Les propos tenus par le sénateur Pierre-Hugues Boisvenu concernant le projet de loi C-10 sont pour le moins inquiétants et hautement discutables, du fait de la position qu'il occupe et du discours qu'il promulgue sur différentes tribunes.

Les propos tenus par le sénateur Pierre-Hugues Boisvenu concernant le projet de loi C-10 sont pour le moins inquiétants et hautement discutables, du fait de la position qu'il occupe et du discours qu'il promulgue sur différentes tribunes.

À titre de sénateur, M. Boisvenu occupe une position de pouvoir, de référence et d'influence sur la société canadienne et québécoise. Même hautement critiquée, la position de sénateur demeure un important levier pour l'évolution de notre société. Mais cette position exige surtout l'éthique nécessaire pour parler à partir d'une distance émotionnelle et affective nécessaire pour aborder des sujets hautement complexes et fortement émotionnels.

Or, à écouter ses propos, on reste avec la forte impression que M. Boisvenu est incapable de maintenir cette distance. Souvent, il fait référence au drame personnel qu'il a vécu. Perdre un enfant par la voie d'un meurtre est certainement le drame le plus horrible qu'il soit. Vivre avec cette perte est certainement irréconciliable. Rien ne pourra venir faire justice; rien ne pourra venir combler la perte. On reste avec l'impression que, depuis ce drame, M. Boisvenu s'est donné la mission de faire justice et de corriger les lacunes de notre système judiciaire. Cependant, un sens de mission peut également aveugler le raisonnement, et faire verser dans le champ du doctrinaire et de la pensée unique.

Quant à son discours, on voit bien qu'il est dicté par cette pensée unique et doctrinaire : tout crime doit être puni sans nuances. Tout criminel doit être puni sans aucune discrimination. Avec une telle pensée, on est proche de la dictature, celle de la justice et de la pénalisation à tout prix. Lors d'au moins une intervention antérieure (La Presse, 12 juillet 2011), M. Boisvenu mélangeait avec la même sauce d'autres problèmes sociaux qui n'ont aucun lien entre eux : la non-responsabilité criminelle, le décrochage scolaire, les accidents routiers commis par des jeunes. Le dénominateur qu'il y voyait est que personne n'est responsable de rien. Ce n'est pas ma lecture de notre société, malgré tous les problèmes qu'il peut y avoir. Il mentionnait également que la justice a pour but de ne pas camoufler la vérité. Le défi que cela soulève est que LA vérité n'existe pas. Elle est plutôt «ce quelque chose» faite de multiples nuances. Comment peut-on naviguer dans ces nuances quand on est encore habité par le drame que l'on a vécu?