Avec l'adoption du projet de loi mammouth à Québec, la modulation du tarif des frais de garde est entrée en vigueur la semaine dernière. Et elle risque de donner des maux de tête aux familles, en particulier les familles séparées et recomposées.

Même si les changements s'appliquent depuis le 22 avril, les CPE et les garderies subventionnées continueront d'exiger uniquement la contribution de base qui s'établit à 7,30 $ par jour. Mais les parents doivent commencer à mettre des sous de côté dès aujourd'hui, sans quoi ils auront une très vilaine surprise en faisant leur déclaration de revenus l'an prochain.

Québec exige désormais une contribution additionnelle aux familles « riches » qui gagnent plus de 50 000 $. Le tarif grimpe en fonction du revenu familial et atteint 20 $ par jour lorsque les parents gagnent plus de 155 000 $ (deux salaires de 77 500 $).

Cela signifie que la contribution excédentaire s'élèvera jusqu'à 12,70 $ par jour, soit 63,50 $ par semaine, soit 3300 $ par année. Avec deux enfants, ça fait 6600 $ par année. Ouf, c'est beaucoup d'argent à cracher d'un seul coup ! Un petit bémol : la contribution additionnelle ne s'appliquera pas sur votre troisième enfant inscrit dans une garderie subventionnée préscolaire.

Pour vous aider à faire votre budget, Québec a mis en ligne une calculatrice qui permet d'évaluer votre contribution excédentaire.

Si vous ne voulez pas vous retrouver avec une facture terrible à la fin de l'année, vous devriez immédiatement mettre en branle un plan d'épargne systématique. Autres solutions : demandez à votre employeur qu'il prélève plus d'impôt sur votre paie ou faites des acomptes provisionnels plus élevés si vous êtes travailleur autonome.

Remarquez que votre facture finale sera un peu moins élevée, car les frais de garde, y compris la contribution excédentaire, vous donnent droit à une déduction d'impôt fédérale, ce qui vous permet de bonifier par la bande certaines prestations (ex. : crédit TPS, prestation fiscale pour enfant).

Mais tout dépend de votre situation familiale. Pour évaluer le coût net de votre service de garde, vous pouvez utiliser une autre calculatrice. Cet outil permet aussi de comparer le tarif des garderies subventionnées avec celui des garderies privées.

En tenant compte de la fiscalité, bien des familles aisées découvriront qu'il serait moins coûteux d'envoyer leur enfant dans une garderie privée, plutôt que de l'envoyer dans une garderie subventionnée qui leur demandera désormais une contribution excédentaire.

Encore plus étonnant : de nombreuses familles à faibles revenus paieraient moins cher en envoyant leur enfant dans une garderie privée, si elles peuvent en trouver une à leur goût à 35 $ par jour. En tenant compte de l'impôt, la place pourrait leur coûter à peine 1 $ par jour. Oui, oui, c'est vrai !

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Par ailleurs, la modulation des frais de garde risque de causer des tiraillements dans les familles séparées et recomposées.

La contribution excédentaire est calculée en fonction du revenu familial. Mais de quels parents ? Tout dépend de l'entente de service et de qui paie la contribution de base au service de garde.

Souvent, la garderie ne fait qu'une seule facture que les parents se partagent par la suite. Dans un tel scénario, la contribution excédentaire sera calculée en fonction du revenu familial de celui qui paie la facture.

Si l'un des conjoints a des revenus très inférieurs, il serait donc judicieux que ce soit lui qui paie la facture en entier, pour éviter la contribution excédentaire. Prenons un exemple : Martin gagne 35 000 $ par année tandis que Marie-Ève gagne 155 000 $. Le couple séparé a un enfant au CPE.

Si l'entente de service est au nom de Martin et que c'est lui qui paie la facture, les parents n'auront pas de contribution excédentaire ni l'un ni l'autre, m'a confirmé le ministère de la Famille. Évidemment, Marie-Ève devra rembourser Martin afin qu'il ne soit pas lésé. Encore faut-il que les parents s'entendent.

Lorsque les relations entre les parents sont tendues, la garderie peut conclure deux ententes de service et présenter deux factures différentes. Dans ce cas, chacun des parents verra sa contribution additionnelle établie en fonction de ses propres revenus familiaux. Dans le cas précédent, Marie-Ève devrait alors payer la contribution excédentaire maximale sur sa moitié de facture.

Le casse-tête sera encore plus compliqué pour les familles recomposées, car la contribution excédentaire sera calculée en fonction des revenus de la nouvelle famille.

Par exemple, si Martin se fait une nouvelle conjointe qui gagne 80 000 $, sa contribution excédentaire sera calculée en fonction de son nouveau revenu familial, y compris celui de sa nouvelle flamme, même si celle-ci n'a rien à voir avec l'enfant de Martin.

Je sais que c'est un peu étrange, mais toute la fiscalité est faite comme ça ! Les gens qui se font un nouveau conjoint peuvent perdre jusqu'à 10 000 $, parce que les crédits et prestations de toutes sortes sont calculés en fonction du revenu familial. Que voulez-vous, l'amour coûte cher !