraux pourraient l'emporter encore une fois. Ce serait une tragédie pour tout le Québec.

Raymond Gravel

Jean Bottari



Préposé aux bénéficiaires



UN SIGNE



Bien malin celui qui peut dire ce que pensait l'électeur de la circonscription d'Argenteuil avant de prendre sa décision dans l'isoloir. La libérale Lise Proulx représentait un gouvernement usé et victime d'allégations de toutes sortes. En poste depuis 2003, le PLQ sous Jean Charest est, selon moi, une formation qui ne reflète pas les véritables valeurs libérales. Évidemment l'électeur, qui se fait trop souvent prendre pour dupe par nos élus, constate que l'actuel gouvernement a été incapable de gérer le conflit étudiant, entre autres, de façon adéquate. Il est aussi témoin des possibles dommages à notre démocratie depuis l'instauration par les libéraux de la loi 78. Cette victoire du PQ est donc un signe pour Jean Charest qui devra redoubler d'ardeur afin de convaincre une population désabusée et cynique que lui et ses troupes peuvent faire évoluer le Québec dans la bonne direction. Certes les électeurs d'Argenteuil ne sont probablement pas tous en accord avec la position de Mme Marois qui appuie la cause étudiante. Mais force est d'admettre que le résultat de ce scrutin démontre à quel point même les plus fidèles électeurs du PLQ sont las de la fermeté et l'entêtement de M. Charest et ses troupes. Il faut donc voir dans ce résultat inespéré pour le PQ que le Québécois francophone ne veut plus d'un gouvernement qui semble faire toujours a sa tête sans tenir compte de l'opinion publique. Parions que cette défaite crève-coeur incitera Jean Charest à ne pas déclencher d'élections avant la fin légitime de son mandat en 2013.

Jean Bottari