Jean Charest est un personnage politique atypique.

Je n'arrive jamais à dire si c'est de la nonchalance, de la lassitude ou un rôle qu'il joue, mais j'ai depuis longtemps l'impression que la gestion quotidienne de l'État l'ennuie. Seules les campagnes électorales arrivent à rallumer le feu en lui, et encore, pas toujours, comme on l'a constaté en 2007.

Hier matin, il s'est présenté devant les collègues de la tribune parlementaire de Québec, accompagné de son fidèle secrétaire de presse, Hugo D'Amours, avec qui il badinait, sourire aux lèvres.

- Pourquoi avez-vous décidé de rencontrer, finalement, les leaders étudiants? lui a demandé une consoeur.

- Bien, parce que c'est une nouvelle étape, a répondu le premier ministre, sans grande conviction.

Une nouvelle étape? Rien de plus? Business as usual... Comme le flegmatique Jacques Martin aurait pu répondre après une défaite honorable en prolongation au 29e match d'une saison de 82 matches...

C'est juste une nouvelle étape. Après plus de 100 jours de grève et de perturbation? Après avoir accepté de rencontrer les représentants étudiants pour la première fois? Au moment où les rumeurs d'élections reprennent de plus belle? Alors que le Québec en a ras le bol et que la contestation se répand comme le virus de la grippe?

Je comprends que M. Charest ne voulait pas faire augmenter les attentes et, ainsi, accentuer ce nouveau psychodrame, mais le fait est qu'il a plié sur trois fronts au cours des deux derniers jours. D'abord, il a accepté de s'asseoir avec les leaders étudiants, dont Gabriel Nadeau-Dubois de la CLASSE, il a accepté qu'on discute de droits de scolarité et, selon ce que mes collègues Denis Lessard et Tommy Chouinard rapportent, il a décidé de diminuer la hausse prévue. Pas beaucoup, mais le geste est néanmoins important. Le reste, c'est une question de négos, de contre-offre, de«paramètres» (le nouveau mot à la mode) et de libellé de communiqué de presse pour que les deux parties sauvent la face.

Bien sûr, il se trouvera bien des gens, si on arrive à un tel compromis, pour critiquer le gouvernement d'avoir reculé devant les leaders étudiants, mais le recul a parfois du bon, politiquement.

Ce gouvernement a multiplié les reculs depuis neuf ans. Ce qu'on lui a reproché chaque fois, ce n'est pas d'avoir, finalement, pris la bonne décision, mais bien plutôt d'avoir attendu aussi longtemps avant de la prendre.

Qu'est-ce que les Québécois souhaitent le plus?

Des élections en plein été, sur fond de crise? Une impasse qui ne fera que repousser le problème au mois de septembre, sans mettre fin aux manifestations et au litige? Un règlement, même imparfait, obtenu après des négociations cordiales?

La troisième option est, sans contredit, la meilleure pour tout le monde. Cela ne fera pas taire tous les critiques de ce gouvernement, qu'ils s'expriment par des mots ou par des casseroles, mais cela permettrait de faire baisser la pression dans le Presto social.