Ce qui se passe au poste de Sept-Îles de la SQ nous ramène à la vieille question: qui surveille la police?

Bien sûr, tant qu'on n'aura pas identifié le gène de la vertu, il y aura des policiers croches. Ainsi va la vie.

D'un corps de police honnête, on ne s'attend pas à ce qu'il soit composé à 100% d'agents honnêtes. On s'attend par contre à ce qu'il ne tolère pas les malhonnêtes et qu'il protège ceux qui les dénoncent.

 

Aussi, le plus troublant dans l'enquête d'André Noël publiée dans La Presse hier, ce n'est pas tant la suspension de six policiers de la Sûreté du Québec à Sept-Îles (dont le patron du poste).

Le pire, peut-être, ce sont les allégations d'un septième policier, qui affirme être accusé au criminel en guise de représailles parce qu'il a dénoncé la situation pourrie à ce poste de police.

Nous sommes 10 ans après le rapport de la commission Poitras, cette vaste enquête sur la SQ.

Que disait ce rapport? Essentiellement deux choses. Premièrement, ce corps de police de plus de 4000 membres devait de toute urgence se moderniser et améliorer ses méthodes de travail brouillonnes. Deuxièmement, il lui fallait apprendre à enquêter sans complaisance sur ses déviances.

La loi a été changée, les structures bousculées, des gens déplacés. Et après 10 ans, des réformes ont eu lieu dans les escouades majeures quant aux techniques d'enquête.

Mais quant aux enquêtes sur les déviances, c'est moins certain. La mentalité change rarement grâce à une modification de règlement. Ce qui semble se passer dans ce poste de la Côte-Nord en est une illustration inquiétante.

On a suspendu cinq policiers de ce poste, dont le dirigeant, en attendant la fin d'une enquête sur de possibles agissements criminels. Des armes rendues par des citoyens, et qui devaient être détruites, auraient été revendues par les policiers, allègue-t-on. Un sixième policier est accusé devant la cour criminelle pour vol, abus de confiance et fraude. Il attend son procès depuis... trois ans!

Mais le clou: on apprend que le lieutenant Raymond Neveu, envoyé au poste en 2004 pour y mettre de l'ordre, s'est fait mettre de côté dès le début. On a refusé de lui remettre le rapport interne qui soulevait des irrégularités, même s'il était numéro deux du poste. Ça commence bien! On lui a refusé l'accès à la salle des pièces à conviction. Quand il y a mis les pieds, il y a vu un fouillis indescriptible, dit-il. Et quand il a commencé à signaler de nouvelles irrégularités, ses ennuis se sont aggravés. Il a finalement été arrêté et est accusé de menaces de mort l'an dernier.

On verra comment son histoire finira. Mais pour l'instant, elle ressemble tragiquement à celles d'autres policiers dénonciateurs ou enquêteurs internes de ce corps qui se sont heurtés à la loi du silence, qui ont été abandonnés par la direction et écartés par le syndicat. Toutes choses expliquées et dénoncées en détail dans le rapport Poitras.

Dix ans plus tard, c'est l'heure d'une mise à jour pour le ministre Dupuis.

Munitions décoratives

La Commission des libérations conditionnelles vient de permettre à un dirigeant de gang de rue d'obtenir une semi-liberté (maison de transition) expéditive, après avoir purgé seulement 6 des 39 mois de pénitencier auxquels il a été condamné. Après les prochains sept mois en maison de transition, il sera libre.

C'était sa première condamnation pour trafic de crack, complot et possession et port d'arme dans un dessein dangereux. Il n'y a pourtant «aucune raison de croire» qu'Hervé Lamarre commettra un crime violent, dit la CNLC. Risque de récidive? «Modéré».

Bon, d'accord, c'est un haut placé dans une organisation criminelle. Oui, il avait accès à une cache de drogue contenant des centaines de doses, et un appartement où étaient dissimulés 196 projectiles d'armes à feu. OK, on a trouvé chez lui trois douilles et une boîte complète de balles.

Mais rien ne prouve que Lamarre ait voulu s'en servir! Il n'a «aucune propension à la violence», de dire le commissaire. Et puis, Lamarre a expliqué que certaines des munitions retrouvées chez lui étaient simplement des décorations, des bibelots, des trophées en somme.

Nous voilà rassurés.

Je me demande quand même pourquoi ce type qui a une vision décorative des projectiles est allé en cacher une boîte dans un sac à couches. Peut-être pour les protéger de la poussière, va savoir.

Pour joindre notre chroniqueur: yves.boisvert@lapresse.ca