Samedi dernier, je chroniquais sur la légèreté de l'été. L'été, tout va bien! Le politicien serre des mains, le Canadien ne perd pas, les bouchons nous stressent moins, les écoles sont vides et on évite les urgences. Le bonheur! Pauvre innocent...

J'avais oublié le terrorisme. Le terrorisme a fait sauter l'été. Boum! Pulvérisée, la légèreté. Les nouvelles, depuis hier, sont plus glaciales qu'en hiver. Vendredi matin, trois attentats terroristes ont été perpétrés dans trois pays différents: la France, la Tunisie et le Koweït. Des dizaines et des dizaines de victimes. On peut ajouter à cette liste la tuerie aux États-Unis, il y a 10 jours. Un suprémaciste blanc qui tue neuf personnes parce qu'elles sont noires, c'est un acte terroriste. Un acte de folie, mais un acte de folie idéologique. Il veut terroriser ceux qui n'ont pas la même couleur de peau que lui, comme d'autres veulent terroriser ceux qui ne vénèrent pas le même dieu qu'eux.

Ah le joli monde. Les victimes de Charleston étaient à l'église, en train d'étudier la Bible, quand l'homme haineux a sorti son arme. Est-ce qu'il y a un moment où tu peux te penser plus en paix, plus à l'abri, que lorsque tu es dans ton église, en train d'écouter ton pasteur t'expliquer «aimez-vous les uns les autres»? Comment craindre son voisin? Comment se protéger de lui? Quand vous avez les yeux fermés en train de méditer...

Les victimes de l'hôtel Marhaba étaient sur la plage, en train de se baigner dans la Méditerranée, quand on a ouvert le feu sur elles. Est-ce qu'il y a un moment où tu peux te penser plus en paix, plus relax, que lorsque tu es en train de te faire bronzer? Comment craindre son voisin? Il est en costume de bain. Il n'a rien à cacher, à part son biscuit. Le bord de la mer, c'est là où la terre commence à devenir le ciel. C'est un coin d'infini. On se sent loin de tous nos tracas. On ne se méfie de personne, à part du soleil. Il est le seul de qui on peut craindre un coup. Ça, c'était avant vendredi. Pour le reste de l'été, tous les vacanciers de la Méditerranée ne regarderont plus l'horizon de la même façon. C'est quoi, cette forme dans le ciel, un cerf-volant ou un drone?

Le terrorisme traque l'homme dans son nid le plus douillet. Dans ses moments bouillon de poulet. Il n'y a plus de réconfort. Ni le ciel ni la mer ne nous protègent. On ne peut rien y faire. Faut juste ne pas être au mauvais endroit, au mauvais moment. Le mauvais endroit, c'est partout. À l'église comme à la mosquée, où 25 personnes sont mortes vendredi au Koweït, en vacances ou à l'usine, où un Français a été décapité, vendredi aussi. Le terrorisme agit là où il le veut. Ça peut être un blanc-bec du quartier ou un forcené venu d'ailleurs.

On aura beau passer les lois que l'on veut, on n'arrivera jamais à surveiller 7 milliards d'êtres humains. Bien sûr, il faut lutter contre le terrorisme, mais il faut surtout lutter contre le désespoir. Tous ces gestes de terrorisme sont causés par des désespérés. Plus ils seront nombreux, plus des innocents mourront à cause d'eux.

Tant de sommets pour sauver l'économie, combien de sommets pour sauver l'être humain? Combien de sommets pour guérir la folie des hommes? Si toutes les mesures pour protéger le dollar, pour maintenir haut l'indice boursier provoquent plus de misère et plus de pauvreté, on ne règle rien. On ne fait qu'empirer notre sort. Les fanatiques auront encore plus de désespérés sous la main.

Les humains sont une famille dysfonctionnelle. On ne sait pas vivre ensemble. Pourtant on ne peut vivre qu'ensemble. Le battement des ailes d'un papillon peut provoquer un tsunami. On est tous liés les uns aux autres. Mais comme on est tous des égoïstes et que l'on veut atteindre le sommet avant les autres, on ne cesse de s'enfarger.

Heureusement, la plupart des gens ne se tirent pas dessus avec des fusils, mais ils se tirent quand même dessus avec des mots et avec des gestes. Et surtout, ils se tapent dessus à grands coups d'indifférence. C'est pas mon problème! Ben oui, c'est ton problème. Tous les problèmes sont nos problèmes. On en a un maudit paquet.

Bien sûr, on peut penser régler tout ça en tuant ceux qui tuent. La peine de mort se pratique depuis la nuit des temps et ça n'a pas empêché les humains de continuer à tuer leurs semblables. Ce n'est pas la mort qui sauvera la vie.

On n'arrivera jamais au bout de la haine, il y en a trop. C'est comme la poussière. Il suffit de vivre pour en provoquer. Mais si on pouvait faire le ménage de nos âmes pour en accumuler le moins possible, ce serait déjà ça de nettoyé.

Il faut faire sa part pour l'environnement. Il faut aussi faire sa part pour l'harmonie. Diminuer les émanations de gaz, c'est bien. Diminuer les émanations de haine, aussi. Il faut en transmettre le moins possible au quotidien. Autant aux gens que l'on aime qu'aux gens que l'on n'aime pas. C'est tout ce que l'on peut faire. On n'est libres que de nos mouvements. Ceux des autres ne dépendent pas de notre volonté. Si on arrêtait d'essayer de se dominer.

Pour lutter contre le terrorisme, il faut s'aimer. Encore plus.

Vous allez dire que je pellette des nuages? C'est l'été, on pellette ce que l'on peut. Et si la vue d'actes violents n'engendre pas chez le témoin l'envie de répandre la paix, alors il les regarde pour rien.

Il ne faut pas seulement s'informer, il faut prendre conscience.

La semaine dernière, je vous souhaitais un été léger, on repassera.

Cette semaine, je vous souhaite un été en paix. À nous de le semer.