Pour quelqu'un qui s'est autoproclamé si longtemps, et encore récemment, orphelin politique, Paul St-Pierre Plamondon a rapidement embrassé sa nouvelle famille politique, au point de se présenter comme le digne successeur du père fondateur du Parti québécois (PQ) et de certains anciens vénérables.

« Le combat de Gérald Godin auprès des immigrants, je vais le continuer. Je suis la suite de ça. Je m'inscris dans la suite de Godin et [René] Lévesque », m'a-t-il lancé, avec assurance, au cours d'une longue entrevue dans un restaurant portugais du Vieux-Montréal, situé près de son ancien cabinet d'avocats.

Nous parlions alors de l'épisode de la « charte de la laïcité » du gouvernement Marois, un projet maintes fois critiqué par M. St-Pierre Plamondon sur différentes tribunes médiatiques avant son entrée en politique.

Aujourd'hui candidat à la direction du parti qui a pondu ce projet de charte, le jeune avocat critique encore sévèrement ceux (Jean-François Lisée, ici, sans le nommer, toutefois) qui « opposent encore le nous contre le vous ».

« J'ai perdu des orphelins politiques racisés parce que leur perception, c'est que le PQ n'est pas ouvert. On peut rendre le PQ plus ouvert plutôt que de faire dans le "nous" et le "vous", ce qu'on voit encore dans cette course. »

Sans complexes

En débat, la semaine dernière à l'Université de Montréal, il en a rajouté, accusant ses adversaires de faire du clientélisme en « demandant aux allophones ce qu'ils veulent pour adhérer au projet souverainiste ». « Avez-vous déjà essayé de forcer du monde à avoir du fun dans un party ? », a-t-il lancé, déclenchant des rires dans la salle et des sourires crispés chez ses adversaires.

En quelques semaines seulement sur la scène politique, PSPP a démontré qu'il ne souffre d'aucun complexe envers ses adversaires beaucoup plus aguerris, qu'il jouit d'une très grande confiance en lui et qu'il a un talent certain pour les joutes oratoires et la politique en général.

« Mon CV n'a rien à envier à ceux des autres candidats, dit-il. La différence, c'est que j'ai fait de la politique de l'extérieur, de la politique citoyenne et par mes tribunes médiatiques. Je n'ai pas de bilan à défendre et je n'ai aucune ficelle. J'ai la liberté de dire les choses telles qu'elles sont, de façon constructive. Je ne suis pas là pour mettre le feu. »

Fonceur, certes, le jeune homme de 39 ans, mais ce midi-là, il était visiblement fatigué.

« Je suis jeune et en forme, mais c'est exigeant. En tout cas, ce n'est pas plate, ce que je vis ! »

Grand sportif (il a été notamment quart-arrière au football collégial, il a longtemps joué au hockey, il joue au tennis en « temps normal, mais pas en campagne », précise-t-il), Paul St-Pierre Plamondon a été terrassé, il y a deux ans, par une violente commotion cérébrale qui l'a tenu sur le carreau pendant un an. Les années de pratique du football avaient déjà laissé des traces, puis une rondelle de hockey lui a violemment frappé la tête malgré son casque. Il assure être rétabli à 100 %, mais il reconnaît que la vie de politicien en campagne est extrêmement prenante.

Il prend une pause, visiblement ému, pour parler de sa femme, son principal appui, du projet de famille repoussé à plus tard et des sacrifices de la vie publique.

« Elle trouve ça épuisant, mais elle a un bon coeur. Une chance qu'elle est là », lâche-t-il.

Le défi de se faire connaître est déjà suffisamment grand, mais PSPP doit, en plus, forcer quelques portes pour mener sa campagne.

« Les militants sont très corrects avec moi, cela doit être dit, commence-t-il. Mais j'ai plus de difficulté à certains endroits avec l'appareil du parti. C'est parfois difficile d'avoir accès aux militants. Des organisateurs locaux me répondent : "J'ai déjà donné mon appui à un tel ou une telle, donc on n'est pas vraiment intéressé à vous rencontrer." Mais moi, pour que je puisse faire campagne, il faut que je puisse rencontrer les militants. »

Faire partie de la solution

Son entrée dans la course au PQ a surpris les observateurs, d'autant que PSPP s'est montré au fil des années très critique envers les partis politiques, quels qu'ils soient. Le printemps dernier encore, il lançait un appel à la mobilisation des « orphelins politiques » pour, disait-il, « sortir de l'impasse politique au Québec ».

« C'est vrai qu'il y a trois mois, je n'étais pas là du tout, mais la démission-surprise de Pierre Karl Péladeau a changé la donne. Que ça passe par un parti existant ou par un nouveau parti, peu importe, l'important, c'est de sortir de l'impasse. Il faut s'éloigner de ce qu'on a vu encore au dernier débat des chefs, c'est-à-dire la peur du référendum. Est-ce qu'on continue de se rassembler en orphelins politiques sur la voie de service ? J'en suis venu à la conclusion qu'il vaut mieux faire partie de la solution. »

Plusieurs péquistes influents, dont Jean-François Lisée, ont salué l'arrivée de Paul St-Pierre Plamondon comme un signe de relève, et il est clair que le jeune candidat veut se présenter dans une circonscription en 2018 (ou avant, s'il y a des démissions de députés en poste).

L'article 1

La greffe au PQ, toutefois, ne semblait pas évidente au départ. M. St-Pierre Plamondon n'a jamais milité pour ce parti, on ne lui connaissait pas de penchant avoué pour l'option souverainiste et il écorche son nouveau parti sans retenue, surtout sur les questions identitaires et sur la stratégie référendaire.

Sur ce dernier point, sa proposition est plutôt singulière : il n'y aura un référendum que si 20 % des électeurs le réclament dans un registre et que l'appui à la souveraineté atteint 45 % dans les sondages (menés par le gouvernement et évalués par des experts).

« Je suis un démocrate, dit-il. Contrairement à mes adversaires, je vais respecter la volonté de la population. Je n'aurais pas le pouvoir de déclencher un référendum. Je remets cette décision entre les mains de la population. Comme ça, ils n'auront pas à avoir peur d'eux-mêmes. »

Le sacro-saint article 1 du PQ se lit ainsi : « Aspirant à la liberté politique, le Parti Québécois a pour objectif premier de réaliser la souveraineté du Québec à la suite d'une consultation de la population par référendum tenu au moment jugé approprié par le gouvernement. »

« Je propose une modification de l'article 1 : je scratche "par le gouvernement" et je le remplace par "par la population" », indique PSPP.

Mais pour lui, de toute évidence, la priorité est ailleurs. « Dans un premier mandat, on fait le ménage, on écrit une Constitution du Québec, on change le mode de scrutin et on met fin à la culture de l'austérité. La conséquence [de promettre un référendum], c'est de maintenir les libéraux au pouvoir. Le PQ a un devoir moral de trouver une solution. »

Paul St-Pierre Plamondon

Né le 17 février 1977 à Trois-Rivières

Études

Droit à l'Université McGill (2001), MBA à l'Université d'Oxford (2006) et certificat en droit international à l'Université de Lund, en Suède (2001)

Vie professionnelle 

VP au cabinet Delegatus (services juridiques) ; affaires juridiques de l'OTAN à Bruxelles

Vie publique

Cofondateur du groupe Génération d'idées en 2007 ; commentateur invité à Bazzo.tv

Politique

Membre et candidat à la direction du PQ depuis juillet 2016

Principales propositions 

- Démarche référendaire : pas de référendum dans le premier mandat et, par la suite, tenue d'un référendum seulement lorsque 20 % des Québécois le réclament par voie de registre et que l'appui mesuré à la souveraineté atteint 45 % et s'y maintient.

« Le problème du Parti québécois, c'est qu'ils veulent tenir un référendum et lorsqu'ils voient, à la dernière seconde, que la température de l'eau n'est pas la bonne, ils promettent qu'il n'y en aura pas. Après ça, essaye d'agir en leader et de parler de souveraineté ! »

- Réforme du mode de scrutin

- Écrire la Constitution du Québec